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A quoi sert la CPHSCT en agriculture ?

La Commission nationale paritaire pour l’amélioration des conditions de travail en agriculture (CPNACTA) a organisé une journée pour promouvoir les instances qui s’occupent de santé et de sécurité au travail, les CPHSCT, le 9 avril 2024. Derrière ces acronymes un peu barbares se cachent des commissions primordiales pour le travail salarié dans les fermes.

© Adobestock
 

CPHSCT : c’est quoi ?

Créées dans la Loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999, les Commissions Paritaires d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail (CPHSCT) sont des instances qui regroupent les partenaires sociaux, employeurs et salariés d’un département ou de plusieurs départements. Sont concernées, les entreprises qui emploient au moins un salarié dans ces secteurs : polyculture-élevage, cultures, élevages spécialisés, exploitations de dressage et d’entraînement, haras, conchyliculture, pisciculture, exploitation forestière, sylviculture, scieries, entreprises du secteur jardins et espaces verts, entreprises de travaux agricoles (ETA) ou coopératives d’utilisation de machines agricoles (cuma).

Leur objet de discussion : comment améliorer la santé et la sécurité au travail des salariés par des actions concrètes.

 

Combien de CPHSCT en France et où ?

Le nombre de CPHSCT a diminué drastiquement entre 2018 et 2019, de 32 commissions départementales, seules 22 ont survécu. Quant aux commissions pluridépartementales, on en compte 7.

Carte de France des CHSCT.

 

 

Pourquoi on connaît mal les CPHSCT ?

Les CPHSCT n’existent pas partout en raison de la difficulté à les mettre en place. Les élus, salariés comme employeurs, sont issus de PME ou TPME qui n’ont pas les moyens ni le temps pour permettre à leur personnel de participer à ces instances. Par ailleurs, les règles imposent une parité entre les collèges d’employeurs et de salariés souvent compliquée en pratique.

Toutefois, un décret paru en 2023 devrait permettre d’améliorer la situation. 

Tout d’abord, il n’est plus obligatoire pour chaque poste de titulaire, d’avoir un suppléant. En cas de manque de ressources humaines pour constituer une CPHSCT dans un département, la puissance publique permet la création d’une instance régionale, pour regrouper les forces en quelque sorte. Par ailleurs, il n’est plus obligatoire de recruter tous les membres au sein des TPE agricoles, ça peut être dans des grandes entreprises, à condition qu’elles soient du secteur agricole. « Il est plus facile de dégager des disponibilités de salariés de ces entreprises-là plutôt que de petites entreprises », note Pierre Jardon, du syndicat SNCEA/CFE-CGC lors de la journée dédiée aux CPHSCT le 9 avril 2024, saluant aussi la possibilité de nommer de jeunes retraités de moins de deux ans.

 

Pourquoi la sécurité et la santé sont importantes particulièrement en agriculture ?

Le ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté Alimentaire le souligne : 110 salariés agricoles meurent au travail chaque année, soit un tous les trois jours. 

Les chiffres le prouvent : en 2021, on totalisait 47 000 accidents, dont 42,3% dans le secteur culture-élevage et 25,7% pour les travaux agricoles. Parmi les victimes, 91% sont des hommes, âgés de 50 à 59 ans pour 39% d'entre eux.

Lire aussi : Quel secteur agricole enregistre le plus d’accidents du travail ?

La MSA a comptabilisé près de 1,3 million d’emplois au régime agricole en 2022, parmi eux, 64,4% sont des salariés. Les syndicats de salariés pointent leur plus grande exposition aux troubles musculosquelettiques (TMS), ainsi que l’exposition aux substances chimiques, notamment en viticulture et en arboriculture. Les conditions de travail des salariés agricoles sont souvent difficiles : exposition aux vibrations, conditions climatiques extrêmes, chaleur, vent, pluie, froid, pluie, ou encore, exposition aux ultra-violets. Ces conditions sont aggravées par l’instabilité des travailleurs : le secteur agricole compte 25% de travail temporaire (contre 11% dans l’industrie et 13% dans les services). Or, ces salariés sont moins bien informés sur les risques et les gestes de sécurité.

Lire aussi : Pesticides : treize mutuelles demandent l’alignement du fonds d’indemnisation des victimes sur celui de l’amiante

 

Les chiffres des accidents au niveau départemental manquent pour évaluer les actions menées

Outre la question de la disponibilité des salariés pour se rendre aux réunions, les membres de la journée dédiée aux CPHSCT s’accordent sur le besoin d’avoir des chiffres sur la sécurité au travail. « Malheureusement, les accidents mortels, on n’en a pas connaissance », note Sylvain Vernier, du syndicat FGTA/FO qui regrette que les données locales sur les accidents de travail ne soient pas communiquées régulièrement aux commissions. « Il faut un suivi annuel », approuve Pierre-Yves Le Bozec de la FNSEA, aussi pour évaluer l’efficacité des actions menées.

 

Vaucluse, Gard, Lorraine et Pas-de-Calais : témoignages sur les bonnes actions des CPHSCT

« Les CPHSCT sont un enjeu d’innovation sociale, martèle Anne-Sophie Forget, secrétaire de la CPNACTA, à l’heure où les conditions de travail sont un sujet de société, nous avons voulu mettre en lumière ce qui fonctionne ». Elle rappelle l’importance des sujets de sécurité et santé au travail comme facteurs d’attractivité des métiers agricoles.

Les chantiers itinérants, problématique de la CPHSCT du Vaucluse

La CPHSCT du Vaucluse existe depuis 2002. La commission travaille sur la question des chantiers itinérants, en viticulture notamment, pour améliorer le manque d’infrastructures de base, constatant que des salariés ne bénéficient pas de sanitaires, par exemple ou ne peuvent pas prendre leurs repas au chaud par temps froid. 

La CPHSCT a décidé d’apporter un appui technique et financier aux projets d’aménagements des entreprises de moins de 11 salariés, affiliées à la MSA. Elle les conseille sur la réglementation d’urbanisme, le code du travail et finance jusqu’à 50% (dans la limite de 2 000 euros par projet) des équipements sanitaires (approvisionnement en eau, WC, lavabos), de cuisine (frigos, plaques de cuisson, four, évier) ou encore du mobilier de restauration, des vestiaires. Une partie est financée par la CPHSCT et une autre par la MSA du Vaucluse. Deux projets ont déjà vu le jour : la rénovation de deux caravanes de réforme, équipées d’une cuisine et de WC chimiques, avec un coût estimé à 2000 € grâce à la subvention.

Le risque CO2 dans les caves coopératives vinicoles préoccupe la CPHSCT du Gard 

La CPHSCT du Gard, qui a un fonctionnement régulier depuis 2018, a travaillé sur le risque CO2 dans les caves coopératives vinicoles (l’exposition au gaz carbonique peut être mortel) : des affiches et flyers de sensibilisation ont été envoyés en 2023 dans les entreprises de moins de 11 salariés.

Le flyer de prévention des risques de CO2 créé et diffusé par la CPHSCT du Gard.

La CPHSCT de Lorraine étudie le lien entre robotisation de la traite et la qualité de vie des éleveurs

La CPHSCT de Lorraine, constituée en 2008 et qui réunit quatre départements, a mené une étude entre 2014 et 2018 sur la robotisation de la traite en lien avec la qualité de vie des éleveurs. L’étude a fait suite à une série d’échecs et de témoignages de mal-être liés à la mise en place de robots de traite dans l’exploitation. L’investigation, menée par des professionnels (sociologues, techniciens des chambres d’agriculture, MSA) a mis en évidence les points de vigilance lors de l’introduction d’outils de ce type dans les fermes : les nouvelles contraintes d’organisation, les besoins de formation, les risques de troubles liés à l’hyperconnexion, la charge mentale, un manque d’autonomie dans les taches qui peut être mal ressenti par les salariés. La CPHSCT a largement communiqué sur cette étude qui est aussi diffusée par la MSA et dans les établissements scolaires.

La CPHSCT du Nord-Pas-de-Calais forme sur la motivation des salariés 

Les membres de la CPHSCT du Nord-Pas-de-Calais, mise en place en 2007, ont créé une formation pour « améliorer la qualité relationnelle et la motivation avec ses salariés ». Faisant le constat de difficultés dans les fermes, d’absentéisme, de manque de dialogue entre exploitant et salariés, de difficultés à déléguer, du manque d’implication de salariés dans les projets de l’entreprise. Ils ont créé de toutes pièces une formation de deux jours accompagnée pour les participants de trois entretiens individuels d’une heure. Depuis 2019, 7 sessions ont eu lieu avec 53 entreprises de productions différentes. Les membres de la commission ont réussi à créer une dynamique autour de leur projet en gardant le contact avec les participants via un groupe Wattsapp.

 

Lire aussi : Comment recruter et fidéliser ses salariés agricoles ?

Le flyer de la CPHSCT du Nord-Pas-de-Calais.

 

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