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En Rhône-Alpes
Soréal entretient une dynamique forte grâce à une filière solidaire

Le groupe Soréal a noué des partenariats forts pour obtenir la valeur ajoutée qui l’aide à maintenir une activité porcine en région Rhône-Alpes.

« Dans une zone à faible densité porcine, les intérêts des différents maillons d’une filière sont encore plus liés qu’ailleurs. » La conviction de Thierry Thenoz, président du groupement de producteurs Sirepp, est partagée par Didier Labrosse, directeur du département porc du fabricant d’aliments Soreal, comme par Christophe Bernigaud, directeur de l’abattoir des Crets, à Bourg-en-Bresse, appartenant au groupe privé Carrel. Ces trois acteurs majeurs de la filière porcine rhônalpine ont trouvé depuis une bonne dizaine d’années l’articulation qui leur convient. En amont, le groupe d’essence coopérative Soreal est activement à la manœuvre comme il l’a prouvé en organisant le 5 juin dernier à Vonnas une journée « ambitions 2030 ». Ce spécialiste de la nutrition animale réalise 44 de ses 100 M€ de chiffre d’affaires en nourrissant, en multipliant, en engraissant et en négociant des porcs. Ses deux usines produisent environ 45 000 tonnes d’aliment porcin. En outre Soreal contrôle à 100 % la société Massard, à la tête d’un atelier de multiplication de 550 truies (Choice) et d’unités qui engraissent annuellement 31 000 charcutiers. En 2018, cette filiale a commercialisé en sus 65 000 charcutiers que lui ont cédés des éleveurs indépendants de Rhône-Alpes et de la région Centre. Massard sert encore de point d’appui à la Sirepp dont il optimise les charges. Les 52 éleveurs du groupement pilotent des ateliers de 60 à 400 truies. Ils livrent 55 000 porcs par an. « Un total de 156 000 charcutiers, cela permet d’exister et d’avoir un pôle d’abattage régional », relève Thierry Thenoz. 20 % de ces animaux sont envoyés sur trois abattoirs dans le Rhône (Sopacel), la Saône-et-Loire (Clavière) et la Lozère (Langogne). Mais 80 % sont absorbés par l’abattoir des Crets.

Des mécanismes amortissent les fluctuations conjoncturelles des marchés

Les liens entre Soreal, Massard et la Sirepp ont été renforcés une première fois en 2006 par la prise de participation des deux premiers dans la Sica sous forme de parts B. En 2010, pareille opération a été renouvelée pour l’abattoir des Crets. « Cela permet de vrais échanges », souligne Thierry Thenoz. En pratique, les partenaires ont mis en place des mécanismes de stabilisation qui amortissent les fluctuations conjoncturelles des marchés. L’habitude de négocier le prix de l’aliment avec Soreal a fait place à un tarif qui évolue en fonction de l’indice mensuel des prix agricoles à la production (Ippap). Le même sert de référence pour contractualiser les apports autour d’un tunnel de prix valable pendant un trimestre. « Nous appliquons le cadran tant qu’il se trouve dans la fourchette définie. S’il descend en dessous, l’abattoir prend la moitié du différentiel à sa charge. S’il est au-dessus, c’est à l’éleveur de contribuer. C’est un système qui nous va bien. Le coût de production du kilo de porc charcutier est pris en compte », explique Thierry Thenoz. Dans son rôle de spécialiste de la nutrition, Soreal reste pour sa part attentif aux nouvelles demandes comme une alimentation non OGM et l’incorporation de lin aux formules. « De plus en plus de filières poussent à aller dans ce sens », note Christian Pocard, directeur général du groupe Soreal. Enfin, d’un point de vue zootechnique, les éleveurs peuvent sécuriser leur système en s’approvisionnant en cochettes auprès de l’élevage de multiplication de Massard. « Tous ne le font pas. Mais c’est une solution transparente et de proximité », commente Thierry Thenoz.

Des porcs de 120 à 130 kilos vifs à l’abattoir

L’abattoir des Crets représente quasiment la moitié des abattages rhônalpins (1). Ses 280 000 porcs par an proviennent à 60 % de Rhône-Alpes et à 15 % de régions limitrophes. « Notre stratégie est de nous démarquer du porc standard. Nous demandons des animaux de 120 à 130 kg vifs, détaille Christophe Bernigaud. Je fais régulièrement visiter l’abattoir aux éleveurs qui le livrent pour qu’ils connaissent la destinée de leurs animaux, qu’ils aient une idée des exigences des cahiers de charges extrêmement précis de nos clients. Nous sommes attentifs aux demandes sociétales. Des caméras filment la réception des porcs. Ils sont anesthésiés par électronarcose avant saignée. Les règles du bien-être animal sont respectées. Six opérateurs ont été spécialement formés. » 20 % du tonnage de l’outil est écoulé sous forme de viande fraîche. 80 % du volume est découpé ou tranché pour élaborer du jambon 5D (désossé, dégraissé, découenné), des salaisons, notamment les IGP Ardèche, saucisse de Morteau et de Montbéliard. « Il existe un gros potentiel salaisonnier à deux cents kilomètres à la ronde. C’est notre chance », insiste Christophe Bernigaud. La filière ne revendique ni label rouge, ni porc fermier, mais s’inscrit dans la démarche VPF et « la Région du goût ». Réforme territoriale oblige, cette identification a succédé en 2017 à « Porc Rhône-Alpes ». « Elle n’est pas pertinente. Pas assez marquée et pas suffisamment explicite », regrette Thierry Thenoz.

Les acteurs de la filière rhônalpine partagent la même ambition de maintenir le volume actuel et de conserver la dynamique régionale. « Soyons lucides ! Nous sommes au cœur d’un grand bassin de consommation qui veut être réassuré avec de la marchandise produite localement », juge Thierry Thenoz. Christophe Bernigaud le rejoint. « Continuons à faire ce que nous faisons, mais faisons le bien ! » Le défi immédiat de la filière reste, comme partout, la perception du métier. À plus long terme, elle devra inventer les moyens de trouver une relève à des éleveurs aujourd’hui plutôt âgés de 45 à 50 ans. « Aujourd’hui, tout candidat à la reprise s’interroge à deux fois sur le rapport entre le capital à investir et la rentabilité de l’activité, remarque Thierry Thenoz. Alors que la taille des ateliers qui cherchent un successeur ne cesse d’augmenter, il nous faut plus que jamais imaginer de nouvelles formes de financement. »

(1) L’ancienne région administrative Rhône-Alpes dénombre seize sites d’abattage pour 500 000 porcs abattus en 2018.

Une plus-value de trois centimes pour la saucisse de Morteau

La filière saucisse de Morteau écoule un peu plus de 4 000 tonnes de produits par an. Une dizaine d’élevages rhônalpins produit des cochons qui répondent à son cahier des charges. L’atelier de 800 places de PS et de 1 800 porcs à l’engrais de la société Massard à Corgenon, dans l’Ain, est l’un d’entre eux. Sa distribution a été reconvertie il y a deux ans en système soupe afin d’utiliser du lactosérum, matière première indispensable pour pouvoir prétendre à l’IGP Morteau. « La coopérative laitière d’Etrez-en-Bresse nous en livre tous les deux jours soit 90 000 litres par semaine », indique Franck Dubois, le responsable du site. Trois repas sont servis par jour. La ration nourrain est dosée à 17,4 % de protéines. Ce taux descend à 15,3 % en finition. « Le rationnement qui a été mis en place a permis de passer de 56-57 à 59-60 de TMP », constate Franck Dubois. L’atelier vise des poids de carcasse de 94 à 96 kg à chaud. La filière accorde une plus-value de 3 centimes du kilo toute l’année, malgré la forte saisonnalité du produit et donc de la demande qui varie d'un à sept entre les mois creux et les mois pleins. Actuellement quelque 45 000 porcs rhônalpins sont destinés à la fabrication de la saucisse de Morteau. La filière régionale a pour objectif d’en fournir 50 000. En 2018, 162 ateliers étaient engagés dans les démarches IGP Morteau/Montbéliard, pour un potentiel annuel de production estimé à 556 000 porcs.

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