Rustique, conformé et économe, le Southdown revient !
La race Southdown, très présente sur le sol français, jusque dans les années soixante, est aujourd’hui menacée. Pourtant, un groupe d’irréductibles sélectionneurs passionnés a tenu bon et se mobilise pour faire connaître et diffuser ce mouton britannique dans les élevages de France, présent en France depuis 170 ans.

Originaire du sud de l’Angleterre, le mouton de race Southdown (pour les néophytes, prononcez Soudoune) a été importé en France à l’occasion de l’Exposition universelle de Paris en 1855 par le Comte Charles de Bouillé au château de Villars, dans la Nièvre. En 2025, il fête les 170 ans de son arrivée en France.
Pourtant, sa situation, au début des années 2000 et jusqu’à ces dernières années, n’était pas reluisante. « Lorsque j’ai créé ma troupe de Southdown en 2015, il n’y avait plus que trois sélectionneurs sur la France entière », se remémore David Tourte, le président de l’association des éleveurs français de Southdown, qui compte aujourd’hui dix membres.

Une brebis qui supporte les sécheresses
« Le choix du Southdown était historique et bien réfléchi dans mon cas. Mes grands-parents en élevaient et je savais que les caractéristiques de la race colleraient avec mon système d’élevage », reprend l’éleveur de Seine-et-Marne. Sa troupe ovine compte aujourd’hui une soixantaine de Southdown, mais il compte bien monter à 150, voire 200, brebis en race pure, en plus de son atelier de vaches allaitantes.

À l’origine de nombreuses races bouchères
Depuis son arrivée sur le sol français dans la seconde moitié du XIXe siècle jusqu’à l’après Deuxième Guerre mondiale, le Southdown a d’ailleurs été croisé avec les moutons français, au point que ses gènes se retrouvent dans de nombreuses races actuelles.
« Avranchin, Berrichon du Cher, Hampshire, Île-de-France, Mouton charollais, Mouton vendéen, Shropshire et Suffolk comptent dans leurs ancêtres des Southdown qui ont apporté leur qualité herbagère et la qualité de produit fini à ces races bouchères aujourd’hui très utilisées », argumente Christophe Rainon, membre de l’association et conseiller ovin à la chambre d’agriculture de la Nièvre.
Une qualité de viande incomparable
Si la Southdown a petit à petit disparu des élevages français, notamment de la zone herbagère du centre de la France où elle était pourtant bien implantée, c’est en grande partie à cause de la croissance plus lente des agneaux.
Chez David Tourte, les agneaux sont abattus à l’âge de six mois en moyenne. « Il ne faut pas chercher à les pousser, cela ne marche pas. Mais en étant patient, on obtient des agneaux finis d’une grande qualité, reconnue par les maîtres restaurateurs et les bouchers de Rungis, avec qui je travaille. »
L’éleveur ambitionne d’ailleurs de relancer une filière de viande de qualité sur son territoire, à destination des collectivités locales. David Tourte a remporté le premier prix de la section agneaux d’herbe lors de la première édition du concours d’agneaux de boucherie organisé dans le cadre de la foire aux fromages et aux vins de Coulommiers en avril dernier.
Pour les élevages extensifs

Le président de l’association des éleveurs français de Southdown est convaincu que la race a une autre carte à jouer : « En croisement terminal, les béliers Southdown vont apporter de la conformation aux agneaux. » « Vous mettez du Southdown sur des brebis moins conformées type rustique ou prolifique, ça va très bien fonctionner et cela peut même permettre d’intégrer une démarche qualité ! », renchérit Christophe Rainon.
Structuration de l’offre génétique

« Avec le retour en force de la race que nous espérons, ces outils vont s’avérer indispensables pour accélérer la diffusion et le progrès génétique », pointe David Tourte. Pour l’heure, afin d’éviter les risques de consanguinité, certains éleveurs n’hésitent pas à se tourner vers l’Angleterre. « En moyenne, on va importer cinq béliers britanniques par an, sauf ces deux dernières années, pour réinjecter du sang neuf dans notre schéma de sélection français », précise l’éleveur francilien.
Des sélectionneurs actifs et passionnés partout en France
Créée en 1935, l’Association des éleveurs français de Southdown comprend dix sélectionneurs qui détiennent environ 500 brebis en 2025 :
Cher : Flavien Bouchard, 18380 Ivoy le Pré
Gaec des Archers, Isabelle et Jean-Claude Thomas, 18170 Le Châtelet
Côte d’Or : Gaec Poillot Benoît et Romain, 21210 Thoisy-la-Berchère
Nièvre : Enzo Guérin, 58310 Bitry
Christophe Rainon, 58330 Saint-Saulge
Saône-et-Loire : Caroline Lambert Dureuil, 71320 Montmort
Seine-et-Marne : David Tourte, Ferme du Fourchet, 77710 Nanteau-sur-Lunain
Haute-Vienne : EARL avicole de Cheni, Lydie, Franck et Christophe Goupillou, 87500 Saint-Yriex-la-Perche
Hervé et Nathalie Mazé, 87460 Bujaleuf Alexandre Pagnaud, 87120 Sainte-Anne-Saint-Priest
À retenir
Mardi 7 octobre après-midi, Sommet de l’élevage, Cournon-d’Auvergne (Puy-de-Dôme)
Afin de fêter les 170 ans de l’arrivée de la race sur le sol français, l’Association des éleveurs français de Southdown organise un concours de sélection. Ils présenteront 50 animaux issus des quatre sections (antenais, bélier, antenaise, brebis) qui seront évalués par deux juges anglais, venus pour l’occasion. « À nous de montrer que la génétique française n’a rien à envier à nos amis britanniques », sourit David Tourte.