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Le travail en élevage ovin, star des rencontres du Ciirpo

Réduire la pénibilité du travail d’éleveurs ovins est un axe majeur de recherche porté par l’Institut de l’élevage. Lors des rencontres du Ciirpo, le sujet a été largement abordé.

Les rencontres techniques annuelles du Ciirpo sont un moment attendu par les protagonistes de la production ovine, d’autant plus en cette période de retrouvailles et de moments conviviaux. Les 45 participants à la journée du 1er juillet, venus de tout le quart Sud-Ouest de la France, avaient à cœur d’échanger les dernières actualités de la filière et s’informer des nouveautés et recherches en cours. La réduction de la pénibilité du travail des éleveurs ovins était au cœur des échanges et la moitié de la journée était dédiée à cette thématique.

Carole Jousseins et Vincent Bellet de l’Institut de l’élevage ont fait part des résultats du projet AmTrav’Ovin, clos fin juin. Pour autant la problématique demeure et c’est pourquoi les équipes de l’institut technique embrayent sur un nouveau projet AstravOvin qui vise à alléger le travail d’astreinte en élevage ovin lait et ovin viande dans le Massif central. Pour AmTrav’Ovin, ce sont plus de 300 éleveurs de moutons qui ont été enquêtés sur leur ressenti sur leur travail, leur organisation, etc. Parmi les aspects les plus pénibles, ils ont été 77 % à désigner en premier lieu la charge administrative. Viennent ensuite l’absence de temps libre et la pénibilité physique du travail. « L’enquête a révélé qu’il n’y avait pas de profil particulièrement à risque, souligne Carole Jousseins. Que l’on soit seul sur son exploitation ou en Gaec, qu’on ait le matériel dernier cri ou des outils un peu vieillots, chacun à ses problèmes… et ses solutions ! »

Néanmoins, l’étude a montré une prise de conscience tardive mais bien réelle de l’importance et de la nécessité pour les éleveurs de se faire accompagner dans la gestion de leur travail. Plusieurs axes de recherches pour des solutions ont donc été évoqués, soit par les éleveurs qui mettent déjà en œuvre ces outils et/ou pratiques, soit des notions plus globales qu’il est nécessaire d’adapter ensuite à chaque situation. « Il peut s’agir de matériel ou de bâtiment bien conçu, d’investissement dans de l’équipement tel que de la contention, mais aussi des relations humaines apaisées, entre associés ou avec ses salariés », détaille Vincent Bellet. Revenir à une concentration des agnelages, diminuer la période de traite en brebis laitière ou encore déléguer toute une activité à au(x) salarié(s) pour les investir dans l’exploitation et les responsabiliser sont des exemples de pratiques mises en place pour atténuer la charge de travail et se dégager du temps libre.

Six innovations en moyenne pour résoudre un problème

Un groupe d’éleveurs du Lot a par exemple fait appel à une société externe pour gérer leurs démarches et déclarations administratives. Ces éleveurs, par cet investissement consenti, se sont octroyés plus de temps pour conduire leurs exploitations tout en s’évitant les tâches fastidieuses qui sont sans cesse repoussées. La mise en place de groupements d’employeurs, pour le partage d’un salarié, ou le recours à une entreprise pour des travaux précis (tonte, parage, etc.) sont autant de clés pour fluidifier le travail de l’éleveur lui-même. Vincent Bellet poursuit : « L’innovation est une notion relative, l’idée est de mettre en place des pratiques ou des systèmes qui se distinguent. » Les éleveurs enquêtés ont en réalité cherché et instauré sur leurs exploitations en moyenne six innovations pour résoudre un problème. AmTrav’Ovin a dépassé les frontières françaises, et le projet s’est intéressé également aux éleveurs ovins espagnols et écossais. En Écosse, certains éleveurs ont recours aux brebis Easycare (facile à soigner en anglais, NDLR). « Il ne s’agit pas d’une race ovine en soi, développe Carole Jousseins, qui s’est rendue sur place pour mieux comprendre les systèmes en place. C’est plutôt la conduite et les critères recherchés par les éleveurs qui leur donnent cette dénomination. » Ainsi, l’instinct maternel, la perte naturelle de la laine ou encore la grégarité d’une brebis lui confère les qualités d’une Easycare.

Grouper la distribution de concentré sur la journée

La réduction de la pénibilité et de l’astreinte de travail en élevage peut aussi se traduire par une vision plus large à l’échelle du système d’élevage. Le Ciirpo a conduit une première phase d’essai sur la concentration de distribution de l’aliment aux brebis en bâtiment. Un lot de brebis en début et milieu de lactation a reçu 500 grammes de triticale et 500 g de tourteau de colza avec 30 g de compléments minéraux en une seule fois par jour. Le lot témoin recevait la même quantité d’aliment répartie sur deux repas. Du foin de graminées était distribué à volonté. Si l’essai doit être renouvelé pour étayer les résultats, les premières conclusions montrent que la concentration de la distribution d’aliment n’a pas d’incidence négative sur la santé et la productivité des brebis, non plus que sur la taille, le poids et la croissance des agneaux à leur naissance. « Les brebis qui ne recevaient qu’un seul repas par jour étaient d’ailleurs plus calmes en fin de journée, par rapport aux autres qui attendaient la distribution », remarque Denis Gautier, responsable de la ferme expérimentale ovine.

Le parage décrypté par un ergonome

Sophie Lavigne, Ciirpo : « Se filmer sur les chantiers récurrents ou physiques (tonte, parage, traite, etc.) permet de prendre du recul sur sa gestuelle et ses habitudes." © E. Skowron
Sophie Lavigne, Ciirpo : « Se filmer sur les chantiers récurrents ou physiques (tonte, parage, traite, etc.) permet de prendre du recul sur sa gestuelle et ses habitudes." © E. Skowron
Dans le cadre d’Amtrav Ovin, le Ciirpo a sollicité un ergonome pour évaluer les contraintes physiques et les pistes d’amélioration possibles autour de l’incontournable chantier de parage. Sophie Lavigne, technicienne ovin au Ciirpo, s’est prêtée au jeu et revient sur cette expérience : « le chantier de parage a été filmé, cela m’a permis de voir comment je travaillais, les gestes que je réalisais sans m’en rendre compte, les habitudes, mauvaises ou non que l’on développe sur ce genre de tâche très répétitive. » Sophie lavigne a pu ainsi mettre des mots sur des dysfonctionnements dans le chantier. « Nous avons un couloir dédié au parage, si bien que les brebis savent ce qui les attend quand on les y amène et les faire avancer n’est pas simple. » Autre bémol, la machine de retournement, qui demande un recours permanent à la force physique. « Il faut savoir se faire entendre auprès des revendeurs et des fabricants et pour cela, le mieux est de faire un retour groupé des éleveurs utilisateurs. » L’ergonome a permis de mettre en lumière plusieurs pistes. « Il n’y a pas de solutions miracle, mais un ensemble de mesures à prendre pour arranger la situation », conclut la technicienne.

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