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Agri sur les réseaux
[#ITV-agri] Le Berger des étoiles chemine sur Twitter sans tomber dans « le piège de la provocation »

Romain Riera est connu sur Twitter pour être le Berger des étoiles. Depuis trois ans, il parle de son métier et de son quotidien d’éleveur de chèvres et de brebis sur les réseaux sociaux. Pour mettre en avant une agriculture moderne et ne pas laisser toute la place à ceux qui occupent le terrain avec l’agribashing.

Le Berger des étoiles partage son quotidien pour faire comprendre la réalité de son métier sans « imposer des idées ».
© Romain Riera

Romain Riera est éleveur dans les Alpes de Haute-Provence, en Gaec familial, à la tête d’un troupeau de 400 brebis à viande et 90 chèvres pour la transformation fromagère. L’exploitation basée à Saint-Michel-l’Observatoire se trouve non loin du Centre d’Astronomie, connu des passionnés de planètes lointaines. C’est pour cette raison que celui qui a les pieds bien sur terre est devenu le « Berger des étoiles » sur les réseaux sociaux. Une activité qui est aujourd’hui une petite facette de son métier. A 35 ans, celui qui a vu très jeune arriver ces nouveaux modes de communication s’en sert naturellement.  Il a accepté de répondre à nos questions pour nous expliquer le sens de sa démarche.

Réussir – Pourquoi êtes-vous sur les réseaux sociaux ?

Romain Riera – « Pour partager mon métier au quotidien et en donner une image moderne. Je ne veux pas laisser le monopole à nos détracteurs. Je veux montrer qu’on est capables nous aussi d’utiliser ces moyens de communication. »

Plutôt Facebook ou Twitter et pourquoi ?

R. R. – « Twitter. Je ne suis pas sur Facebook. Je suis un tout petit peu sur Instagram et pas sur YouTube. Au départ, j’avais un compte Twitter. Ensuite, j’ai découvert que FranceAgriTwittos existait et j’ai commencé moi aussi, il y a trois ans, à poster des tweets dans le cadre professionnel. Et je me suis pris au jeu. C’est une vraie communauté. Vous pouvez aussi demander un conseil ou donner un avis. " Telle machine, t’en penses-quoi ? ", c’est le genre de questions qu’on peut poser. »

Le post dont vous êtes le plus fier ?

R. R. – « Je suis surtout fier de montrer ce que je fais, ce qui est sympa dans mon métier. Il y a plein de mauvais côtés dans les réseaux sociaux mais il y en a aussi de bons, notamment celui de partager avec d’autres. Par exemple, j’ai posté il y a un moment une vidéo où je parlais d’un livre que j’avais lu en gardant les brebis. C’était un livre écrit par Fred Hermel, un des journalistes sportifs de l’émission l’Afterfoot sur RMC, que je recommandais même à ceux qui ne sont pas fans de foot. Le journaliste m’a contacté pour me remercier et on échange assez régulièrement maintenant. »

Votre meilleure audience ?

R. R. – « C’est une petite vidéo sympa. J’ai filmé les brebis. Je ne parlais pas. Ca durait moins de 2 minutes, c’était dans une petite forêt plutôt jolie. Un berger tout seul avec ses brebis. Ca a cartonné. 30 000 vues. 1000 RT. Les brebis, ça plaît. Mais je ne suis pas dans la recherche de clics.  J’aime beaucoup faire des photos. J’essaie d’en avoir de belles, sans forcément les légender. C’est à l’humeur et en fonction des périodes et des activités. Au printemps, les brebis. En hiver, la mise bas des chèvres. Mais dans la bergerie, c’est moins beau qu’en extérieur. »

Le bad buzz que vous n’avez pas aimé ?

R. R. – « Franchement, je n’en ai pas. Mais ce que je n’aime pas, ce sont les messages des associations de protection animale, comme L214 par exemple. Ce sont des gens qui ne connaissent pas notre métier et qui en donnent une mauvaise image. Ils diffusent des vidéos chocs mais ce n’est pas la généralité chez les éleveurs. Ils sont très doués pour ça. C’est pour ça que nous devons montrer que l’on sait utiliser les mêmes moyens de communication qu’eux. »

Un post que vous regrettez ?

R. R. – « Je n’ai pas de regrets. Tout ce que je poste est réfléchi. Ce sont plutôt certaines attaques que je regrette. Par exemple, j’avais posté une photo d’agneau dans la bergerie. Je ne m’attendais pas à des réactions du style « Ne vous laissez pas avoir ! ». Quand ça commence, vous pouvez avoir 50 détracteurs en 5 minutes. Mais là, j’ai fait une vidéo pour répondre et j’ai gagné 300 followers en une journée. Et ça fait un moment que je n’ai pas été de nouveau attaqué. Globalement, il y a plus de positif que de négatif, sinon j’aurais arrêté. »

Le post qui vous as le plus amusé ?

 

R. R. – « C’est celui qui est épinglé sur mon profil. Je filmais les chevaux par la fenêtre de la maison avec mes deux fils à côté. Le plus grand m’a dit : " Ca, il faudrait que tu le mettes pour les cœurs ! ". Et il y en a maintenant plus de 850. »

 

Le post qui vous a marqué ?

 

R. R. – « Peut-être la main qui disait #NeMordsPasLaMainQuiTeNourrit. Mon état d’esprit est d’être dans le débat. Je n’aime pas imposer des idées. Je suis en bio mais je ne suis pas du tout opposé aux autres modes de production. Avec les visites à la ferme, les gens voient comment on travaille. C’est bien d’ouvrir nos portes, de leur montrer nos animaux. Sur Internet, il y a plus d’animosité. Le courant anti-agriculture est devenu à la mode. Parfois, j’ai l’impression que les gens oublient qu’on les nourrit. Ils étaient pourtant bien contents qu’on continue à travailler pendant le confinement. La main, c’était une façon de dire " respectez-nous ". »

Le post qui vous a énervé ?

 

R. R. – « Ce n’est pas un post précis mais c’est sur le sujet du loup. Les gens qui nous expliquent ce qu’il faut qu’on fasse alors qu’ils n’ont jamais mis les pieds en estive. Ils pensent que si on se fait attaquer, c’est qu’on ne garde pas nos bêtes. Mais ma mère garde les brebis depuis 20 ans ! On a eu les premières attaques en 2003 et chaque année, on en a. Maintenant on a 6 chiens Patou. On regroupe plusieurs troupeaux avec au total une dizaine de chiens. Les chiens limitent les attaques massives mais n’empêchent pas les pertes. En 2019, on a perdu 60 brebis. On est indemnisés mais pour moi, c’est comme un menuisier qui se ferait casser ses meubles. Je n’ai pas envie d’être remboursé. Alors quand tout le monde donne son avis sur tout, oui, ça m’énerve. J’ai eu une fois des échanges de tweets avec quelqu’un qui m’attaquait sur le loup. Ca avait duré toute la journée. Maintenant, souvent, je me dis : " je ne commente pas ". »

 

Votre modèle sur les réseaux sociaux, un exemple à suivre ?

 

R. R. – « Je suis pas mal Etienne agri youtubeurre, AgriSkippy… Ils ont des comptes sur YouTube. Pour ça, il faut un peu plus de matériel et faire du montage. Je n’ai pas trop le temps. Il y a aussi d’autres comptes que j’aime beaucoup : La Vaca Preciosa ou l’humour et le second degré de Bruno Cardot… »

 

Quel a été votre déclic pour vous lancer ?

 

R. R. – « J’ai vu ce que les agriculteurs faisaient sur Twitter, par exemple Vincent Luhernet et son père Dominique Luherne. Au début, on ne connaît pas trop les codes et puis on comprend petit à petit comment ça fonctionne. Aujourd’hui, même si je suis encore surpris quelquefois, je sais à peu près ce que va faire un post. »

 

Combien de temps passez-vous par jour sur les réseaux sociaux ?

 

R. R. – « J’essaie d’être présent pratiquement tous les jours. Je fais des photos et si j’en vois une sympa, je la poste. Ca ne prend pas beaucoup de temps. Quand je fais une vidéo, c’est plus long. Quelquefois, je recommence mais ce sont des vidéos courtes, de 2 minutes 20 à peu près. Ce qui prend vraiment du temps, c’est YouTube. C’est pour ça que je n’y suis pas pour le moment. »

 

Quels conseils donneriez-vous à un agriculteur qui veut se lancer sur les réseaux sociaux ?

 

R. R. – « De prendre du plaisir à le faire et de garder un certain recul pour ne que ça ne nuise pas moralement. Il ne faut pas trop s’investir émotionnellement et ne pas se tomber dans le piège de la provocation. Personnellement, si quelqu’un m’attaque, ça ne me touche pas, ça ne m’empêche pas de dormir. Il ne faut pas tomber dans le panneau de vouloir toujours répondre. Il ne faut pas hésiter à bloquer ceux qui sont juste là pour provoquer. Et quand on répond aux attaques, on peut les tourner en dérision. Une fois, j’ai répondu : " Ben dis-donc, je me suis fait un nouveau copain ! " Et ça a été fini. " Si tu te fais attaquer, réponds avec de l’humour et ils se lasseront avant toi, " c’est mon conseil. »

 

 

 

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