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Maïs : broyage, enfouissement… bien gérer les tiges après récolte

Le broyage fin des tiges de maïs et leur enfouissement apportent de multiples bénéfices sur le plan agronomique ainsi que pour juguler maladies et ravageurs. Précisions et témoignages pratiques.

Un bon mulching des tiges de maïs préserve le sol de l'érosion et améliore la dégradation des résidus de culture.
Un bon mulching des tiges de maïs préserve le sol de l'érosion et améliore la dégradation des résidus de culture.
© G. Coisel

Broyage fin et enfouissement rapide : tels sont les maîtres mots de la gestion des cannes de maïs après récolte. Y compris en zone vulnérable, il reste possible de ne pas semer de couvert végétal d’interculture à condition de respecter ces règles. Au-delà de la question réglementaire, le broyage et l’enfouissement des cannes apportent de multiples bénéfices. « En broyant les tiges, on diminue les populations de larves de pyrales et davantage encore celles de sésamies », présente Jean-Baptiste Thibord, spécialiste de la protection du maïs contre les ravageurs chez Arvalis.

L’effet mécanique du broyage réduit les sites d’hibernation que constituent les pivots de maïs. « On empêche une partie des larves de rejoindre ce pivot, explique l’expert d’Arvalis. Pour le reste, les tiges broyées sont exposées aux conditions hivernales de froid, d’humidité et aux auxiliaires comme les oiseaux qui picorent ces larves. » Les sésamies sont sensibles au froid tout comme les larves d’héliothis, autre papillon ravageur. La pyrale résiste davantage à ces conditions climatiques. Le parasitisme par les bactéries est en outre augmenté par le contact entre les larves et la terre, selon Arvalis.

Quelle est l’efficacité directe d’un broyage ? Une étude allemande sur du maïs ensilage (1) a montré qu’en moyenne environ un tiers des larves de pyrale se situaient sous le premier nœud (à 5 centimètres du sol) au moment de la récolte à Alsfeld, dans le centre du pays. 41 % se trouvaient entre le premier et le deuxième nœud (à 15 centimètres du sol). Le broyage ne permet donc pas de toucher toutes les larves directement, notamment celles à moins de 5 centimètres du sol.

Plus de 50 % d’efficacité sur sésamie avec un simple broyage

« Le broyage empêche les larves de rejoindre trop rapidement leur site d’hibernation. Il doit donc être réalisé aussi rapidement que possible après récolte », conseille Jean-Baptiste Thibord. La grande majorité des cueilleurs sont équipés d’un broyeur sous bec. « La qualité de broyage avec ces cueilleurs est satisfaisante et élimine une bonne partie des larves, constate Anthony Page, conseiller spécialisé en grandes cultures à la chambre d’agriculture du Gers. Mais ce broyage sous bec devra être complété par un broyage supplémentaire, en dépit du coût de carburant que ce passage peut générer. »

Selon une étude Arvalis réalisée dans les années 90 dans le Sud-Ouest, l’efficacité de destruction des larves de sésamie par un seul broyage immédiatement après récolte est de 50 à 70 %. Elle augmente à 75-85 % quand le broyage est suivi d’un travail superficiel et à 90-95 % en associant broyage et dessouchage.

« Un broyage supplémentaire se justifie quand il y a beaucoup de résidus, ce qui aidera à leur bonne décomposition », explique Anthony Page. Cette intervention vise en outre à limiter les risques de contamination des grains par les mycotoxines. C’est indispensable en cas de succession de maïs sur maïs et encore davantage si un blé succède au maïs et qu’il est cultivé en non-labour. Les résidus de culture sont en effet le support de conservation des fusarioses produisant des mycotoxines. Les spores de maladies foliaires du maïs telles que l’helminthosporiose et la kabatiellose se conservent également sur les résidus. Une bonne dégradation de ces derniers limitera ces risques.

Un léger mulchage avec un déchaumeur

« Le passage d’un broyeur sera plus efficace sur une végétation sèche, par exemple l’après-midi plutôt que le matin, conseille Anthony Page. Le broyage doit être uniforme avec des résidus bien répartis sur le sol. L’andainage est à éviter. » En termes d’équipements, les agriculteurs sont surtout équipés de broyeurs à axes horizontaux. « Il existe des formes de couteaux aspirant mieux la végétation qui est au sol quand les conditions sont bonnes, remarque Anthony Page. Plus coûteux et moins polyvalents, des broyeurs à axes verticaux apportent davantage d’efficacité avec un travail possible sur une plus grande largeur. Mais peu d’exploitations en sont équipées. »

Pour favoriser la décomposition des résidus de culture, un travail superficiel du sol est préconisé, dès que possible à l’automne. « Un léger mulchage avec un déchaumeur à disques indépendants est une solution, plutôt à privilégier sur des terrains légers », donne comme exemple Anthony Page. Conseillère à la chambre d’agriculture des Landes, Aline Crouigneau confirme : « un déchaumage au cover-crop permettra de détruire les refuges des larves dans les collets. Il complète bien le broyage sous cueilleur qui est insuffisant contre ces ravageurs. »

Limitation des risques de lessivage d’azote et d’érosion

Selon Arvalis, le mulching permet aussi de mobiliser une partie de l’azote minéral du sol grâce à un bon contact entre le sol et les résidus. Il limite le risque de lessivage. L’institut évalue entre 20 et 30 kg d’azote à l’hectare la réduction des fuites. Le mulching a également un effet contre l’érosion. « Lorsque les pailles sont broyées et laissées en surface, elles procurent une protection du sol comparable à celle de la végétation d’un couvert et contribuent au maintien de sa fertilité », affirme l’institut technique. Dans le cas d’un maïs grain, 8 à 10 tonnes de cannes à l’hectare peuvent être restituées aux sols et contribueront à l’augmentation de sa matière organique.

« Le broyage et l’enfouissement des résidus facilitent l’implantation de la culture suivante avec des résidus de culture moins gênants pour le fonctionnement des semoirs conventionnels ou rapides à disque et pour le positionnement des semences », souligne Arvalis. La présence importante de débris végétaux dans le lit de semences peut être en effet un obstacle à la levée d’une céréale d’automne, voire d’une culture de printemps.

(1) Source DMK.

Broyage à conserver sur des maïs peu exubérants

En cet automne 2022, les maïs sont beaucoup moins exubérants qu’à l’habitude, ce qui peut poser la question de l’intérêt d’un broyage supplémentaire après récolte du seul point de vue des résidus. Le broyage et l’enfouissement des résidus restent néanmoins obligatoires dans les zones vulnérables, et conservent leur intérêt face aux ravageurs.

Aux petits soins de la palombe à l’interculture

 

 
La moitié du Gers préserve l'alimentation de la palombe en n'enfouissant pas les résidus de maïs, dérogeant à la réglementation.
La moitié du Gers préserve l'alimentation de la palombe en n'enfouissant pas les résidus de maïs, dérogeant à la réglementation. © C. Watier
Dans le Gers comme dans d’autres départements, il n’y a pas obligation de semer un couvert d’interculture après un maïs grain, un tournesol ou un sorgho en zone vulnérable. En compensation, les agriculteurs doivent assurer un broyage fin des cannes puis enfouir les résidus dans les quinze jours suivant la récolte. Les chasseurs de la région(1) ont obtenu qu’une zone couvrant la moitié ouest et sud du Gers déroge à cette obligation puisque de telles pratiques d’enfouissement rapide peuvent mettre à mal l’alimentation d’oiseaux migrateurs, en premier lieu les palombes. Sur cette zone « palombe et avifaune migratrice », l’exploitant n’est pas obligé d’enfouir les résidus de culture de maïs grain. Les palombes sont chéries à l’interculture avant de devenir indésirables au moment des semis en consommant les semences.

 

(1) FDC du Gers, FRC Occitanie.

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