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« L’enjambeur en vignes larges apporte confort et précision au désherbage mécanique »

Le vigneron Francis Jourdan est équipé depuis 2015 d’un tracteur enjambeur en vigne large, pour désherber mécaniquement.

Vigneron en biodynamie à Cravant-les-Côteaux, en Indre-et-Loire, en appellation chinon, Francis Jourdan a été le premier, en 2015, à s’équiper d’un tracteur enjambeur en vignes larges dans sa région. À cette époque, le viticulteur recherchait une solution pour travailler le sol sous le rang, avec confort et précision. « Avec un tracteur interligne, on manque de confort pour travailler le sol, explique le vigneron. Il faut avoir l’œil devant pour rester bien centré dans l’interrang et en même temps être rivé sur l’outil de travail du sol à l’arrière. On est obligé de garder une certaine marge de sécurité si l’on ne veut pas abîmer les ceps. »

Un achat en commun pour un meilleur amortissement

Mais débourser 120 000 euros pour un tracteur enjambeur n’est pas un investissement qui se fait à la légère. C’est difficile à amortir sur une surface de 18 hectares. « C’était à l’époque quasiment le double d’un tracteur interligne », se remémore-t-il. De marque Bobard, l’enjambeur deux roues motrices 627, d’une puissance de 100 chevaux, a donc été acheté en commun avec un vigneron voisin, Fabien Demois, exploitant 24 hectares en biodynamie. Les deux vignerons y attellent toutes sortes d’outils de travail du sol, en fonction de la saison : décavaillonneuse, disques, étoiles Kress, brosse rotative, disques émotteurs. « On peut monter jusqu’à trois outils sur la même perche et les combiner à notre guise », apprécie Francis Jourdan.

Doté d’une cabine climatisée, l’enjambeur 627 reste un tracteur simple et rustique, facile à entretenir. La transmission hydrostatique apporte une conduite souple. La position reculée de la cabine, ainsi que son plancher vitré offrent un point de vue sur les perches et les outils interceps. « On a tout dans le même champ de vision, les outils et les roues avant du tracteur pour bien le centrer, décrit le vigneron. On se ménage les cervicales. »

Moins de tassements du sol

Autre atout du tracteur enjambeur : le fait de travailler les deux côtés du rang en même temps. « Je visualise tout de suite si je suis bien centré, apprécie Francis Jourdan. Cela permet d’avoir des réglages plus fins, plus précis afin d’être au plus près des ceps sans prendre le risque de les abîmer. »

Enherbant l’interrang, afin de structurer les sols et favoriser leur porosité, Francis Jourdan trouve un autre intérêt au tracteur enjambeur. « Contrairement à un tracteur interligne dont les roues passent au ras des vignes, les roues du tracteur enjambeur passent au milieu de l’interrang, rapporte le vigneron. Elles tassent moins le sol et abîment moins le système racinaire des vignes. »

Pour rentabiliser l’enjambeur qui cumule 500 à 600 heures par an, le vigneron l’équipe également d’une rogneuse, afin de réaliser plusieurs travaux en un même passage.

« Il fait le travail de trois tracteurs interlignes »

Prestataire de services, la société Viti Bio Services s’est équipée d’un tracteur enjambeur GRV Super D4.

« Le tracteur Super D4 fait le travail de trois tracteurs interlignes », explique Jean-Louis Thévenon le dirigeant de Viti Bio Services, à Châteaubernard, en Charente. L’entrepreneur l’a eu à l’essai pendant toute une saison en 2022. Essai concluant, puisqu’il s’est équipé d’un modèle neuf pour la saison 2023. « Avant, il y avait un passage d’interligne pour travailler le sol sous le rang, un second avec le cultivateur et un troisième avec un broyeur », poursuit Jean-Louis Thévenon. Aujourd’hui, le tracteur de 150 chevaux réalise les trois opérations en un seul passage. Conscient d’un besoin croissant en prestations de travail du sol – la société en réalise 1 000 à 1 200 hectares chaque année – l’entrepreneur espère en faire 550 à 600 hectares avec l’enjambeur. « La productivité de ce tracteur peut m’ouvrir les portes de grosses exploitations, en retard dans leurs chantiers », explique-t-il. Cela lui permet aussi de faire face à une pénurie de main-d’œuvre. Si gérer plusieurs travaux en même temps nécessite un minimum de vigilance, le Super D4 peut être rapidement pris en main. « Mes salariés ne rechignent pas à en prendre le volant, rapporte l’entrepreneur. Au contraire. En dix jours, on le maîtrise complètement. Ça se conduit comme un vélo. »

Les enjambeurs attisent la curiosité dans les vignes larges

« Il y a deux types de tracteurs enjambeurs pour les vignes larges : les monorangs et les double rangs », débute René Grosjean de la société GRV. Circulant dans les vignes de 1,30 à 2 mètres, les premiers, notamment les modèles dotés de cabine reculée voire dans l’interrang, procurent un confort de conduite et une précision dans le positionnement des outils, en travaillant les deux côtés du rang en même temps. « Comme les roues sont positionnées au milieu de l’interrang, ils peuvent intervenir de façon plus précoce, les roues prenant appui sur le sol stabilisé et non sur le sol meuble près des rangs, comme les tracteurs interlignes », argumente Julien Vallade, de la société Bobard. « Ils sont achetés pour le confort et la précision, mais peuvent être synonymes de productivité à la pulvérisation puisqu’ils peuvent avoir jusqu’à cinq descentes », ajoute Jérôme Mestrude, de Tecnoma.

Productivité et stabilité

De son côté, René Grosjean croit davantage en l’essor des enjambeurs doubles rangs pour les vignes de 2 à 3 mètres d’interrang, à l’image du Super D4 et de ses deux roues centrales avant et deux roues arrière montées sur voie variable. « Avec ses sept porte-outils, c’est un outil de productivité, estime-t-il. Il assure l’intercep sur deux rangs, le travail du sol sur les deux interrangs extérieurs et la tonte sur l’interrang central. » Son prix débutant à 230 000 euros équivaut à celui de deux tracteurs interlignes premium, mais fait l’économie d’un chauffeur. De plus, dans les parcelles en dévers sa voie large le rend plus stable et plus confortable qu’un tracteur interligne.

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