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Produits laitiers : le Cniel demande à faire évoluer le Nutri-Score

Une meilleure prise en compte du calcium pour les fromages. Et une exemption pour les IG laitières, qui pourraient être menacés par de futures réglementations visant les produits notés D et E. Telles sont les demandes du Cniel et du Cnaol.

A, B, C, D ou E. Le Nutri-Score n'est pas obligatoire mais il gagne de plus en plus d'emballages, sous la pression de la grande distribution et des consommateurs friands d'applications comme Yuka(1) pour se faire assister lors de leurs achats. Depuis 2019, l’UFC-Que Choisir et d'autres associations européennes militent pour rendre obligatoire le Nutri-Score en Europe.

L'objectif du Nutri-Score est louable. Avec ses cinq notes de couleur, il doit aider le consommateur à repérer un produit nutritionnellement meilleur pour sa santé qu'un autre équivalent, au sein d’un même groupe d’aliments ou entre groupes d’aliments similaires pris au cours d’une même occasion de consommation. Cet étiquetage nutritionnel a été conçu par Santé publique France d'après les travaux du professeur Serge Hercberg et l'expertise de l'Anses et du Haut conseil de santé publique. Il vient en complément des recommandations alimentaires, le fameux PNNS (plan national nutrition santé), établi par les mêmes protagonistes.

Une incitation à améliorer les recettes

Pour les produits laitiers, « le Nutri-Score présente un intérêt pour le consommateur au rayon ultrafrais, où il existe de nombreuses recettes différentes, plus ou moins grasses et sucrées, avec des fruits ou pas, plus ou moins riches en fibres... », pointe Caroline Le Poultier, directrice du Cniel. Le logo permet au consommateur de choisir rapidement une recette mieux notée. On l'aura compris, le Nutri-Score prend tout son sens pour comparer, dans un même rayon, des produits transformés qui peuvent avoir des notes assez différentes. Il a peu d'intérêt pour des produits relativement bruts, qui, quelle que soit la marque, présentent à peu près la même recette et donc la même note.

L'autre objectif du Nutri-Score est d'inciter les transformateurs à revoir leurs recettes pour améliorer le score nutritionnel de leurs spécialités. Cet effet vertueux est réel, au rayon lait de consommation et ultrafrais. Ainsi, Candia a été fière d'annoncer l'an dernier que Candy'up obtient une note B grâce à la réduction de sa teneur en sucre.

Danger pour les produits notés D et E

Ce qui inquiète l'interprofession laitière et le Cnaol (Conseil national des appellations d'origine laitières), c'est la montée de la pression politique, avec des propositions comme une taxe sur les produits notés D et E, ou une interdiction de faire la promotion de produits D et E. « Si tel devait être le cas, le Cnaol demande que le beurre, la crème et les fromages sous IG (indication géographique protégée) ne soient pas concernés. » Cette demande est motivée par le fait que ces produits sont des produits de base de l'alimentation, des produits relativement bruts. « On ne peut pas traiter de la même façon des sodas et du beurre et de la crème », souligne Caroline Le Poultier. Il y a un risque de confusion pour le consommateur. Par ailleurs, les fromages font partie des produits laitiers riches en calcium(2) dont le PNNS recommande une consommation minimum : deux produits laitiers par jour pour les adultes, trois à quatre pour les enfants, adolescents et personnes âgées.

Fromages : un algorithme incomplet

L'interprofession demande également que l'algorithme concernant les fromages soit plus complet et donc plus juste. Le calcul actuel tient compte de la valeur énergétique globale, du taux de matière grasse dont la teneur en acides gras saturés, de la teneur en sel, en protéines et en sucres simples. Le Cniel demande notamment que le calcul tienne davantage compte de la teneur en calcium. « Le calcul a déjà évolué un peu, via la teneur en protéines qui est très bien corrélée à la teneur en calcium. Mais il ne valorise que les fromages avec des valeurs de protéines allant jusqu'à 8 g pour 100 g, alors que la valeur médiane en protéines des fromages est d'environ 20 %. »

Heureusement, le Cniel et le Cnaol ne sont pas seuls pour défendre les atouts des fromages, beurre et crème. Des élus, des organismes d'autres pays... demandent aussi des adaptations.

(1) L'algorithme de Yuka tient compte du Nutri-Score à 60 %, des additifs à 30 %, bio ou pas à 10 %.
(2) Ne sont concernés que les laits, yaourts, fromages blanc, fromages.

Les AOP et IGP craignent le Nutri-Score

Toutes les indications géographiques protégées (IG) laitières sont notées D (93 %), voire E (6 %), sauf le brocciu, noté C. Déjà aujourd'hui, « des grandes surfaces commencent à étiqueter des fromages à leurs marques de distributeur (MDD) avec le Nutri-Score. Cela peut laisser penser au consommateur que nos fromages ne sont pas sains. Il pourrait être tenté de préférer un produit retravaillé plutôt qu'une IG », s'inquiète Hubert Dubien, président de l'ODG fourme de Montbrison. Cela peut donc mettre en difficuté ses produits qui ont des atouts santé : produits relativement bruts, richesse en microorganismes, pas d'additif ni de nanomatériaux. Et mettre en difficulté des filières qui répondent à d'autres attentes sociétales : biodiversité, dynamique des territoires...

Le Cniel et le Cnaol défendent une approche plus globale de la nutrition : « La note Nutri-Score est donnée pour 100 grammes. Mais certains produits se consomment à plus petites doses. Nous préférons parler de portions, et d'équilibre nutritionnel global sur plusieurs repas », commente Sébastien Breton, du Cnaol.

Pour défendre tous les atouts des produits AOP et IGP, les filières ont intérêt à intensifier leur communication et sensibilisation.

Le Cnaol pointe une rupture d'égalité entre les IG et les autres produits. Les IG reposent sur des cahiers des charges qui ancrent la tradition par decret. « On ne change pas une recette comme ça, voire on ne peut pas. Il y a donc rupture d'égalité entre des spécialités industrielles qui peuvent « améliorer » leur recette, et des fromages sous IG. »

Le saviez-vous ?

Plus de 80 % des fromages sont notés D. Quelques-uns sont en E. Des spécialités type cancoillotte peuvent être notées C. « Les transformateurs peuvent un peu jouer sur la teneur en sel et matière grasse pour passer en C, mais pas toujours, car cela impacte la qualité du produit, et le decret fromage réduit les possibilités de modification des recettes », explique le Cniel.

Sept pays évaluent des évolutions possibles

Belgique, France, Allemagne, Luxembourg, Pays-Bas, Espagne et Suisse ont mis en place une coordination transnationale pour faciliter l'utilisation du Nutri-Score. Un comité scientifique évaluera les évolutions possibles du Nutri-Score pour une meilleure efficacité sur la santé des consommateurs, en synergie avec les recommandations alimentaires. « Nous savons que l'Espagne porte la même demande que nous pour une révision du calcul du score des fromages », indique le Cniel.

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