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« La biodiversité est utile à notre élevage laitier »

Au Gaec 2000, dans le Calvados, la biodiversité fait partie de la stratégie pour produire du lait bio. Sa préservation a démarré avant la conversion du Gaec en 2017.

Gilles Haelewyn
Gilles Haelewyn, un des deux associés du Gaec 2000 : « La biodiversité sur la ferme, c'est notre contribution positive au territoire. Et elle nous aide aussi à produire. »
© C. Pruilh

« La première fois que j'ai été interpellé sur la biodiversité, c'était il y a plus de vingt ans ans par le Conservatoire du littoral », se rappelle Gilles Haelewyn, un des deux associés du Gaec 2000, à Commes dans le Calvados. Le Gaec exploite 20 hectares de prairies en convention pour le Conservatoire du littoral avec un cahier des charges qui stipule que la prairie permanente ne peut pas être fauchée avant le 1er juillet, et interdiction d'utiliser des produits phytosanitaires et d'épandre des effluents d'élevage.

La fauche tardive a trouvé sa place

« Au départ, la fauche tardive peut être perçue comme une contrainte », pointe l'éleveur. Puis, il constate un intérêt certain pour la biodiversité, avec une richesse d'insectes et d'oiseaux. « La fauche tardive permet les montées à graine des espèces plus tardives. On trouve une plus grande diversité de graminées, légumineuses et autres plantes. Cela a un intérêt pour augmenter la résilience des prairies face aux aléas climatiques. Et aussi pour la santé animale, avec les plantes riches en tanins : chicorée, plantain... qui sont des vermifuges naturels pour les animaux », développe Gilles Haelewyn.

Aujourd'hui, l'éleveur ne reviendrait pas en arrière. « Je fais déprimer ces parcelles par les génisses, et les laisse pâturer jusqu'en mai. Ce déprimage a amélioré la qualité de l'herbe. Grâce à ces surfaces supplémentaires, je peux faire tourner plus vite les génisses sur les prairies. Elles rasent donc moins l'herbe, et sont donc moins contaminées par les parasites. Cela fait trois ans qu'on ne vermifuge plus. »

Une diversité d'espèces cultivées

Le Gaec 2000 entame sa conversion en bio en 2017. Les éleveurs ne veulent plus utiliser de phyto et veulent se sentir en phase avec les attentes sociétales. Un diagnostic biodiversité Biotex est réalisé par la chambre d'agriculture en 2020. Ce diagnostic repose sur des indicateurs indirects : diversité de l'assolement, diversité des espèces et variétés cultivées, présence de prairies, conduite des cultures et des prairies, richesse en matière organique du sol, travail simplifié du sol... et présence et entretien d'infrastructures agroécologiques (IAE) : haies, bois, bosquets, mares, murets, ripisylves. « Nos points forts sont les prairies, la diversité de l'assolement, les haies. Les points faibles sont le bilan humique négatif, une parcelle de 16 hectares d'un seul tenant, et la conduite « intensive » des prairies en pâturage tournant dynamique avec alternance pâture-fauche », résume Gilles.

Le Gaec 2000 est bien placé sur le critère diversité des espèces cultivées : maïs fourrage et grain, blé d'hiver et de printemps, orge de printemps, luzerne, méteils, prairies permanentes et prairies semées en multiespèces et vouées à devenir permanentes. Ces dernières sont composées de ray-grass anglais, fétuque des prés, fléole, trèfle blanc, trèfle violet, pâturin, chicorée et plantain. La diversité dans la prairie lui confère plus de résilience. Les associations de cultures comme les méteils sont favorables à la biodiversité. La luzerne du Gaec est certes semée en pure, mais les repousses (trèfle, graminées, colza) la complexifient.

Améliorer le bilan humique du sol

Le diagnostic Biotex a révélé un bon niveau de matière organique, à 4 %, mais un bilan humique négatif, lié aux exportations d'éléments nutritifs par les récoltes et la récupération de la paille. Des mesures ont déjà été mises en place : réduction du travail du sol, enfouissement de couverts hivernaux (avoine, trèfles, féverole) et achat de fientes de volaille. Mais cela semble encore insuffisant. « Nous ne parvenons pas à faire du travail superficiel du sol partout, car nous avons des terrains à plus de 35 % d'argile. »

Les apports de matière organiques sont amenés à augmenter avec un troupeau qui passera de 65 à 85 vaches laitières. L'extension de la stabulation, avec une aire paillée, va augmenter la quantité de fumier produite ; un apport intéressant pour la richesse du sol. Les arbres plantés en agroforesterie contribueront aussi à l'amélioration de la vie du sol. « Et demain peut-être, la litière des animaux sera en copeaux de bois, ce qui nous permettra de restituer la paille au sol », conclut Gilles. 

Des haies pour des prédateurs

L'inconvénient d'un travail du sol plus superficiel est qu'il crée un milieu favorable aux rongeurs. Mais tout est affaire d'équilibre, et finalement, il n'a pas plus de dégâts. « Sur une parcelle de luzerne que je trouvais ravagée par les campagnols, nous avons réalisé quatre coupes, et à chaque fois, des oiseaux (buses, hérons, mouettes et corbeaux) et quelques renards ont permis de réguler facilement la population de rongeurs. Depuis, la luzerne est bien repartie », raconte l'éleveur. C'est que le Gaec 2000 dispose d'une bonne quantité de haies qui offrent le gîte aux prédateurs.

Chiffres clés

Sur les 214 ha du Gaec

65 vaches laitières à 7 600 l, en traite robotisée
6 cultures différentes et des méteils
77 ha de prairies permanentes
23 km linéaires de haies
0,9 - 1 UGB/ha SFP de chargement
20 ha en fauche tardive

Un projet agroforestier accompagné par Danone

Dans le cadre du programme Les deux pieds sur terre de Danone(1), le Gaec 2000 a communiqué sur son projet agroforestier sur Miimosa, plateforme de financement participatif, et a obtenu 3 000 €. Le fonds Danone abonde en plus 17 000 € pour les plantations, soit la moitié du coût du projet.

1 300 arbres sont plantés sur 35 ha pour cinq types d'agroforesterie : 280 arbres fruitiers dans des prairies et terres cultivées ; 400 arbres de bois d'œuvre dans des cultures ; 300 saules valorisés en bois déchiqueté par la ferme, 550 m de haies et 60 grands arbres isolés dans les prairies des vaches laitières. Tous les alignements d'arbres sont orientés nord-sud, pour un ensoleillement maximal des cultures. Ces arbres font perdre environ 5 % de surface cultivable au Gaec. « L'arbre a de nombreux intérêts : abri aux animaux, apport de matière organique au sol, valorisation de ses fruits, de son bois... Et c'est un réservoir de biodiversité qui sert aussi l'agriculture quand il héberge des prédateurs de campagnols », énumère Gilles Haelewyn.

 © C. Pruilh
© C. Pruilh
Les 400 arbres de bois d'œuvre ont été plantés dans 12 ha de luzerne. « Les espacements sont larges : 10 m entre deux arbres et 26,50 m entre deux rangées, pour pouvoir travailler sur 24 m entre deux rangées d'arbres. Après la luzerne, il y aura des cultures. »

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 © C. Pruilh
© C. Pruilh
Une haie de 550 m sépare en deux une pâture de 15 ha. « Elle permettra une meilleure circulation de la faune sur la ferme et le territoire. Et apportera de l'ombre et un effet brise-vent. »

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 © C. Pruilh
© C. Pruilh
Ces alignements de grands arbres isolés délimitent des paddocks de 80 ares en moyenne.

 

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