Prêt familial en agriculture : quel formalisme respecter pour éviter les litiges ?
Les prêts familiaux peuvent apporter un complément pour financer une installation agricole. La transparence s’impose pour préserver la paix familiale et éviter un redressement fiscal.
Les prêts familiaux peuvent apporter un complément pour financer une installation agricole. La transparence s’impose pour préserver la paix familiale et éviter un redressement fiscal.

Un prêt familial, notamment de parent à enfant, est une pratique courante et qui peut être utile au financement de l’installation d’un jeune. Il est plus facile à négocier qu’auprès d’une banque, souvent à un taux plus avantageux, et surtout il n’en est pas tenu compte dans le taux d’endettement bancaire.
Dès qu’il dépasse 1 500 euros, le contrat de prêt ou « reconnaissance de dette » doit faire l’objet d’un document écrit. « Un document écrit très clair limite le risque de conflits futurs, notamment s’il y a des frères et sœurs. Il évite aussi que l’administration fiscale vienne requalifier le prêt en donation », avertit Lydie Cousin, du cabinet BSF, en Gironde.
Faire un prêt familial avec l'aide d'un notaire pour éviter les litiges
Les deux parties définissent entre elles les conditions du prêt et les modalités de remboursement. Le contrat peut se faire sous seing privé, sans recours à un notaire. L’administration fiscale met à disposition un formulaire prêt à remplir, que l’on peut compléter par une annexe expliquant les raisons du prêt, le taux d’intérêt… En y faisant référence par exemple dans la case « Observations » du formulaire.
Le contrat peut aussi se faire chez un notaire, pour un coût qui dépasse rarement 1 000 euros. « Le contrat constitue alors un acte authentique, c’est-à-dire un titre exécutoire », explique Lydie Cousin. En cas de litige, le prêteur peut se rapprocher d’un commissaire de justice pour procéder à des saisies sans avoir à demander une autorisation judiciaire préalable. Alors que si le contrat est fait sous seing privé, il faut saisir la justice et la procédure est plus longue. « Passer par un notaire est plus sécurisant et donne plus de latitude pour expliquer les conditions du prêt, les garanties et modalités de remboursement, ou préciser par exemple s’il est immédiatement remboursable en cas de décès ou si la créance est transmise aux héritiers », ajoute le cabinet Crozat & Associée, dans l’Aisne.
Accorder un prêt familial avec ou sans intérêts
Le contrat doit comporter les identités des deux parties, le montant du prêt, le taux d’intérêt, les modalités de remboursement, les garanties éventuelles. « S’il n’y a pas d’intérêts ni de garanties, il faut l’écrire, pour que l’on sache que le sujet a été évoqué », précise Lydie Cousin. L’idée étant d’aider un jeune, le taux d’intérêt est en général moindre que les taux bancaires, voire nul. Toutefois, pour éviter des litiges avec les héritiers, il peut être utile d’avoir un taux d’intérêt calé sur les taux bancaires, de 3,5 à 4 %. « Rien n’empêche que le prêt soit ultérieurement converti en donation dans le cadre d’une transmission de patrimoine par le prêteur au profit de tous ses enfants, analyse le cabinet Crozat & Associée. L’emprunteur verra alors sa dette annulée et les autres enfants recevront l’équivalent en argent, biens mobiliers ou immobiliers. »
Une reconnaissance de dette doit comporter la signature de l’emprunteur et la mention manuscrite de la somme due, en lettres et en chiffres. Si le contrat est fait sous seing privé, il est conseillé de l’enregistrer auprès du service des impôts (coût 125 €), ce qui donne une « date certaine » au contrat et prouve à l’administration fiscale qu’il s’agit d’un vrai prêt.
Déclarer le prêt familial à l'administration fiscale
Si le prêt dépasse 5 000 euros, il doit être déclaré aux impôts par l’une ou l’autre des parties, l’année suivante, en même temps que la déclaration de revenus, via le formulaire Cerfa n°2062, en indiquant le taux d’intérêt. Et s’il y a des intérêts, ceux-ci doivent être déclarés par le prêteur dans sa déclaration annuelle de revenus, dans la catégorie des « revenus de capitaux mobiliers ». Toute non-déclaration est passible d’une amende de 150 euros. « De plus, s’il n’est pas déclaré, un prêt peut être requalifié en « donation déguisée » par l’administration fiscale, donnant lieu alors à des droits de donation, assortis d’intérêts de retard, voire de pénalités majorées », avertit Lydie Cousin. Si le contrat est rédigé par un notaire, c’est lui qui se charge de déclarer le prêt aux impôts.
Un nouveau dispositif pour financer un logement
La loi de finances 2025 instaure la possibilité de donner 100 000 €, sans droit à payer, à un descendant (enfant, petit-enfant et arrière-petit-enfant), pour financer l’achat d’un logement neuf ou des travaux de rénovation énergétique de la résidence principale éligibles à l’aide MaPrimeRénov’ (isolation, pompe à chaleur…) Les travaux sont à réaliser entre le 15 février 2025 et le 31 décembre 2026. L’argent donné doit être utilisé dans le sixième mois suivant le versement. Chaque donateur peut donner jusqu’à 100 000 € à un même bénéficiaire qui, lui, peut recevoir, de plusieurs donateurs, un maximum de 300 000 €. La donation peut être plus élevée si la famille bénéficie encore des autres abattements et exonérations habituels qui se reconstituent tous les 15 ans.
Ne pas négliger les dons manuels
Une autre possibilité pour aider un jeune est le don manuel, qui peut se faire avec ou sans l’intervention d’un notaire. De parent à enfant, une donation jusqu’à 100 000 € par parent est possible sans droit de donation tous les 15 ans. Si la donation se fait de grand-parent à enfant, elle peut atteindre 31 865 € sans droit de donation tous les 15 ans. Si la donation se fait en ligne collatérale (d’oncle/tante à neveu/nièce…), elle peut atteindre 7 967 € tous les 15 ans sans droit de donation. En plus de ces abattements, un don familial d’argent jusqu’à 31 865 € peut être exonéré de droits tous les 15 ans, si le donateur a moins de 80 ans et le donataire plus de 18 ans, indépendamment du lien de parenté. Un don manuel doit être déclaré dans le mois qui suit via l’imprimé fiscal Cerfa n° 2735 ou en ligne sur le site du service public. Comme pour un prêt, un don peut ensuite être réintégré à la succession dans le cadre d’une donation-partage.