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La restructuration et la diversification en bio : une solution prometteuse à développer pour les éleveurs ?

La Fédération Nationale d’Agriculture Biologique (FNAB), la Fondation pour la Nature et l’Homme (FNH) et Terre de Liens viennent de publier les conclusions d’une étude, intitulée « Un horizon pour les fermes d’élevage : restructurer-diversifier ». Les trois organismes estiment que cette solution pourrait aider à renouveler les générations et accélérer la transition agroécologique.

étude
Près d'un tiers des élevages ont disparu en dix ans et le nombre d’installés ne compense que deux tiers des départs.
© Sophie Chatenet

Alors que 30 % des élevages ont disparu en dix ans et que le nombre d’installés ne compense que deux tiers des départs, dans une étude initiées par la Fnab, FNH et Terres de Liens 12 fermes ont été analysées pour mesurer les modalités et les conséquences de la restructuration-diversification. Pour ce faire, des entretiens ont été réalisés avec les personnes travaillant dans ces 12 fermes restructurées réparties dans plusieurs régions et appartenant avant la restructuration à l’une de ces filières d’élevage : bovins, porcins, avicoles ou ovins/caprins. Des entretiens ont aussi été menés avec des techniciens de chambres d’agriculture, de coopératives agricoles, de groupements de productions et d’organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR). Les données de précédents travaux ayant déjà été réalisés sur le sujet ont également été analysées.


Restructurer et diversifier les fermes : quels points positifs ?

Au terme de ce travail, les auteurs de l’étude sont arrivés à plusieurs conclusions. Selon eux, restructurer et diversifier les fermes permet de :

Créer des emplois : dans cet échantillon, on constate 3,4 fois plus de nombre d’ETP après la restructuration des fermes.

● Offrir des conditions de vie et de travail améliorées : la dimension collective présente dans beaucoup de fermes restructurées permet le développement de l’entraide dans le travail et le remplacement ou la rotation pour les astreintes inhérentes à l’élevage. Cela permet aux éleveurs d’avoir des week-ends libres et de prendre plus facilement des congés. Les personnes enquêtées dans l’échantillon évaluent leur épanouissement à 7/10 en moyenne.

● Favoriser l’installation de porteurs de projet, notamment non-issus du milieu agricole (NIMA), qui constituent une bonne partie des candidats à l’installation.

● Accélérer la transition agroécologique : l’ensemble des fermes restructurées de cet échantillon est en agriculture biologique et dans 10 des 12 fermes, il s’agit d’une conversion post-restructuration. Ces fermes sont plus autonomes pour l’alimentation des animaux.

● Contribuer au dynamisme des territoires : elles participent toutes à des circuits courts et de proximité (AMAP, restauration collective, marchés locaux), organisent parfois des évènements dans leur ferme et contribuent à augmenter la population de certains villages ruraux.

● Contribuer à la souveraineté alimentaire des territoires grâce à l’adoption de productions plus diversifiées et parfois déficitaires.

 

Ille-et-Vilaine : une ferme porcine démantelée et transformée au profit de nouvelles installations

Dans l’étude, différents cas sont présentés dont celui de Philippe Colleu qui, sans perspective de transmission, réduit progressivement son activité à partir de 2009, puis abandonne son activité de porc naisseur engraisseur. Parmi les 80 hectares qu’il exploitait, il a arrêté de louer les 50 ha en location et a transmis les 30 ha dont il était propriétaire. Il a transmis 4 hectares à 2 maraîchers en agriculture biologique (2 ha chacun).

Puis, il a converti les 26 ha restants en agriculture biologique pour faire de la production céréalière et les a transmises progressivement à Guillaume Aveline, repreneur d’une ferme familiale en bovins lait voisine, qui souhaitait conforter ses surfaces et renforcer l’autonomie fourragère de son troupeau.

Si je ne transmettais pas en bio, ma ferme partait à l'agrandissement des voisins

« Si je ne transmettais pas en bio, ma ferme partait à l’agrandissement des voisins. La vendre aux voisins, c’était la solution la plus simple et il y avait pléthore de candidats. J’aurais pu la vendre à un très bon prix, mais j’ai une situation confortable et ma volonté était d’installer un jeune avant tout » témoigne Philippe Coleu.

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Plusieurs freins identifiés à la restructuration en bio

Interrogés sur leur expérience de restructuration-diversification, les porteurs de projet ont pointé 3 freins principaux :

● Les investissements humains et financiers, notamment ceux associés à la reconception des bâtiments.

● La spécialisation des territoires dans certains types de productions, ayant pour conséquence une concentration géographique des outils d'abattage, de transformation et de distribution dans certains territoires et l’absence d'infrastructures dans d'autres.

● La fragilité des processus de transmission-reprise, qui peut être accrue en cas de changement complet de système et les difficultés liées à l’émergence et à la pérennisation des collectifs dans les fermes et associations d’agriculteurs.

Demande d'un réseau de 50 fermes pilotes

Les trois organisations formulent des recommandations de politiques publiques visant à accélérer et multiplier les restructurations-diversifications :

1. Lancer un réseau d’expérimentations de projets de restructuration-diversification avec un objectif d’au minimum une cinquantaine de fermes pilotes d’ici à la fin de la période 2024-2028.

2. Ajouter des scénarios de restructuration dans le diagnostic transmission, en cours d’élaboration dans le cadre du PLOAA, pour faciliter la transmissibilité des fermes et améliorer leur résilience.

3. Conditionner les aides à l’investissement à des critères de durabilité et en flécher une partie vers la restructuration-diversification des exploitations.

4. Déployer massivement les dispositifs de stockage foncier temporaire non lucratifs et dirigés vers la transition et y intégrer des dispositifs facilitant les restructurations.

5. Soutenir la consolidation des filières longues biologiques et le développement de filières territorialisées, afin de garantir des débouchés aux fermes qui se diversifient.

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