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Ils engraissent les chevreaux à la ferme

En Dordogne, en Deux-Sèvres, dans les Hautes-Alpes ou dans les Bouches-du-Rhône, des éleveurs engraissent eux-mêmes leurs chevreaux avec plus ou moins de succès. Témoignages d’éleveurs.

L'engraissement des chevreaux à la ferme représente encore beaucoup de travail supplémentaire pour une valorisation trop faible. © D. Hardy
L'engraissement des chevreaux à la ferme représente encore beaucoup de travail supplémentaire pour une valorisation trop faible.
© D. Hardy

À Boisse, en Dordogne, Jean Barou engraisse ces chevreaux depuis toujours. « J’ai la chance d’avoir un bâtiment que mes parents ont construit dans les années soixante-dix suffisamment grand où il y avait la place pour l’engraissement des chevreaux. Il est fonctionnel et bien équipé. Aujourd’hui il est parfaitement amorti. C’est beaucoup de travail après les mises bas. Il faut apprendre aux petits à téter. Rapidement la charge diminue quand les petits gagnent en autonomie, témoigne l’éleveur qui est aussi viticulteur à côté. Il suffit de nettoyer les louves, de remettre de la poudre dans les louves et de pailler. Le travail prend 30 minutes par jour quand tout s’organise bien. »

Une période intense pendant 10 à 15 jours pour apprendre la tétine

D’ordinaire, sur les 300 chevreaux qui naissent en septembre, il en engraisse 200 et en garde 100 pour le renouvellement de son cheptel. L’engraissement des chevreaux dure deux mois, les trois premières semaines, l’éleveur leur donne le lait de traite, riche en colostrum, puis du lait en poudre et ils ont accès à du Kefidiet pour éviter les problèmes de digestion. Ils partent lorsqu’ils ont atteint 10 kg et sont valorisés aux alentours de 2,70 à 3 €/kg suivant les années,

« Attention, préviens l’éleveur, les chevreaux sont très sensibles il faut être vigilant pour le suivi maladies. » Pour cela, il ne change pas de case les animaux mais l’agrandit au fur et à mesure que les animaux naissent, avec des lots de maximum 50 chevreaux. Pour ce qui est de la distribution du colostrum, Jean Barou commence toujours par les chevreaux les plus jeunes et avance vers les animaux les plus âgés. « Cela permet d’épargner les animaux les plus petits des microbes des plus grands ».

Beaucoup de contraintes pour peu de revenus

« Je comprends tout à fait qu’au vu de la crise du chevreau l’an passé, certains éleveurs souhaitent engraisser leurs animaux à la ferme. Ils doivent avoir à l’esprit que c’est beaucoup de travail et de contraintes pour peu de revenus en échange », averti Caroline Comte. Historiquement, l’éleveuse engraissait ces chevreaux pour les vendre sur le marché aux bestiaux de Lezay. Aujourd’hui, c’est l’abatteur qui vient les collecter à la ferme.

Elle élève 200 chèvres et 120 charollaises à Bougon, dans les Deux-Sèvres. Chaque année, il y a 350 naissances en septembre. Les chevrettes sont gardées pour le renouvellement du troupeau ou vendues en tant que reproducteurs. Les 70 chevreaux restants sont engraissés à la ferme, dans le bâtiment des vaches allaitantes qui sont au pré cette partie de l’année. Elle garde les petits six semaines, jusqu’à ce qu’ils atteignent un poids vif de 9 kg. « Au prix de la poudre de lait, je ne vois pas l’intérêt de les pousser beaucoup plus », témoigne l’éleveuse soucieuse de l’équilibre financier de son exploitation. L’année passée, elle s’est organisée différemment. Les chevreaux ont été valorisés en vente directe. Là aussi, Caroline n’est pas certaine de la pérennité de ce débouché. « Quand je fais les comptes, en retirant le temps passé pour les emmener à l’abattoir, les ventes et la communication, je ne suis pas sûre d’être gagnante, ou j’y gagne le sourire de mes clients qui étaient ravis d’avoir du chevreau… »

Être moins dépendant de l’engraisseur

« Jusqu’en 1986, il existait une coopérative spécialisée dans l’engraissement des chevreaux dans le département », témoigne Claire Andrès éleveuse de 50 chèvres dans les Hautes-Alpes. Aujourd’hui, elle réfléchit à la construction d’un bâtiment pour engraisser ses chevreaux. Elle ne souhaite pas entrer en concurrence avec les engraisseurs, mais travailler intelligemment avec une clientèle locale en valorisant et transformant sa production en pâtés. Elle veut aussi se sentir moins dépendante de l’engraisseur qui lui prend ses animaux. C’est un bon ami qui fait bien son travail malgré les difficultés de la filière. Il lui semble important de faire connaître le chevreau auprès d’une clientèle locale pour réhabituer les gens à sa consommation.

Laisser les chevreaux sous la mère les deux premières semaines

François Borel est éleveur dans les Bouches du Rhône. Il possède 90 chèvres Roves qu’il élève en bio dans un système extensif et dont il transforme le lait en fromage. « Grâce à l’AOP Brousse du Rove, la valorisation du lait de mes chèvres est très intéressante, aux alentours de 8 €/l. Élever des chevreaux à ce prix-là est un joli pari. Mais je pense y être gagnant. » L’éleveur laisse les chevreaux sous les mères les deux premières semaines. La mamelle est stimulée par la succion du petit et permet un démarrage de lactation avec 25 % de lait en plus. Puis, il sépare les petits des mères la nuit et trait ces chèvres une fois par jour pendant quinze jours tandis que les petits ont accès à du foin en plus du lait de leurs mères. Les premiers chevreaux partent pour être valorisés en blanquette par une restauratrice. Deux autres départs sont prévus à trois mois et demi et quatre mois et demi. Cette fois, les chevreaux sont destinés à être vendus sous vide, en vente directe, grâce à un abattoir mobile en projet.

Coté Web

Valcabri étudie l’engraissement en ferme

Le projet ValCabri veut améliorer la valorisation de l’engraissement à la ferme en testant le croisement avec des races de type viande, en adaptant l’alimentation des mères avant et après les mises bas et en comparant les durées d’engraissement. Les travaux se poursuivent jusqu’au moins juin 2022 et les résultats des études sont progressivement mis en ligne sur valcabri.idele.fr.

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