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Petit profit avec le blé haut de gamme CRC

Le blé comportant la certification CRC apporte un surplus de rémunération aux producteurs qui ont souscrit à ce type de contrat. Exemple sur des blés améliorants de Beauce livrés à la coopérative de Boisseaux.

Cette parcelle de blé Galibier CRC se doit d'être à plus de 250 mètres des axes routiers.
© C. Gloria

La culture du blé CRC impose quelques contraintes. À Oinville-Saint-Liphard dans la Beauce de l’Eure-et-Loir, Pascal Vauzelle consacre une part de ses 140 hectares à ce mode de Cultures raisonnées contrôlées(1). Exemple : une parcelle de 10 hectares a été semée avec le blé de force Galibier. En ce milieu du mois de juin, les épis sont beaux, sains et les grains sont en cours de remplissage. La tenue de tige est bonne sur ce blé sensible à la verse. Il est vrai qu’il a reçu deux applications d’un régulateur de croissance. Produit utilisé : Moddus et non un raccourcisseur de type Cycocel comme il s’en utilise plus largement sur céréales. Ce peut être vu comme un détail mais le chlorméquat chlorure, matière active du Cycocel, fait partie de la liste de molécules interdites dans le cahier des charges CRC, tout comme le glyphosate. « Mais je ne considère pas la culture de blé CRC comme véritablement contraignante, juge Pascal Vauzelle. Pour cette parcelle, j’ai pris soin que les blés soient à plus de 250 mètres de la route nationale (NDLR : une autre exigence du cahier des charges). Pour le reste, l’itinéraire cultural est assez classique : un semis mi-novembre après un labour pour réduire le risque de fusariose sur épis à cause du précédent cultural qui était un maïs, un désherbage à l’automne, quatre apports d’azote avec mesure de reliquats de sortie d’hiver et utilisation de la méthode Jubil pour une fourniture au plus près des besoins de la plante, un seul fongicide compte tenu de la quasi-absence de maladie… » La production est raisonnée et c’est bien un objectif du cahier des charges CRC.

Une prime de 21 euros la tonne versée à l’organisme stockeur

En compensation de ces exigences, la filière CRC favorise une meilleure rémunération des producteurs, avec la mise en place d’un système de prime. « Cette prime est de 21 euros la tonne versée à notre coopérative pour nos blés améliorants, précise Xavier Thirouin, directeur de la coopérative de Boisseaux. Selon qu’un agriculteur stocke chez lui ou qu’il livre directement à la coopérative, il percevra une plus ou moins grande part de cette prime de son OS. Les contrats de production sont sur trois ans, ce qui donne une bonne visibilité à l’agriculteur. » Pascal Vauzelle reçoit ainsi 15 euros de la tonne, s’ajoutant à la rémunération de ses blés. Il stocke sa récolte à la ferme en évitant tout traitement insecticide. Encore une exigence propre à la filière CRC. Le contrôle des températures du stock de grains limite l’impact des éventuels ravageurs. Il faut de quatre à cinq mois pour passer de 30 °C à la récolte à 10 °C, ce qui nécessite une maîtrise certaine de son stockage.

La coopérative de Boisseaux est spécialisée dans les productions de qualité rémunératrices depuis des lustres. « La rémunération équitable des agriculteurs a été affichée dès les années 90 où la production des blés de force représentait 10 % de ces céréales chez nos agriculteurs adhérents, présente Xavier Thirouin. Aujourd’hui, c’est 80 % des blés, avec une certification CRC. Outre la prime pour la qualité CRC, la production d’un blé de force est payée 50 euros de plus à la tonne environ qu’un blé meunier ordinaire. » La coopérative a conservé une taille modeste avec 120 agriculteurs dans un rayon de moins de 20 kilomètres autour de Boisseaux. « Nous avons 25 000 tonnes de capacité de stockage sur notre site et le même volume à la ferme. La coopérative investit dans la construction d’un silo supplémentaire de 5 000 tonnes pour 2020 qui sera dévolu aux productions CRC. Il est conçu pour permettre un refroidissement plus rapide des grains de façon à contrôler plus efficacement les insectes ravageurs du grain sans utiliser d’insecticides », ajoute le directeur de la coopérative. Coût de l’investissement : 2,5 millions d’euros.

+ 30 % d’agriculteurs par an dans la filière CRC

La filière CRC fête ses 30 ans d’âge avec l’objectif affiché de produire des céréales 100 % françaises sur des critères de qualité, de traçabilité et de respect de la santé des hommes et de l’environnement. La démarche a été reconnue officiellement avec l’obtention d’une certification de conformité produit en 1999 par les pouvoirs publics. Le contrôle est exercé par un organisme certificateur indépendant. "3000 agriculteurs sont engagés dans cette filière, présente Marc Bonnet, directeur du GIE CRC. Que ce soit entre 2017 et 2018 mais aussi entre 2018 et 2019, nous avons enregistré une progression de 30 % de ces producteurs. Pour la campagne 2018-2019, nous tablons sur une récolte de plus de 500 000 tonnes de blé CRC, ce qui équivaut à 10-12 % des blés cultivés en France pour la meunerie, estime Marc Bonnet. 80 % des farines label rouge sont fabriquées à partir de blés CRC, ajoute-t-il. Présent sur des céréales comme le blé tendre, le blé dur, le seigle et bientôt le sarrasin, la filière CRC entend s’étendre sur d’autres productions comme l’orge, le maïs et le colza pour avoir une approche systémique de la démarche sur toute l’exploitation. »

(1) CRC veut dire Cultures raisonnées contrôlées. La filière CRC garantit des céréales 100% françaises et cultivées selon de bonnes pratiques favorables à la biodiversité.
EN CHIFFRES

Au milieu de la Beauce

Pascal Vauzelle, exploitant depuis 1982;

140 ha dont 56 de blé tendre (améliorant), maïs, colza, lin graines (bleu blanc cœur), orge de brasserie, pomme de terre, oignons (+ 2 ha de jachère, 70 ares de bandes enherbées, 600 m de haies);

1/3 des blés est sous contrat CRC;

240 €/t (dont 15 € de prime CRC) pour le blé améliorant CRC;

450 à 500 €/ha de charges opérationnelles (intrants, irrigation) sur blé;

70 à 80 q/ha de rendement sur les blés améliorants;

800 t de stockage à la ferme en cellules avec ventilation (+ séchoir à grains).

Vers le « zéro résidu de pesticides »

Le cahier des charges CRC est draconien mais la filière veut encore aller plus loin, avec un plan baptisé Cap 2023. Entre autres engagements, le plan prévoit la mise en place du « zéro résidu de pesticides ». Le plan met en avant « le renforcement d’actions en faveur de la restauration de la biodiversité ». Véritable volonté ou simple affichage en phase avec les exigences sociétales ? La coopérative de Boisseaux accompagne cette intention qui ne fait pas l’objet de mesures obligatoires dans le cahier des charges CRC. Un nichoir à rapaces a été installé chez Pascal Vauzelle. L’agriculteur a réservé 2 de ses 140 hectares à une jachère, 70 ares de bandes enherbées avec des bordures non broyées, 600 mètres de haies… Un peu de biodiversité dans un océan de cultures.

Un gros client : McDonald’s

La chaîne de restauration rapide McDonald’s est un gros client des blés CRC. « À partir de cette année, l’ensemble des blés utilisés pour les buns (pains pour hamburger) sera CRC, affirme Rémi Rocca, directeur achat et qualité chez McDonald’s France. C’est une nouvelle étape après la mise en place d’un approvisionnement de blé 100 % français et une production contractualisée depuis 2012. » Les blés CRC — Culture raisonnée contrôlée — répondent à leurs exigences de qualité, de traçabilité et de respect de l’environnement pour la production de leurs petits pains. L’entreprise américaine est à cheval sur les conditions de sécurité alimentaire et sur son image d’entreprise cherchant la qualité environnementale avec sa stratégie agroécologique affichée.

McDonald's n’est pas le seul utilisateur de blés CRC, loin de là. Ce n’est ni le premier même si les besoins de l’entreprise nécessitent 40 000 tonnes soit 8 % des blés CRC. Ces céréales sont achetées et utilisées par diverses autres entreprises : meuniers, industriels, distributeurs… « 5 000 boulangeries artisanales confectionnent leurs pains en utilisant ces blés, comme celles du réseau label rouge Bagatelle », mentionne Marc Bonnet, directeur du GIE CRC. Les buns de McDonald’s sont produits par la boulangerie Bimbo : 680 millions de petits pains avec 30 000 tonnes de farine provenant pour l’essentiel de blés de force.

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