Fiscalité de la transmission
Pacte Dutreil : il n'y a pas d’urgence à transmettre les parts des sociétés agricoles
Un récent rapport de la Cour des comptes et les débats parlementaires lors du PLF 2026 sèment des inquiétudes sur l’avenir du Pacte Dutreil. Pourtant l’utilisation du Pacte Dutreil dans les sociétés agricoles n’est pas menacée. Décryptage.
L’avenir des transmissions de parts de sociétés agricoles dans le cadre favorable du Pacte Dutreil est-il menacé ? Le Pacte Dutreil est considéré par certains comme une niche fiscale, puisqu’il permet une exonération de 75 % des droits de donations d’une entreprise, sous certaines conditions.
Le Pacte Dutreil visé par un rapport de la Cour des comptes
Le manque à gagner pour les finances publiques serait compris entre 2 et 5 milliards selon les années, par le rapport de la Cour des comptes publié le 18 novembre dernier. En effet, le mécanisme est activé par tous les types d’entreprises, les PME familiales, comme les exploitations agricoles, autant que les entreprises de taille intermédiaire (ETI). En moyenne l’avantage obtenu grâce au Pacte Dutreil est de 500 000 € par opération.
Les modifications du dispositif qu’elles soient proposées par la Cour des comptes ou les partis politique, ne remettent pas en cause son existence mais ses conditions d’application, qu’ils voudraient plus restrictives.
Par exemple, ont été mis en avant : l’exclusion des biens non professionnels (œuvre d’art, yacht, résidence secondaire…), un plafonnement de l’avantage, un allongement de la durée de détention, un âge limite du bénéficiaire de la donation (60 ans) pour qu’il s’implique dans l’entreprise donnée. Le renforcement des conditions d’application de cette exonération vise à limiter les abus d’optimisation fiscale.
Dès lors, faut-il se dépêcher de donner ses parts sociales à ses descendants avant le vote de la prochaine loi de finances 2026 ?
Faut-il donner rapidement ses parts sociales en vue de la modification du Pacte Dutreil dans la PLF 2026 ?
Dans leur très grande majorité, les montages sociétaires des agriculteurs ne sont pas concernés par ces projets de modifications. L’usage classique du Pacte Dutreil pour transmettre une exploitation familiale, en Gaec, EARL, SCEA, et même une société de méthanisation ou photovoltaïque ou holding, en SARL ou SAS n’est pas compromis.
Seules deux modifications envisagées pourraient les concerner, sans pour autant constituer des contraintes pratiques.
Quelle conséquence de l’allongement de la durée de détention des parts sociales ?
Après la donation qui a bénéficié de 75 % d’exonération de droits, le donataire doit conserver les parts sociales durant 4 ans, comme pour une dotation nouveau et jeune agriculteur d’ailleurs. Il est envisagé d’allonger cette période de 2 ans, soit 6 ans au total. Or, quand un descendant d’agriculteur hérite de parts d’une société familiale il ne s’empresse guère de les revendre dans les années qui suivent. Cet allongement ne devrait pas poser de problème à la grande majorité des héritiers.
Quelle conséquence de la condition d’âge du bénéficiaire de la donation ?
Une condition d’âge pour au moins un des bénéficiaires de la donation pourrait être ajoutée. Autrement dit, au moins un des donataires, celui qui assumera l’engagement de la direction de l’entreprise, devrait au jour de la donation avoir plus de 18 ans et moins de 60 ans. En agriculture, on s’installe rarement après 60 ans et on assume encore plus exceptionnellement des fonctions de gérance avant 18 ans.
Par conséquent, il n’y a pas lieu à précipiter une transmission de parts sociales par crainte de modifications législatives qui n’auraient pas d’impact contraignant. Il est préférable de respecter une stratégie patrimoniale globale cohérente avec la carrière des concernés. A noter qu’aujourd’hui seules 5 % des exploitations agricoles sont transmises en utilisant le Pacte Dutreil.