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Méthanisation agricole : 6 points à surveiller pour financer son projet

Rentabilité, fonds propres, compétences... Les banques exigent de plus en plus de garanties pour financer les projets de méthanisation dans un contexte économique qui se durcit.

Vu la dimension des projets de méthanisation, les banquesexaminent de près la santé financière des exploitants et le niveau de fonds propres.
Vu la dimension des projets de méthanisation, les banquesexaminent de près la santé financière des exploitants et le niveau de fonds propres.
© J.-C. Gutner

Monter une unité de méthanisation représente un investissement de plusieurs millions d’euros qui s’appuie sur l’emprunt bancaire. Pour réussir un tel projet, une série de questions doivent être clarifiées avant de le présenter à votre partenaire bancaire.


À QUI APPARTIENT LE TERRAIN ?

L’emplacement compte, en particulier la distance au réseau pour les projets d’injection. Mais pour les banques, la propriété du terrain sur lequel se situe le projet est tout aussi fondamentale.

« Il faut que le sol appartienne en pleine propriété à la structure qui porte le projet. La location est exclue et nous examinons à la marge les baux à construction », détaille Emmanuel Philippe, animateur commercial Énergies renouvelables au Crédit mutuel.


QUEL NIVEAU D’APPORT PERSONNEL AU FINANCEMENT ?

Les exploitants doivent apporter un minimum de fonds propres au financement de leur projet. « Si c’est un projet individuel, les banques vont regarder la solvabilité de la ferme, les fonds propres et les subventions, observe Stéphane Bisson, directeur du CERFrance Énergie Normandie. Pour les projets collectifs, elles analysent la santé financière de chacun et exigent également que les associés effectuent des apports en fonds propres. » Un minimum de 20 % du projet en fonds propres est requis. Bien sûr, plus ce ratio est élevé, mieux ce sera. « Les fonds propres correspondent à la somme du capital social, des comptes courants d’associés, du financement obligataire et des subventions », précise Emmanuel Philippe.

« Si vous n’avez pas un minimum de fonds propres, il est indispensable de trouver des actionnaires », note Stéphane Bisson. Dans ces situations, l’expert recommande des schémas qui assurent aux agriculteurs la maîtrise de la gérance. « Par exemple, un actionnaire peut apporter la moitié des fonds propres nécessaires et les agriculteurs conserveront une majorité importante du capital. L’actionnaire sera rémunéré en compte courant ou via des obligations. Tout le monde s’y retrouve. »

INVESTIR SEUL OU À PLUSIEURS ?

L’association entre agriculteurs, via notamment une SAS, permet de lancer des grands projets et de partager les risques. Mais elle expose aussi à des soucis d’entente dont il faut se prémunir. « Il faut anticiper la mésentente. Nous recommandons de rédiger un pacte d’associés et un règlement intérieur pour prévoir qui fait quoi, qui apporte quoi, qui récupère quoi du digestat et ce qu’il advient si un associé arrive ou sort de la société, illustre Emmanuel Philippe. Le pouvoir méthanogène d’un lisier ou d’une Cive n’est pas le même et des clés de répartition existent. »
 

COMMENT ANALYSER LA RENTABILITÉ ?

La rentabilité du projet reste la clé de son financement. « Nous examinons le ratio DSCR, lequel se détermine avec la formule EBE-IS/annuités et doit être supérieur à 130 %. Si on n’atteint pas ce ratio, le projet ne sera pas finançable », affirme Emmanuel Philippe. Pour sécuriser la rentabilité de ces projets, les banques regardent le gisement disponible et réclament des garanties contre les pannes : elles examinent par exemple la solidité financière des constructeurs sélectionnés et la fiabilité des équipements retenus. « Nous avons un regard très sélectif sur les projets en voie sèche. Pour les projets en voie liquide, nous regardons qui est le constructeur et qui fait l’épurateur. »

OÙ TROUVER DU CONSEIL ?

Construire un méthaniseur requiert de s’entourer de compétences d’experts pour étudier la faisabilité du projet, mais aussi pour suivre et faire respecter un planning car tout retard peut vite coûter cher. « Les simulations économiques et financières réalisées par un constructeur ne sont pas suffisantes. Nous souhaitons que les projets soient accompagnés par un cabinet d’études indépendant et idéalement disposant du label Qualimétha », rappelle Emmanuel Philippe. Depuis le 1er janvier 2022, le coût de ces études est pris en charge à hauteur de 70 % par l’Ademe, dans la limite de 100 000 euros. Ce cabinet jouera le rôle d’assistant maître d’ouvrage et de maître d’œuvre.

LE PROJET FAIT-IL L’OBJET D’UN RECOURS ?

Les banquiers détestent les procédures contre les permis de construire ou déclarations installations classées (ICPE), qui pourtant se multiplient : ces situations génèrent incertitudes, pauses et coûts supplémentaires. L’appui de cabinets juridiques spécialisés, pourtant indispensable, génère des frais importants. Pire, l’assurance recours - qui était proposée par une seule compagnie d’assurances -n’est plus disponible. « Une banque ne finance pas un projet sans assurance recours sauf si le porteur de projet est capable d’apporter les garanties personnelles suffisantes », explique Emmanuel Philippe. Une exigence qui fait jeter l’éponge à de nombreux entrepreneurs.

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