Marchés
Le Matif est devenu incontournable pour la filière céréalière
Prix de référence pour les uns, outil d’arbitrage
pour les autres, le Matif fait partie du quotidien de la filière céréalière. Mais quelle est son histoire ?
1. Le Matif est mort, vive Euronext !
Les contrats Matif sont devenus incontournables dans le monde des grains en Europe. En blé, le prix du Matif s’est imposé comme une référence faisant de l’ombre à Chicago, tandis qu’une grande part des contrats signés entre opérateurs de la filière en blé, colza ou maïs sont indexés sur ces cours. À l’origine, le Marché à terme des instruments financiers (Matif), créé en 1986, ne comportait pas de contrats sur les matières premières, mais avait pour vocation de fournir des outils de couverture de la dette française. Les produits agricoles y font leur apparition en 1990, avec l’intégration de contrats préexistants à la Bourse de commerce portant sur le sucre, le cacao et le café. Bien qu’encore couramment utilisé, le terme « contrat Matif » n’existe officiellement plus depuis… 2000, année de naissance d’Euronext suite à la fusion avec les bourses d’Amsterdam et de Bruxelles. Devenue au gré des fusions Liffe Euronext, puis NYSE Euronext, l’entreprise a été achetée en 2013 par l’opérateur américain ICE.
2. Le colza, premier succès
La gamme de produits agricoles telle qu’on la connaît aujourd’hui est initiée en 1994, avec le lancement du contrat colza. En 1992, la réforme de la PAC prive les oléagineux de soutien public. Exposée à la volatilité des marchés mondiaux, la filière se tourne alors vers le Matif pour demander la mise en place d’un marché à terme similaire à celui qui existait de longue date aux États-Unis pour le soja. Dès cette étape fondatrice, le Matif cherche à donner une dimension européenne à ses contrats agricoles en impliquant les opérateurs allemands et anglais. La greffe prend, et les volumes échangés s’accroissent pour atteindre un niveau de liquidité fonctionnel au bout de quelques années.
3. Le blé, produit phare
Fort de son succès en colza, le Matif lance en 1996 un contrat blé. Il faut au préalable obtenir une modification de la loi, qui interdit depuis 1936 la création de marchés à terme pour les céréales. Cette première mouture inclut des points de livraison sur la Moselle et à Rouen, et une qualité définie par le 76/15/4/2/2 ainsi que par un taux de protéines minimal de 10,5 et un Hagberg de 220. Las ! Ce nouveau produit ne convainc pas les opérateurs. Le Matif propose un contrat remanié en 1998, offrant un point de livraison unique (le rendu Rouen), et abandonnant les spécifications sur la protéine et le Hagberg. Ce produit plus attractif connaît un premier pic d’activité en 2003, à l’occasion du fameux épisode de sécheresse, puis enregistre une croissance de 1 700 % entre 2006 et 2012, sous-tendue par la nervosité croissante des cours. Actuellement, plus de 20 000 lots de 50 tonnes sont échangés en moyenne par jour. En nombre de lots, c’est 20 à 25 % des quantités échangées à Chicago pour le contrat du blé Soft Red Winter.
4. Des contrats évolutifs
Les contrats à terme du Matif puis d’Euronext dédiés aux matières premières agricoles ont évolué au fil du temps pour coller aux besoins changeants des acteurs de la filière. Ces derniers se mettent régulièrement autour de la table pour évoquer des adaptations des lieux de livraison, du nombre d’échéances, des aspects qualitatifs… Malgré tout, certains contrats ont été abandonnés. D’autres peinent à se rendre indispensables. Le contrat maïs, lancé en 1999, dépasse tout juste les 2000 lots échangés par jour en moyenne. Une liquidité jugée insuffisante par nombre d’opérateurs. Le marché à terme de l’orge de brasserie reste quant à lui boudé depuis sa mise en place, au printemps 2010. Seule une cinquantaine de lots est échangée quotidiennement.