« Le gouvernement doit aller plus loin dans la clarification de ses objectifs »
Député du Bas-Rhin et agriculteur, Antoine Herth (1) répond aux questions de Réussir Grandes Cultures relatives au rapport de la mission commune d'information sur les phytos de l'Assemblée nationale.
Le chemin parcouru est considérable mais il n’a pas pris les directions attendues par le gouvernement. Il n’y a pas eu une baisse de 50 % des volumes de phytos. Mais ce qui m’impressionne, ce sont, par exemple, les expérimentations dans les fermes Déphy qui diffusent dans les systèmes de production, ou les Certiphytos qui sensibilisent l’ensemble des agriculteurs. Est-ce que c’est suffisant ? Probablement que non. Il faut voir qu’avec Écophyto, la France s’est positionnée sur une réduction des volumes. Nos voisins, eux, ont visé une réduction des impacts. Cela explique les difficultés rencontrées. On considère que c’est un échec mais il faut se poser la question de la réduction des impacts.
Savoir où le gouvernement veut aller. S’il veut cibler des molécules qu’il considère trop dangereuses, il faut qu’il le dise. Sur le biocontrôle, par exemple, il faut que les grosses firmes décident de massifier leurs efforts. Or il y a aujourd’hui une sorte de poker menteur entre l’administration qui veut interdire des molécules et les firmes qui menacent de ralentir leurs efforts si ça va trop loin… L’État ne peut pas décréter qu’il va mettre sur le marché de nouvelles molécules ! Il faut que les entreprises aient un intérêt commercial. Pour ça, le gouvernement doit aller plus loin dans la clarification de ses objectifs, afficher la direction quitte à négocier sur le calendrier.
Elle a réuni pendant cinq mois des parlementaires de quatre commissions qui, habituellement, ne s’occupent pas d’affaires agricoles. Ils ont vu que les choses étaient complexes et les réponses pas simples. La mission a mis en particulier le doigt sur la problématique santé. Cette question de la santé publique n’a jamais été posée clairement dans le plan Écophyto, qui avait une approche environnementale. Or cette problématique monte en puissance. J’invite le monde agricole à créer dès maintenant des groupes de travail sur ce sujet, comme il sait le faire. Il faut qu’il ait un discours. Ceux que ce sujet préoccupe veulent une réponse. Il faut faire de la pédagogie autour de cette question. J’ai bon espoir : il y a dix ans, les agriculteurs n’étaient pas capables d’avoir un discours sur l’environnement ; aujourd’hui, il n’y a plus de problème. Avec la santé, ça prendra du temps mais ils y arriveront.
Auteur en 2011 d’un rapport sur le biocontrôle, Antoine Herth a suivi de près la mission commune sur les phytos.