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La vie du sol livre ses secrets

Les connaissances progressent sur la microbiologie du sol. Les micro-organismes peuvent être analysés dans leur globalité et, pour certains, dans leurs fonctionnalités.

Bactéries et champignons du sol se dévoilent face aux chercheurs. Pourtant, ces micro-organismes grouillent dans la terre. « Un gramme de sol renferme 1 milliard de bactéries pour 1 million d’espèces et dix fois moins pour les champignons », chiffre Lionel Ranjard, Inra Dijon. Dans cette soupe de micro-organismes, est-il possible de déterminer le cortège des espèces et leurs fonctions dans le sol ? « Pas par la culture en boîte de Petri, car seulement 1 % des espèces sont capables de pousser dans le milieu gélosé. Nous sommes actuellement sur des techniques de marquage génétique avec extraction de l’ADN du sol et les milliards de génomes (métagénome) qui vont avec. »
La quantité d’ADN extraite pour un gramme de sol permet d’avoir une biomasse moléculaire microbienne. On a alors une idée de la richesse microbiologique car la quantité d’ADN est corrélée au nombre de bactéries et champignons.
« À ce niveau, les sols sont différenciés du point de vue de cette richesse microbienne. Plus un sol est argileux, plus il est riche en micro-organismes. Plus il est sableux, plus il est pauvre, résume Lionel Ranjard. Les Landes de Gascogne, par exemple, contiennent naturellement très peu de biomasse microbienne. Nous avons établi une carte de France des sols et de leurs biomasses microbiennes. » Cette information rend compte également des modes d’usages des sols. « Les terres des parcelles viticoles ont peu de biomasse microbienne. C’est imputable aux utilisations massives d’antifongiques et aux travaux du sol qui sont très délétères pour les champignons en particulier. Mais les vignes sont souvent cultivées sur des sols pauvres. Les sols de prairies et de forêt contiennent une biomasse importante, en revanche. Ceux des cultures sont intermédiaires. »
Les analyses microbiennes peuvent-elles aller au-delà de la simple quantification ? On peut obtenir la densité des bactéries et champignons séparément à partir de l’extraction de l’ADN du sol.

Un indice qualitatif de diversité microbiologique


« Mais depuis cinq ans, la technique du séquençage à haut débit qui nous vient du monde de la médecine permet de réaliser l’inventaire taxonomique sur plusieurs dizaines de milliers d’espèces, signale Lionel Ranjard. Nous obtenons alors un vrai indice de diversité microbiologique avec identification de populations ou de groupes taxonomiques d’intérêts agro-écologiques. Des services liés à l’agriculture peuvent être évalués comme la fertilité biologique (capacité à dégrader la matière organique), l’état sanitaire (beaucoup ou peu de pathogènes), l’état patrimonial (niveau de pollution des sols)… »
Anne-Laure Blieux est ingénieur projet chez GenoBiome(1), une structure qui a été créée pour proposer des analyses de la microbiologie du sol en mettant en prestation les outils utilisés par l’Inra et la plateforme GenoSol. « Les coûts sont de 90 euros par échantillon pour avoir un indicateur d’abondance globale (biomasse) à 800 euros pour un inventaire complet des micro-organismes du sol et le diagnostic de situation dans le sol », précise la spécialiste. GenoSol gère la conservation et les études des échantillons de sols du réseau RMQS(2) prélevés dans toute la France.
Par ailleurs, des laboratoires privés proposent des analyses portant sur certaines catégories de micro-organismes (bactéries nitrifiantes et dénitrifiantes, champignons mycorhiziens…) et sur l’activité réelle de ces organismes (respirométrie).

Des diagnostics de l’état des sols


La diversité biologique rend compte du potentiel d’un sol à bien fonctionner et c’est sur l’abondance et la diversité des micro-organismes que porte l’essentiel des analyses biologiques du sol. Elles servent à livrer un diagnostic de l’état d’un sol sans apporter encore de réelles recommandations.
Explication du processus de diagnostic chez GenoSol et GenoBiome : « nous disposons d’un référentiel de diversité microbienne sur les 2200 situations correspondant aux points du réseau RMQS bien représentatifs de toutes les situations rencontrées en France. Nous avons bâti un modèle qui prédit la valeur optimale pour un sol en fonction de son pédoclimat », explique Lionel Ranjard.
Suite à une analyse, GenoBiome délivre un document présentant le résultat de biomasse moléculaire microbienne et le rapport d’abondance champignons/bactéries. Ces données sont comparées au référentiel national avec une valeur en dessous ou au-dessus permettant de juger de l’impact des pratiques agricoles sur l’abondance des micro-organismes ou sur l’équilibre entre bactéries et champignons. Il met en avant des pistes permettant d’expliquer l’état du sol étudié. Le gain en précision des analyses s’accompagne de formations à la connaissance de la biologie du sol. Le programme Casdar Agrinnov participe à cette démarche. « Nous sommes effectivement dans cette étape de formation de prescripteurs sur les indicateurs biologiques du sol : des micro-organismes à la macro-faune, informe Lionel Ranjard. En mettant en place un réseau de gens formés sur le terrain, nous espérons un développement des formations à la connaissance et à l’expertise de la biologie du sol pour les conseillers et agriculteurs. » Objectif avoué : contribuer à la mise en place d’un conseil « agro-écologique » sur la gestion de ses sols.


(1) Derrière Genobiome, il y a deux structures de gestion : Inra Transfert et Welience.
(2) Réseau de mesure de la qualité des sol.

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