Aller au contenu principal

PATRICK DE FRIBERG, ÉCRIVAIN
« La manipulation génétique est un vrai sujet de thriller »

Avec « Le Dossier Déïsis », Patrick de Friberg plonge le lecteur dans un roman d’espionnage mêlant OGM, abeilles tueuses et services secrets.

L’alimentation de la planète et la sélection agronomique sont au coeur de votre roman. Pourquoi ce thème ?

D’abord parce que l’agriculture ne m’est pas étrangère, puisque je suis issu d’une famille de producteurs dans les Antilles. D’autre part, j’ai fréquenté des amis agriculteurs dans la Beauce, où j’ai vécu trois ans. La vision de ces champs à perte de vue m’a toujours impressionnée. Elle est probablement à l’origine de ce rêve d’une planète verte que porte le roman. À l’opposé de cela, il y a mon expérience de l’Afrique, avec la faim, la sécheresse, les manoeuvres des commerciaux des grosses sociétés céréalières américaines… Cela a façonné la dialectique du roman: d’un côté un chercheur idéaliste en quête du maïs qui nourrira l’humanité, de l’autre la récupération de ce rêve, qui le transforme en catastrophe humanitaire. Ce nouveau maïs transgénique tourne au désastre.

C’est une charge contre les OGM ?

Non. Ce qui m’intéresse dans la manipulation génétique, c’est son côté Docteur Jekyll et Mister Hyde. Elle fait rêver les industriels et effraie des populations mal informées. Cette opposition constitue un vrai support de thriller, qui consiste à jouer avec la peur du lecteur pour l’amener à réfléchir. Tous les scientifiques que j’ai interrogés m’ont expliqué qu’il y a des solutions pour nourrir le monde entier, notamment grâce aux manipulations génétiques du maïs ou du blé. On a les outils, on a les personnes, mais rien ne bouge. Ce livre est un coup de gueule contre une écologie transformée en religion, qui professe une peur millénariste de fin du monde, mais aussi contre une posture anti-écologique où l’on retrouve le même extrémisme. Pour moi, être contre les OGM aujourd’hui est une aberration, tout comme être totalement pour.

Vous présentez toutefois les chercheurs comme des apprentis sorciers.

Je ne suis pas d’accord avec vous. Ismaïlovski, le chercheur au coeur de l’intrigue, est un grand naïf qui veut trouver la semence parfaite pour sauver l’humanité. Mais on le fait disparaître avant qu’il soit allé au bout de ses travaux. Je laisse planer le doute : peut-être aurait-il pu corriger les problèmes engendrés par ce maïs. Les chercheurs sont des rêveurs qui ne comprennent pas l’inquisition anti-OGM. Mais parallèlement à cela, dans l’enquête que j’ai faite pour écrire le livre, j’ai vu de grands labos et des sociétés industrielles qui ne recherchent que la rentabilité financière et la protection de leurs marchés. Les apprentis sorciers ne sont pas les chercheurs, mais les financiers et les politiques qui laissent mettre en place des systèmes non protégés conduisant à des catastrophes.

Vous comparez l’arme alimentaire à une « bombe verte »…

C’est le sujet des futures guerres modernes. La stagnation du rendement des productions agricoles mondiales et le problème des surfaces cultivées va nous conduire aux conflits. On l’a vu l’an dernier avec les tensions financières causées sur le marché du maïs par un pourcentage minime utilisé pour l’énergie, et avec les émeutes de la faim. On est sur un seuil où tout peut exploser. Un agent de la DGSE(1) m’a dit un jour que l’espionnage, d’État ou privé, était plus important dans le monde agroalimentaire que dans l’industrie chimique. ! Propos recueillis par Gabriel Omnès (1) Service de renseignement extérieur français.

 

PORTRAIT

• Patrick de Friberg est écrivain. Ce Canadien a exercé les métiers de plongeur, de directeur de banque, de consultant dans de nombreux pays. Le Dossier Déïsis est son premier roman publié en France, aux éditions du Castor Astral.

 

Les plus lus

<em class="placeholder">Méthaniseur en injection de la coopérative EMC2 à Landres (54).</em>
Méthanisation agricole : des conditions tarifaires qui pourraient booster les projets

La politique de transition énergétique française ouvre de bonnes perspectives pour la production de biométhane. Mais échaudés…

<em class="placeholder">Georges Laigle, producteur de pommes de terre à Bihucourt (Pas-de-Calais),   
&quot;</em>
Mildiou de la pomme de terre : « Je profite de l’arsenal de produits à disposition pour alterner les solutions sur mes parcelles dans le Pas-de-Calais »

Producteur à Bihucourt (Pas-de-Calais), Georges Laigle utilise une dizaine de produits différents contre le mildiou sur…

<em class="placeholder">Agriculteur déchargeant un sac d&#039;engrais dans son épandeur à engrais.</em>
L’Europe valide la taxation des engrais russes jusqu'à 430 €/t en 2028

Ce 22 mai 2025, le Parlement européen a approuvé l’augmentation progressive, à partir du 1er juillet 2025, des taxes…

<em class="placeholder">Parcelle de blé tendre dans le nord de la France.</em>
Sécheresse dans la moitié Nord : les cultures d'hiver ont besoin de pluies pour atteindre des rendements « dans la moyenne »

Peu de maladies, des cultures d’hiver globalement belles, les récoltes s’annoncent dans la moyenne. Peut-être le temps…

<em class="placeholder">Antoine Prévost, exploitant agricole à Foucherolles, dans son champ de blé au printemps 2025.</em>
« La négociation de ma reprise de terres s’est faite en bonne intelligence avec le cédant »

Antoine Prévost, exploitant agricole à Foucherolles, a saisi l’opportunité de reprendre 35 hectares de terres en plus de son…

<em class="placeholder">Visite d&#039;un essais colza organisé par la coopérative Vivescia.</em>
Colza : « Nous recherchons dans le Grand-Est des variétés calmes à l’automne pour les semis de début août, et des variétés très dynamiques pour les semis plus tardifs »
Étienne Mignot est expert innovation agronomique au sein du groupe coopératif Vivescia. Il explique quelles sont les gammes de…
Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 96€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Grandes Cultures
Consultez les revues Réussir Grandes Cultures au format numérique sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce à la newsletter Grandes Cultures