Aller au contenu principal

En chiffres
La lentille cumule les bons points

Grâce à ses nombreux atouts agronomiques et à sa marge brute élevée, la lentille verte gagne du terrain depuis huit ans. Agriculteur dans l'Aube, Karl Dhulst en produit sous contrat pour Soufflet.

La filière lentilles vertes de France reprend du poil de la bête. D’abord cultivée dans l’Aube et la Marne, elle s’est introduite dans les rotations des agriculteurs bourguignons et berrichons. Agriculteur à Fontvannes dans l’Aube, région historique de production de lentilles, Karl Dhulst a inclus progressivement la légumineuse dans sa rotation pour arriver à 15 hectares en 2016 et 23 hectares en 2017. Il souhaitait se diversifier afin de réduire ses risques liés au climat ou aux marchés. « J’ai choisi la lentille non seulement parce qu’elle a de nombreux atouts agronomiques, mais aussi parce que mon père en cuisinait et que j’aimais le goût », raconte-t-il.

Un contrat signé un an à l’avance

Depuis 2008, chaque année, en septembre, Karl Dhulst contractualise la totalité de sa production avec le groupe Soufflet pour la récolte de l’année suivante, à un prix fixe et pour un volume donné. « Le prix garanti m’a aidé à me lancer. Je pense même que pour se diversifier, il faut impérativement être dans une filière. La clé c’est le contrat ", estime-t-il. Au niveau de la qualité des lentilles livrées, Soufflet demande un taux d’humidité maximum de 15 %, pas plus de 1 % de brisure, ainsi qu'un taux de lentilles tachetées et germées en dessous de 1 %. Les lentilles doivent être pures. « Je livre au silo près de chez moi car je suis dans un bassin de production important. Mais avant, un camion venait chez moi chercher la marchandise », explique l’agriculteur. Tous les silos de Soufflet ne sont pas adaptés à la reception des lentilles. Le site doit être capable de garder une cellule vide après la moisson, de bien isoler la culture et d'être équipé de sondes adéquates pour effectuer les échantillons. « Nous projetons d’augmenter le nombre de silos en Bourgogne et dans la région Centre », prévoit Georges Lemineur, directeur de la région Bourgogne chez Soufflet agriculture. Le groupe Soufflet est en pleine extension (voir encadré). La sole française qu'il contractualise avec les agriculteurs en lentille est passée de 1 300 hectares en 2015 à 2 000 hectares en 2016. « Pour 2017, nous envisageons une hausse des surfaces à 3 200 hectares », estime Thierry Lievin, directeur général de Soufflet alimentaire.

Des prix stables depuis cinq ans

Si on assiste à cet engouement, c’est parce que la lentille a de nombreux atouts agronomiques. Cette légumineuse n’a pas besoin d’azote et demande peu d’investissement au départ. « Je n’ai pas eu besoin d’acheter du matériel spécifique, la préparation du sol et le semis se font comme en céréales, même si le travail du sol doit être plus précis. Entre agriculteurs, nous disons que c’est du jardinage », relate Karl Dhulst. La légumineuse est récoltée à partir de fin juillet jusqu’à fin août, le chantier s’intercale bien entre ceux des céréales, du chanvre et des betteraves. « La culture est plus risquée et moins stable que le blé », constate l’agriculteur. Depuis huit ans, les rendements oscillent entre 12 et 39 q/ha. En 2016, les lentilles de Karl Dhulst ne s’en sont pas trop mal sorties et ont repris leur développement après les inondations. « J’ai fait 2,7 t/ha, c’est ma meilleure marge brute de l’année », avoue l’Aubois. Avec un contrat de 550 €/t, quasiment stable depuis cinq ans, et 500 €/ha de charges, l'agriculteur évalue sa marge brute entre 700 et 900 €/ha en 2016. « C’est une bonne tête de rotation et c’est donc une alternative au colza, qui est en difficulté dans la région. En allongeant ma rotation, je gagne d’un point de vue agronomique et je subis moins les aléas des marchés », complète-t-il. Comptabilisée dans les SIE (surfaces d’intérêt écologique), et promue lors de l’année internationale des légumineuses, la lentille semble avoir le vent en poupe dans les campagnes.

Une maturité difficile à estimer

« Toutefois, la récolte de la lentille est délicate car il est parfois difficile de déterminer son niveau de maturité ", observe Karl Dhulst. " Le changement de couleur, l’humidité nous aident mais c’est avant tout l’expérience qui nous guide. Il faut également bien régler sa moissonneuse pour avoir le moins de brisures possible et bien la nettoyer pour plus de pureté », poursuit l’Aubois. Côté traitements, l’agriculteur applique jusqu’à deux fongicides et deux insecticides selon la pression. « D’ailleurs, c’est parfois compliqué puisque les produits phytos homologués sur les lentilles sont peu nombreux. Quant à la semence, elle est fournie par le groupe Soufflet et je regrette qu’on ne me propose qu’une seule variété. J’aimerais en avoir une plus précoce pour enchaîner après les blés sans avoir besoin de ressortir ma moissonneuse, d’autant plus que le chanvre se récolte tout de suite après », admet Karl Dhulst. Autre limite : le terrain. Les lentilles ne doivent pas représenter plus de 10 % de la sole puisqu'elles ne peuvent pas revenir avant sept ans sur une même parcelle. Et la légumineuse ne se développe bien que dans des terres argilo-calcaires très filtrantes puisqu’elle n’apprécie guère l’eau stagnante. « J’ai remarqué que la lentille se plaît dans des petites terres et sur les coteaux exposés au soleil », ajoute Karl Dhulst. Si la lentille demande un certain savoir-faire et a ses exigences, cela reste un atout pour l'agriculteur en termes de rotation, avec à la clé une belle marge brute.


" En allongeant ma rotation avec la lentille, je gagne d’un point de vue agronomique et je subis moins les aléas des marchés."
Karl Dhulst, à Fontvannes dans l’Aube
CARTE DE LOCALISATION : Fontvannes (Aube)

Soufflet souhaite développer sa filière lentille

Le groupe Soufflet vend chaque année 180 000 tonnes de lentilles à travers l’Europe. 60 % de la marchandise est récoltée dans l'Hexagone. « À terme, nous souhaiterions que la totalité des lentilles vendues aux grandes et moyennes surfaces soient produites en France », explique Thierry Lievin, directeur général de Soufflet alimentaire. Sur le site de Valenciennes —l'un des trois centres destinés au conditionnement des légumes secs — les lentilles sont principalement vendues sous la marque des distributeurs et aussi sous le nom de Vivien Paille. Une plus petite partie est destinée à l’industrie agroalimentaire, et moins d’un tiers à la restauration hors foyer. D’ailleurs, le groupe a investi sur ce site dans de nouveaux outils dédiés au conditionnement des lentilles prêtes à consommer. Soufflet alimentaire est le leader sur le marché de la lentille verte française avec 30 % des parts de marché.

La lentille dans l’air du temps

Longtemps boudée par les consommateurs, la lentille est de plus en plus appréciée et demandée. Riche en protéines végétales, elle surfe sur la vague des marchés sans gluten et vegan. Considérées comme longues à cuisiner, les lentilles ont vu leur conditionnement évoluer pour faciliter leur préparation. Soufflet alimentation commercialise des lentilles prêtes à consommer au microondes, des lentilles à poêler ou encore en sachets de légumes secs mélangés. On retrouve également des lentilles dans les farines de légumineuses, qui sont utilisées dans la conception de produits plus élaborés sans gluten comme des snacks, des chips ou encore des pizzas. « Il faut apprendre à utiliser autrement la lentille », assure Yannick Hus, directeur des achats et ventes B to B chez Soufflet alimentaire. Il ajoute que « longtemps, la lentille a été délaissée par les industriels de la conserve pour celle blanche de Chine, plus facile à cuisiner. L’enjeu est de réadapter les processus pour qu’ils utilisent la lentille verte française ».

5 % de lentilles en 2016

97 ha de blé
51 ha d'orge
43 ha de colza
37 ha d'escourgeon
16 ha de luzerne
15 ha de lentille
15 ha de chanvre
7 ha de pois
6,5 ha de betteraves

Les plus lus

<em class="placeholder">Paysage avec diversité culturale.</em>
Telepac 2025 : la rotation des cultures de la BCAE 7 n’est plus obligatoire

La version révisée du plan stratégique national (PSN) de la PAC 2023-2027 vient d’être validée par l’Europe. Pour la PAC…

<em class="placeholder">Tracteur réalisant un désherbage mécanique sur une parcelle en AB.</em>
Telepac : quelles aides bio pour la PAC 2025 ?

À quelles aides de la PAC avez-vous droit en 2025 si vous convertissez votre exploitation au bio ou si vous êtes déjà en bio…

<em class="placeholder">Plante de datura stramoine en fleur. </em>
« La télédétection du datura par drone me coûte 72 €/ha, mais c’est un outil de lutte indispensable sur mon exploitation des Pyrénées-Atlantiques »

Anne Darrouzet est agricultrice en bio à Bougarber, dans les Pyrénées-Atlantiques. Elle a mené pendant des années une…

<em class="placeholder">Vincent Prévost, agriculteur à Gueux, dans la Marne</em>
Chardon : « Je garde une attention constante tout au long de la rotation pour limiter cette adventice dans mes parcelles dans la Marne »
Producteur de grandes cultures à Gueux dans la Marne, Vincent Prévost reste vigilant tout au long de la rotation pour limiter au…
champs de céréales bio
Comment obtenir le crédit d’impôt bio en 2025 ?

Le crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique a été prolongé jusqu’à l’année 2025 par la loi de finances 2022 avec…

<em class="placeholder">Les corneilles noires s&#039;attaquent aux maïs surtout entre la levée et le stade &quot;3 feuilles&quot;.</em>
Dégâts de corvidés : prolongation de l’usage du produit Korit 420 FS sur maïs et nouveautés à venir en traitement de semences

Sur maïs, l’emploi du produit de traitement de semences corvifuge Korit 420 FS pour lutter contre les dégâts d'oiseaux, et en…

Publicité
Titre
Je m'abonne
Body
A partir de 96€/an
Liste à puce
Accédez à tous les articles du site Grandes Cultures
Consultez les revues Réussir Grandes Cultures au format numérique sur tous les supports
Ne manquez aucune information grâce à la newsletter Grandes Cultures