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Glyphosate : les politiques rattrapés par les réalités du terrain

Emmanuel Macron veut la sortie du glyphosate pour la France dans les trois ans. Mais il est rattrapé par les réalités de la profession agricole. Le président de la République a mis de l’eau dans son vin. Des dérogations seront possibles.

Le glyphosate avait fait l'objet de manifestations pour l'interdiction de l'herbicide, la dernière en date étant une initiative collective européenne (ICE).
© ICE Stop Glyphosate

Une interdiction dans trois ans ou dans cinq ans ? Des dérogations, oui ou non ? Et si oui, pour quelles situations ? On ne sait plus trop à quel saint se vouer dans les ministères sur le dossier du glyphosate. Le jour de la décision de la Commission européenne de renouveler une dernière fois l’homologation du glyphosate pour cinq ans, Emmanuel Macron, président de la République, s’empressait d’annoncer que la France interdirait l’usage du glyphosate dans trois ans. Ensuite, les membres du gouvernement et leur président ont mis un peu d’eau dans leur vin. Cela s’est entendu en début d’année 2018 et dans les allées du Salon international de l’agriculture, devant des agriculteurs en majorité contre une interdiction du glyphosate aussi rapide.

« Je n’imposerai jamais une sortie s’il n’y a pas d’alternative crédible »

« Les solutions de substitution existent pour 90 % des surfaces agricoles. Nous devons faire la transition sans délai, le plus vite possible et ne pas attendre », déclarait Emmanuel Macron lors de ses vœux à l’agriculture le 25 janvier(1). Pour argumenter ses propos, il reprenait les conclusions du rapport remis par l’Inra fin novembre 2017. « Pour les impasses restantes, notamment pour l’agriculture de conservation des sols ou les cultures en pente, nous mobiliserons la recherche pour proposer des alternatives avec un principe simple : je n’imposerai jamais une sortie s’il n’y a pas d’alternative crédible parce qu’on ne peut pas laisser un agriculteur sans solution. » Au Salon de l’agriculture, devant des représentants des Jeunes Agriculteurs d’Île-de-France, il n’hésitait pas à comparer le glyphosate à l’amiante quant à la nécessité de l’interdire rapidement.

Ministre de la Transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot a emboîté le pas de son président : « On est en train de recenser les alternatives qui existent et de leur donner les moyens de faire leurs preuves. Mais je ne suis pas buté et personne ne doit être enfermé dans une impasse. Si dans un secteur particulier ou une zone géographique, certains agriculteurs ne sont pas prêts en trois ans, on envisagera des exceptions », déclarait-il le 25 février au quotidien Le Monde.

« Tant qu’il n’y a pas de substitution, il n’y a pas de suppression »

Quant à Stéphane Travert, ministre de l’Agriculture, il ne s’est jamais trop engagé dans la brèche de la suppression du glyphosate dans les trois ans. Après la décision européenne, il déclarait « être heureux du vote des États membres de l’UE pour l’autorisation du glyphosate pour cinq années supplémentaires » quand, dans le même temps, Nicolas Hulot regrettait la non prise en compte de la position de la France pour un renouvellement limité à trois ans. Le ministre de l’Agriculture se réfugie derrière les propos d’Emmanuel Macron : « le président a rappelé que tant qu’il n’y a pas de substitution, il n’y a pas de suppression », déclarait-il sur les ondes de BFMTV le 28 janvier.

Brune Poirson est secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire. Interviewée par la chaîne Public Senat le 27 février, elle déclarait : « Nous devons parvenir pragmatiquement à sortir peu à peu du glyphosate. Cela ne se fait pas du jour au lendemain. À la fin du mois de mars, il y a un plan qui va être annoncé […] et c’est vrai qu’il y a peut-être des secteurs dans lesquels cela va être plus difficile. Il faudra peut-être un peu plus de temps. »

Pour le moment, le plan d’action phyto du gouvernement annoncé concerne les produits phytosanitaires dans leur ensemble. Mais le glyphosate fera l’objet de dérogations au-delà des trois ans restants d’utilisation pour les situations les plus dépendantes. Mais pas au-delà des cinq ans, délai annoncé par la Commission européenne.

(1) www.elysee.fr/videos/new-video-197/ Les propos sur le glyphosate se situent à la 50e minute.

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