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Colza : fertiliser au semis avec discernement

Pour favoriser la croissance à l’automne et limiter la nuisibilité des attaques d’insectes aux stades jeunes du colza, fertiliser au semis est tentant mais pas toujours pertinent.

Une fertilisation au semis ne compense jamais une mauvaise levée. © J.-C. Gutner
Une fertilisation au semis ne compense jamais une mauvaise levée.
© J.-C. Gutner

Faut-il fertiliser en azote et en phosphore les colzas à l’implantation et pour quels gains ? Les apports d’azote en plein sont possibles au semis s’ils ont lieu avant le 1er septembre, même s’ils peuvent être réglementés dans certaines situations (dose limite imposée). Au-delà, la Directive nitrates autorise uniquement l’apport azoté en localisé, enfoui directement dans la raie de semis, dans la limite de 10 unités. Un apport de N et de P, en solide, par exemple du 18-46, est parfois justifié.

« Des essais ont montré qu’un colza semé tôt en petite terre va croître très rapidement mais que des rougissements du feuillage peuvent apparaître, signe d’une carence en azote et/ou en phosphore, explique Cécile Le Gall, chargée d’études « environnement » chez Terres Inovia. On observe alors un ralentissement de la croissance. C’est là que les attaques d’insectes sont préjudiciables. »

Fertilisation recommandée en petites terres

Par ailleurs, le colza est une culture exigeante en phosphore et les carences ralentissent son développement. Dans les sols argilo-calcaires, pauvres ou moyennement pourvus et où le phosphore peut être bloqué, les apports de phosphore réalisés avant l’implantation limitent le risque de carence aux stades sensibles. « Le stade de sensibilité maximale du colza à la carence en phosphore se situe pendant la phase juvénile, au stade 5-6 feuilles », indique Luc Champolivier, de Terres Inovia.

Ces problèmes de carence sont d’autant plus préjudiciables s’ils se doublent d’attaques d’insectes (altises et charançons du bourgeon terminal) à l’automne. Dans ces situations, le maintien de la croissance tout au long de l’automne et à la sortie d’hiver est un levier essentiel pour limiter la nuisibilité de ces agressions. « Des suivis de parcelle conduits dans le Berry et comparant différentes modalités de lutte contre les insectes montrent que des dégâts d’altises et de charançons du bourgeon terminal sont beaucoup plus faibles quand les colzas sont poussants », détaille Cécile Le Gall. Les colzas à forte biomasse présentent les plus faibles nuisibilités.

In fine, les gains de rendements sont réels comparativement à des colzas plus petits. Par rapport aux témoins non fertilisés et non traités, la nuisibilité des attaques d’insectes peut être réduite jusqu’à 80 %, ou 4 à 6 q/ha sur un potentiel de 30 q/ha. Plusieurs formes d’engrais ont été comparées, et en particulier le 18-46 et les fientes. Le 18-46 génère des gains beaucoup plus stables que les fientes. Ces dernières peuvent potentiellement faire gagner plus de quintaux, mais avec une grande variabilité liée au contexte pédoclimatique. Néanmoins, un apport de produit organique peut générer d’autres effets bénéfiques (sur la fertilité chimique et physique des sols) dont il faut tenir compte.

Réduire le recours aux insecticides

Dans les sols plus profonds, fertiliser à l’implantation présente moins d’intérêt. Quand la pression des insectes est faible, l’azote apporté à l’automne n’apporte en général pas de gain de rendement. L’avance de croissance que procure l’engrais disparaît le plus souvent dès la sortie d’hiver.

L’analyse économique tempère elle aussi l’intérêt de la fertilisation au semis : le coût de l’apport d’engrais est équivalent aux passages d’insecticides. « La fertilisation offre un levier supplémentaire aux agriculteurs qui voudraient réduire la pression des insectes sans avoir recours aux insecticides, résume Cécile Le Gall. Néanmoins, dans les secteurs où la pression des ravageurs est trop forte, cette stratégie ne suffit pas. L’azote ne peut pas sauver une situation explosive. »

Pas de miracle en cas de mauvaise implantation

De même, une fertilisation au semis ne compensera pas une mauvaise implantation, qui ne suivrait pas les recommandations actuelles : un semis entre le 5 et le 15 août en fonction des régions ; un lit de semence relativement fin pour favoriser le contact terre/graine ; un sol non travaillé avant le semis, pour conserver la fraîcheur du sol en surface et une association type colza/féverole. Pour la spécialiste, « la fertilisation peut aider à valoriser une bonne implantation, ce n’est pas une solution miracle à un défaut de levée ».

Les promesses alléchantes des biostimulants

Les acteurs du marché investissent le créneau des produits biostimulants en enrobage de semences, jusqu’alors peu développé, ce qui justifie la mise en place d’essais depuis l’automne dernier. Ces nouveaux biostimulants peuvent être associés à un engrais starter et à des agents qui réduisent l’activité des pathogènes du sol. Certaines formulations concentrent leur action sur la partie racinaire des plantes, agissant sur différents paramètres : croissance racinaire précoce, amélioration de la capacité en eau du sol autour de la graine…
L’objectif est d’obtenir des levées plus régulières et plus rapides. On perçoit vite l’intérêt de telles allégations, vu les conditions sèches et chaudes des derniers étés. Pour évaluer l’effet de ces différents produits, Terres Inovia a lancé un essai complet sur le sujet. Les ingénieurs évaluent des modalités comportant des biostimulants appliqués aux stades B4 ou B8 et des biostimulants en enrobés de semences. Les premiers résultats seront connus à la récolte.

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