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Des sélectionneurs de colza visent la résistance aux virus

Deux nouvelles variétés de colza mises sur le marché en France présentent une résistance à un virus. C'est la principale innovation du crû 2017. Quel intérêt présente ce caractère ? Comment se positionnent les autres nouveautés ? Le point sur l'offre 2017.

Grâce à leurs niveaux de rendement et leur régularité, les variétés Dekalb sortent du lot le plus souvent.
© J.-C. Gutner

Quoi de neuf dans les variétés de colza ? La gamme évolue avec quelques innovations à la marge. La résistance aux virus de certaines variétés a été médiatisée puisque c’est la première année en France que des colzas présentant ce caractère sont mis sur le marché. Ils proviennent de deux semenciers, Advanta (Limagrain) et RAGT Semences.

« La résistance au virus TuYV est la dernière innovation dans l’amélioration des facteurs de stabilité du rendement dans nos hybrides restaurés, après la résistance à l’égrenage et celle au phoma, informe Jean-Éric Dheu, responsable recherche colza Ouest Europe chez Advanta. Nous menons un programme spécifique sur la résistance à la hernie et sur la meilleure utilisation de l’azote par le colza. Le TuYV (Turnip yellow virus, virus de la jaunisse du navet) est présent sur tout le territoire français comme le phoma. Selon diverses sources, son impact sur le rendement va de 3 quintaux/hectare à 30 % de pertes de rendement. »

Dans les résultats d’essais présentés par Advanta, la variété Architect montre un rendement moyen supérieur de 114,9 % par rapport à un témoin sensible au virus, cela dans des parcelles avec présence du parasite. « Dans les essais sans TuYV, notre variété garde un surplus de rendement de 104 % par rapport à un témoin de référence », ajoute Jean-Éric Dheu. Dans le tableau CTPS des nouvelles variétés de colza, Architect présente une cotation de 103,4 et un rendement moyen de 103,66 % des témoins sur deux ans. Advanta avait déjà inscrit une autre variété résistante au TuYV outre-Manche en 2015, Allison. « Plus de la moitié de nos variétés Advanta auront ce caractère à court terme », appuie Jean-Éric Dheu. Inscriptible en France en 2017 et déjà inscrit dans l’Union européenne, Angelico fait partie de la liste.

Un virus qui demande encore à être étudié

Le semencier n’est pas seul à présenter des variétés avec ce caractère car RAGT Semences propose Coogan, également résistant au virus. Coogan a été inscrit en Angleterre en 2016. « Il est TPS au phoma et montre une très bonne implantation à l’automne, communique RAGT Semences. Et en ce qui concerne le virus TuYV, les analyses de feuilles de colza prélevées sur l’ensemble du pays montrent que dans 90 % des parcelles, on retrouve sa présence. »

Cette donnée témoigne de l’importance du virus, omniprésent dans les parcelles de colza. Pourtant, selon Marine Sanouiller, chef de marché colza France et Benelux chez Dekalb, la résistance au virus n’est pas une problématique remontée du terrain. « Sa prédominance est connue. Ce qui compte pour nous, c’est le rendement de la variété et sa performance dans diverses conditions. Notre pépinière de matériel génétique servant à notre sélection variétale pour le colza n’est pas traitée. Il s’y opère déjà une sélection naturelle pour la résistance au virus. » Sous-entendu, les performances générales des variétés en termes de rendement prennent en compte les situations avec présence du virus en parcelles.

Terres Inovia avec l’Inra de Montpellier a initié une étude sur le virus TuYV. « Des feuilles sont prélevées sur deux variétés résistantes et sur des témoins sensibles au virus en fonction de la présence ou non de pucerons verts vecteurs de ce pathogène, détaille Jean-Pierre Palleau, Terres Inovia, qui ne prefère pas se prononcer sur les gains en rendement de variétés résistantes. Architect est testé par nos équipes dans le cadre du grand réseau national d’essais variétaux. Coogan et Allison le sont dans un réseau plus restreint. » Mais l’institut technique avance que le TuYV, bien que très présent dans les plantes, est peu préjudiciable au colza.

Les variétés Dekalb sortent du lot

Mais les colzas nouvellement inscrits dans le Catalogue officiel français se doivent d’apporter des performances significativement améliorées en rendement. Le semencier Dekalb reste bien campé dans sa position de leader avec plus de 50 % du marché français des semences. Sa variété DK Exception est la première cultivée avec plus de 10 % des semis en France. « Nous proposons cinq nouveaux colzas pour les semis 2017 dont trois inscrits en France, expose Marine Sanouiller. DK Exlibris est sortie à la première place dans les résultats CTPS avec une cotation de 106,8. C’est une variété demi-précoce présentant un très gros potentiel de rendement  avec une très bonne tenue de tige. C’est un hybride facile à conduire, performant en toutes conditions et qui s’est révélé très régulier en toutes régions. » DK Extenso est à peine moins bien noté dans le réseau CTPS avec une seconde place en cotation, ex æquo avec la variété Annapolis d’Advanta. « Il est très stable en toutes conditions, bien adapté notamment aux petites terres et peut-être à éviter dans les sols fortement azotées. DK Extenso se caractérise par une tolérance élevée au phoma grâce à une résistance qualitative et quantitative de par l’expression de plusieurs gènes », précise la spécialiste de Dekalb.

Troisième variété de Dekalb : « DK Exclamation montre une bonne implantation rapide avant l’hiver et se démarque de nos deux autres variétés par une bonne productivité en huile. » Dekalb met également sur le marche DK Extime, inscrit en Angleterre. Il est bien adapté aux climats froids et très tolérant au phoma. DK Execto est une inscription hongroise de type tardif montrant un bon profil de tolérance aux maladies comme un très bon comportement face à la cylindrosporiose.

Un premier hybride inscrit en France pour Caussade

Outre Architect, Advanta lance la commercialisation d’Annapolis, « hybride adapté à une large plage de semis et montrant un bon comportement de fin de cycle notamment vis-à-vis de la cylindrosporiose », communique la société. La variété Memori CS est le premier colza hybride inscrit par Caussade Semences au Catalogue français. « TPS (très peu sensible) au phoma, Memori CS présente la meilleure note de tolérance à cette maladie. Une implantation très rapide lui offre une bonne esquive face aux attaques d’altises », ajoute le semencier qui lance aussi la commercialisation de Zakari CS, une lignée (une exception dans un océan d’hybrides) qui se remarque par son profil sanitaire : TPS phoma et bon comportement vis-à-vis de l’orobanche.

Semences de France propose Topaze, une variété inscrite à 103,4 en cotation CTPS, demi-précoce, TPS au phoma et montrant « un excellent pouvoir de compensation ». Autre nouveauté qui provient d’outre-Manche : Muzzical, une variété précoce adaptée aux petites terres.

Halyn est une nouvelle variété commercialisée par KWS Momont montrant notamment un très bon comportement (TPS) au phoma et une teneur élevée en huile. Dualis, variété de l'obtenteur allemand DSV, a obtenu d’être retenue après une troisième année de test pour prouver ses caractéristiques de DHS (distinction homogénéité stabilité) auprès des instances officielles. Sa cotation est élevée, à 106,2 pour cette variété mi-tardive TPS phoma. Provenant du Catalogue français ou d’autres pays de l’Union européenne, les nouvelles variétés de colza répondent aux besoins variés des producteurs français.

Le virus TuYV est discret

Sur le colza, le virus TuYV est transmis par le puceron vert, Myzus persicae. Au champ, les symptômes du virus TuYV peuvent passer inaperçus. Les feuilles jaunissent, voire prennent une teinte violette sur leur contour au printemps. Mais dans ce cas, il ne faut pas confondre avec des symptômes de carences à l’automne-hiver (faims d’azote) ou de phytotoxicité aux sulfonylurées. Les plantes très atteintes sont réduites en taille. Beaucoup plus rares, deux autres virus peuvent toucher le colza.(1)¶

(1) Voir numéro 304 de notre revue, juillet-août 2016, page 38.¶

Deux nouvelles variétés contre la hernie

Croquet et SY Alibaba : ces deux nouvelles variétés de colza sont présentées comme « résistantes à certains pathotypes de hernie des crucifères (Plasmodiophora brassicae) ». « On augmente la gamme disponible contre cette maladie, se réjouit Jean-Pierre Palleau, Terres Inovia, et nous avons donc au total huit variétés présentant des caractères de tolérance au pathogène. » Commercialisée par RAGT Semences, Croquet est une variété demi-tardive qui est très peu sensible au phoma (TPS) ainsi qu’aux pieds secs.

Variétés résistantes à deux pathotypes

SY Alibaba a été déposée à l’inscription par Syngenta Seeds qui dispose déjà de SY Alister pour les situations infestées en hernie. Ces variétés sont résistantes aux pathotypes P1 et P3 de la hernie. Mais dans les champs touchés par la maladie, on ne connaît pas a priori les pathotypes présents ou dominants. L’utilisation de ces variétés ne garantit pas une résistance dans toutes les situations. En outre, le pathogène a plus ou moins d’impact selon les conditions climatiques de l’automne. La stratégie de lutte dans les zones infestées consiste à mélanger un hybride résistant à une variété conventionnelle pour répartir les risques d’impact sur le rendement.

Voir numéro 303 de notre revue, juin 2016, pages 32-34

Le High Oleic bat de l’aile

Il y a deux ans, on voyait un fort développement des colzas High Oleic (Holl) chez Monsanto-Dekalb. « 20 000 hectares de ce type variétal avaient été cultivés il y a deux ans. Cette année, il n’y en a que 5000 hectares. La raison en est la concurrence du tournesol oléique avec les prix très bas de son huile », explique Marine Sanouiller, Dekalb. Le semencier est le seul en France à proposer ce type de variété. « 25 % de nos programmes de recherche en colza sont sur le High Oleic, précise Marine Sanouiller. Mais le marché ne nécessite pas de nouveaux produits. Notre nouvelle variété V331OL ne sera pas commercialisée cette année. » Un peu meilleure en cotation et en rendement, la variété V324OL devrait l'être. Pour rappel, l’huile extraite de colza Holl présente une forte tenue aux températures élevées qui la destine à des filières comme la friture mais aussi le goudron, les biocarburants, la cosmétique…

Les variétés de colza Clearfield continuent à défrayer la chronique localement avec encore des parcelles d’expérimentation détruites par l’action des Faucheurs volontaires, la dernière le 15 avril 2017 en Côte-d’Or. Malgré tout, l’utilisation de ce type de variétés résistantes à des herbicides contenant de l’imazamox (Cleravis et Cleranda) a ses adeptes. « La surface est de 23 000 hectares en France et les colzas Clearfield progressent dans l’Union européenne », affirme Marine Sanouiller, Dekalb. Ces variétés ne sont à utiliser que dans des contextes de désherbage problématiques dus à des flores complexes comme de fortes infestations en géranium et crucifères. Les variétés Clearfield ne foisonnent pas cependant sur le marché français. Dekalb, qui est leader en la matière, en propose cinq mais pas de nouvelles pour les semis 2017.

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