Des matières premières encore tirées vers le bas en 2016


Créateur et coordinateur du rapport Cyclope qui analyse chaque année le marché des matières premières, Philippe Chalmin n'est pas optimiste. Le titre de l'édition 2016 de son ouvrage, « À la recherche des sommets perdus », est assez éloquent. « Rarement, la tendance sur les marchés mondiaux des matières premières et de commodités aura été aussi marquée qu'en 2015, écrivent les auteurs. Pratiquement tous les marchés se sont inscrits en baisse, et celle-ci est en général très forte. » Les cours de nombreuses matières sont ainsi revenus fin 2015 au niveau de 2004 ou 2005. Un terme est mis « au cycle de fortes tensions qui avait justement débuté à cette époque et qui aura duré un peu moins de dix ans, soit à peu près le temps de l'investissement », signale l'ouvrage.
Pas de facteur de reprise visible
Aucun facteur ne laisse penser qu'une vraie reprise aura lieu en 2016. Cyclope envisage donc une nouvelle baisse de presque toutes les matières premières, à quelques exceptions près comme le sucre, dont les cours profitent d'un déficit mondial, ou le riz. Pour les spécialistes de Cyclope, l'un des problèmes réside dans l'entêtement des producteurs à augmenter la production indépendamment des signaux du marché, et dans leur capacité à encaisser les baisses de prix. Le fret en est un exemple. L'indice du Dry Baltic index, qui évalue la santé du vrac sec, a atteint en 2015 son plus bas niveau depuis 1984. Les coûts opérationnels d'un bateau ne sont plus couverts, mais « il n'est pas certain que le vrac sec ait encore atteint son plancher », estime le rapport. La flotte mondiale pourrait donc conserver ses effectifs en 2016.
En blé comme en maïs, le contexte n'est pas si différent. Cyclope prévoit des récoltes mondiales globalement encore excédentaires, alors même que les stocks sont très élevés. Le maïs pourrait en plus souffrir de la baisse de la demande chinoise, le pays cherchant à limiter ses importations. En soja, la Chine devrait continuer à importer, mais les bonnes perspectives de récolte en Amérique latine ainsi que la libéralisation des exportations argentines sont de nature à tirer les prix vers le bas. Difficile de se réjouir, à moins de changer de point de vue : " cette année encore, la faim et la pauvreté ont régressé dans le monde », indique l'édition 2016 de Cyclope.