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Produits phytosanitaires
Des études rares sur des molécules omniprésentes

Les enquêtes et déclarations montrant du doigt les produits phytosanitaires se multiplient. Les pesticides sont mis en cause dans des troubles de la santé ou dans la pollution de l´environnement. En France, les études sont récentes et peu nombreuses.


Résidus dans les produits de consommation ou dans l´eau, suspicions sur les effets sur la santé, impact sur la faune sauvage... les consommateurs s´inquiètent de l´utilisation des pesticides. Il est vrai que, de par le monde, des cas de pathologies voire de mortalité due à leur utilisation « incontrôlée » existent.
En France, l´emploi des produits de traitement fait l´objet de quelques études de la part de la recherche médicale. Le docteur Luc Multigner de l´Inserm(1) à Rennes en a conduit une sur la fertilité masculine des ouvriers agricoles du secteur bananier en Guadeloupe.

« Les produits utilisés sur la banane sont principalement des carbamates et organophosphorés, des molécules assez agressives. Le groupe d´ouvriers exposés a été comparé à un groupe de salariés non exposés. Il n´a pas été décelé de différences significatives sur les paramètres de fertilité masculine. Mais pour les applicateurs travaillant depuis plus de quatorze ans, il y a des conséquences négatives (non significatives) sur le nombre de spermatozoïdes. L´explication pourrait venir de l´utilisation dans les années 90 de produits connus pour leurs effets sur la fertilité comme le chlordécone. Ces produits sont interdits actuellement. »
Dans l´Hexagone, on en est aux prémices d´études d´effets des produits phytosanitaires. Toujours à l´Inserm en Bretagne, Sylvaine Cordier mène une étude d´impact de produits phytosanitaires sur la grossesse et le développement de l´enfant, avec le suivi de quelques milliers de femmes enceintes. L´étude vise l´atrazine en particulier. Les premiers résultats seront présentés fin 2006.
©A. Gagneux


Quelques études médicales en métropole
En début d´année, le professeur Sultan (Montpellier) avait déclaré que la population du Languedoc-Roussillon était atteinte plus que la moyenne par des phénomènes de micro-pénis, de testicules mal descendus à cause des produits de traitement agricole. Cette déclaration a fait grand bruit avant que l´on apprenne que ces travaux n´avaient reçu aucune validation scientifique.
« Sur les cancers en milieu agricole, très peu d´études sont menées en France. » C´est le constat de l´Arc, l´association pour la recherche sur le cancer. Elle rapporte que « les études menées en Amérique du Nord et en Europe du Nord montrent que la mortalité par cancer, tous cancers confondus, est moins élevée chez les agriculteurs que dans le reste de la population. Mais certains cancers seraient plus fréquents comme ceux de la peau, de la prostate, les tumeurs cérébrales... » Le lien de cause à effet reste à établir.

Au Grecan(2) à l´Université de Caen, différentes études ont été mises en place depuis 1995 afin d´étudier le risque de cancer en milieu agricole en relation avec l´utilisation professionnelle de pesticides, de même qu´à l´Université de Bordeaux en viticulture.
Sans ignorer les problèmes à moyen ou long terme, le risque utilisateur est un problème plus immédiat et concret. En 1997, la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole (CCMSA) a mis en place un réseau de toxicovigilance agricole avec pour objectif d´enregistrer, de caractériser et d´analyser les troubles liés à l´emploi des produits phytosanitaires.

Toxicovigilance pour les salariés agricoles
« Entre 1998 et 2001, le nombre de signalements a diminué en passant de 281 à 118. On peut y trouver plusieurs origines. L´un des facteurs peut être la moindre toxicité aiguë des produits actuellement mis sur le marché », explique Jean-Pierre Grillet, CCMSA. Le réseau de toxicovigilance ne s´applique qu´aux salariés agricoles. Mais depuis le 1er avril 2002, la MSA prend en charge la prévention des risques professionnels des non-salariés comme les chefs d´exploitation.
Plus que de remettre en cause l´utilisation des produits phytosanitaires, les travaux de la MSA visent surtout à éveiller l´attention des applicateurs sur une bonne protection et des manipulations dans un minimum de risques.

« Nous étudions de près les pratiques des agriculteurs. Pour la campagne 2002-2003, nous avons mesuré l´exposition aux dithiocarbamates (famille de produits) de producteurs de grandes cultures et de vigne, décrit Jean-Pierre Grillet. Nous constatons que la contamination de l´applicateur est liée à des problèmes d´organisation du travail et de gestion des produits. Nous sommes en train de définir un protocole dans la façon de s´organiser dans la préparation des bouillies et des applications pour minimiser les contacts avec les produits. Bien respecter ce protocole nécessiterait une formation des applicateurs. C´est pourquoi, à la CCMSA, nous sommes partisan d´un ´permis de traiter´ résultant d´une formation. »
Pour le Grecan, le docteur Pierre Lebailly a également commencé en 2000 un tel type d´étude intitulée Pestexpo. Il s´agit d´observer l´utilisation d´un produit herbicide, l´isoproturon, par des agriculteurs du Calvados et mieux prendre en compte les différents types d´exposition lors des différentes phases du traitement. La meilleure façon de ne pas voir d´effets indésirables des pesticides pour la santé, c´est d´éviter leur contact.


(1) Institut national de la santé et de la recherche médicale.
(2) Groupe régional d´études sur le cancer.




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Cet article est extrait du dossier de Réussir Céréales Grandes Cultures de décembre 2003. Sous le titre «  Virage à négocier pour les phytos  », la revue explique que le secteur de la protection des cultures est soumis aux pressions de l´opinion publique, aux contraintes économiques, réglementaires, environnementales, et n´échappe pas à une remise en question. (RCGC nº165, 20 pages)
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