Désherbage des céréales
Des alternatives de lutte plus efficaces que les herbicides
Déchaumages, faux-semis, implantations retardées, labours, diversification des cultures dans la rotation, destruction mécanique des adventices… le désherbage ne se résume pas qu’aux traitements chimiques.
Détruire les adventices à l’interculture
Les déchaumages sont très efficaces pour faire lever la majorité des graminées annuelles parmi lesquelles les vulpins et ray-grass. « Ces espèces présentent généralement une faible dormance et le vulpin germe très facilement après une reprise du sol », confirme Bruno Chauvel, de l’Inra de Dijon. Ludovic Bonin et Jérôme Labreuche, Arvalis, ont mené une étude sur l’impact de différents types de déchaumage sur le contrôle des adventices. « Les résultats montrent que les déchaumages superficiels et rappuyés sont les plus efficaces pour faire lever les adventices alors que les travaux plus profonds ont peu d’effets sur ces levées. » Travail du sol superficiel suivi d’un roulage par exemple pour rappuyer la terre s’apparentent à un fauxsemis à l’efficacité optimale pour faire lever les adventices. La météo joue également son rôle puisqu’il faut nécessairement de l’humidité pour permettre ces levées. La destruction des adventices se fera mécaniquement au passage d’un matériel ou chimiquement par traitement avec un herbicide total.
Retard de semis
Les céréales sont mises hors de portée des levées de graminées en retardant le semis. La stratégie libère du temps pour des faux-semis efficaces et permet de mieux faire concorder la date de mise en oeuvre de cette méthode de lutte avec les périodes de levée préférentielle des graminées. Ainsi en Bourgogne, le décalage d’un semis de blé du 1er octobre au 15- 20 octobre facilite la destruction de la majorité des vulpins levés avant l’implantation de la culture. Sur ray-grass, un essai Arvalis montre qu’un semis simplement retardé de dix jours (du 24 octobre au 4 novembre) permet une diminution de 50 % de la pression de cette mauvaise herbe. « À la clé, il est possible alors d’économiser sur les traitements herbicides d’automne en raison de la moindre levée d’adventices dans la culture, » relève la chambre d’agriculture de Bourgogne.
Améliorer le pouvoir concurrentiel des céréales
« Le choix d’un semis dense, jusqu’à 400 grains au m2 au 25 octobre associé à un écartement plus faible entre les rangs, limite l’entrée de la lumière au niveau du sol et donc la levée des adventices. On peut se permettre cette technique en Côte-d’Or dans la mesure où la pression maladie est moins préjudiciable que dans d’autres régions », précise Nicolas Munier- Jolain, Inra Dijon, reconnaissant par là que ce n’est pas la panacée. Les variétés de blé ne sont pas égales face à la concurrence des mauvaises herbes. « On relève cinq fois plus de biomasse d’adventices sur un blé de la variété Caphorn que sur un Virtuose », présente Nicolas Munier-Jolain. Des variétés à fort tallage couvrent le sol plus rapidement et limitent le développement des adventices. Des essais FSOV(1) sont menés sur la r e c h e r c h e des meilleures variétés concurrentielles de blé et Cézanne serait un bon candidat combinant ce caractère avec de bons niveaux de qualité et de rendement. Les associations céréales-protéagineux offrent un fort pouvoir concurrentiel largement mis à profit dans les itinéraires bio.
Retournement du sol profond
Il est connu de longue date que le labour a un effet destructeur sur les mauvaises herbes en enfouissant en profondeur les semences. Cela vaut pour les espèces à taux annuel de décroissance (TAD) élevé de leurs semences comme le vulpin, le brome, le ray-grass… et pour celles qui ne germent que dans les premiers centimètres du sol. « En dessous de 3 cm, le vulpin ne germe quasiment plus. En revanche, la folle-avoine est capable de germer en profondeur, entre 5 et 10 cm », précise-t-on à l’Inra. Le labour est donc un élément important de gestion de la flore adventice. Un essai en Bourgogne montrait dans un blé sans labour une population de vulpins de 1 375 pieds au m2 contre « seulement » 102 pieds au m2 dans un blé après labour. C’est dire l’efficacité de la technique.
Diversification des dates de semis
La rotation culturale influe sur la présence des mauvaises herbes de façon évidente. « Dans la diversification des cultures dans la rotation, ce qui est important c’est la diversification des dates de semis. L’idée est d’éviter d’avoir une génération tous les ans d’une même flore adventice qui aurait pour effet d’augmenter le stock semencier de ces espèces, explique Nicolas Munier-Jolain. Il faut faire en sorte d’augmenter la durée entre deux générations successives en jouant sur les dates de semis des cultures. Une rotation idéale serait la succession d’une culture d’automne implantée à la fin de l’été comme le colza, d’une céréale d’hiver semée à l’automne, puis d’une culture d’été semée au printemps (maïs, soja, tournesol), une céréale d’hiver, une culture de printemps ensemencée en sortie d’hiver (orge, protéagineux, betterave) et à nouveau une céréale d’hiver semée tard. » L’alternance de dates de semis évite de sélectionner une flore adventice (par exemple, les graminées à levée préférentielle d’automne) plus qu’une autre. Diversifier les cultures dans la rotation permet de bénéficier également des solutions herbicides propres à chaque culture en se permettant d’alterner les familles chimiques à bon escient pour contrer les risques de développement de populations résistantes d’adventices.
C. G.
(1) Fonds de soutien aux obtentions végétales
LUTTE MÉCANIQUE
Herse étrille sur céréales
Sur céréales, la herse étrille et la houe rotative sont les outils les plus appropriés pour passer dans la culture sans trop endommager les plants. Les conditions de réussite d’un passage de herse étrille sont un temps sec, une infestation modérée d’adventices, une vitesse élevée de passage (8 à 12 km/h) avec les bons réglages… La herse étrille s’avère efficace surtout sur les dicotylédones, moins sur les graminées.