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Comment anticiper l’apparition des troubles musculosquelettiques

Se préserver des accidents, c’est aussi rester en bonne santé et ne pas « s’user trop vite ». Comment ? En veillant à prévenir les troubles musculosquelettiques, principale cause des maladies professionnelles détectées chez les exploitants.

Le port de charges lourdes peut déclencher des TMS.
© J.-C. Gutner/Archives

Monter et démonter des pneus de tracteur à la main, porter des bidons de phytos, des sacs de semences, rester assis des heures dans son tracteur en surveillant régulièrement son attelage ou passer la journée devant son ordinateur… Le secteur des grandes cultures ne fait pas exception : les troubles musculosquelettiques (TMS) y sont nombreux, causés par des actions répétitives, des vibrations dans le corps ou des charges lourdes. Les statistiques de la MSA donnent un aperçu des causes et des pathologies chez les exploitants et les salariés (voir En chiffres). Elles ont probablement tendance à sous-estimer les difficultés, tous les problèmes ne faisant pas systématiquement l’objet d’une déclaration à la MSA, en particulier chez les non-salariés.

Un enjeu autour du positionnement des commandes dans la cabine

La question est en tout cas prise en compte sérieusement par les constructeurs de matériel. « Le tracteur idéal ne doit pas faire mal ! résume Cristina Ilenescu, ingénieure spécialisée dans l’expérience utilisateur pour Massey Fergusson. Idéalement, il faudrait, dix ans après l’achat, en sortir comme d’un spa… ! » Arrivée depuis trois ans chez le constructeur, cette spécialiste en ergonomie cherche à comprendre comment les agriculteurs utilisent les machines via des entretiens, des questionnaires, des observations. « Dès que l’on voit une posture qui n’est pas optimale, on s’interroge, décrit-elle. Sur le court terme, une mauvaise position ne dérange pas l’utilisateur, mais au bout d’un an ou plus, le corps change et c’est là que les douleurs apparaissent. » La spécialiste travaille sur des sujets aussi divers que l’ergonomie de la poignée de la porte du tracteur ou la taille des caractères de l’écran tactile dans la cabine. « Il y a des normes, mais elles ne sont pas adaptées à la conduite en tracteur, où le texte est lu dans un environnement qui bouge », indique-t-elle par exemple. Dans la cabine du tracteur, les efforts portent beaucoup sur les commandes. « Nous travaillons sur leur positionnement, signale Régis Gaydon, ingénieur en R & D chez Claas. Nous essayons d’avoir de plus en plus de réglages sur la colonne de direction pour adapter le poste de conduite à la taille de l’utilisateur. Nous intégrons également beaucoup de commandes au niveau de l’accoudoir multifonctions sous la main droite du chauffeur. Nos modèles présentent de plus en plus souvent un écran interactif à ce niveau afin de réduire les efforts de manipulation et les stress. » « On ne se limite pas aux aspects physiques, on considère aussi les aspects cognitifs et émotionnels », complète de son côté Cristina Ilenescu. Pour Régis Gaydon, cela passe par la prise en compte de la « charge mentale » de l’utilisateur avec, entre autres, la technologie CSM (Claas sequence management). Capable d’enregistrer une séquence d’opérations, elle permet par exemple de gérer les bouts de champs : appuyer sur un bouton enclenche automatiquement le relevage de la charrue, le changement de vitesse etc. « Le conducteur a moins de mouvements à faire et moins de stress », explique l’ingénieur. La place dans la cabine est également objet de réflexion. « Nous allons vers un plus grand battement angulaire vers la droite pour faciliter la surveillance des outils », signale Régis Gaydon.

Un lien étroit avec la façon de réaliser l’activité

Pour Arnaud Desarmenien, en charge de cette problématique à la CCMSA (Caisse centrale de la MSA), la prévention doit aller au-delà de ces aménagements techniques : « le réglage du siège dans les engins de transport, on y pense tout de suite. Mais la prévention des TMS, cela passe aussi par l’état du sol, l’itinéraire que va faire le tracteur ou l’automoteur, précise-t-il. Il vaut mieux passer par des chemins moins défoncés. De même, tout ce qui est mis en place pour la maintenance du véhicule compte, notamment sur la transmission ». Pour le spécialiste, « les risques sont liés à l’activité, à ce qui est réalisé ». Ainsi, porter une charge lourde n’est pas automatiquement générateur de TMS. Tout dépend de la façon dont on s’y prend. « Il vaut mieux se servir de tout son corps, ce qui est plus facile si la charge est propre, non coupante, ni chaude ni froide, dépeint-il. L’environnement a aussi un rôle : un cheminement semé d’embûches sera plus compliqué. » Plus généralement, le spécialiste préconise des temps de repos dans les activités peu physiques mais statiques. « Le corps n’est pas fait pour faire quelque chose de long et de statique, signale-t-il. Il faut veiller à se ménager des moments de récupération. Arrêter son véhicule 30 secondes en bout de champ et faire un mouvement de relaxation permet par exemple d’évacuer les tensions musculaires. » Pour Arnaud Tran Van, ergonome européen pour la société Ancoe, le sujet est en tout cas crucial lorsque l’on a des employés : « un salarié qui déclare un TMS avéré, c’est le symptôme de difficultés en amont que l’on n’a pas su gérer. Prévenir les TMS sur sa ferme, c’est aussi préserver sa main-d’œuvre, dans un contexte où elle est souvent difficile à recruter ».

En chiffres

Des troubles très répandus

88 % des maladies professionnelles reconnues avec et sans arrêt pour les non-salariés agricoles sont des troubles musculosquelettiques, ce chiffre montant à près de 96 % chez les salariés agricoles

83,4 % de ces TMS sont des affections périarticulaires concernant principalement l’épaule et le canal carpien mais aussi, le rachis, le coude, ou le genou

80 % de ces troubles sont dus à des mouvements ou à un travail répétitif et près de 12 % au port de charges

450 TMS ont été enregistrés en 2015 chez les exploitants en grandes cultures, moins touchés par ces pathologies que les éleveurs (un peu plus de 1 600 cas chez les éleveurs de bovins laitiers)

Source : MSA, bilan national 2011-2015

Surveiller son siège de tracteur

Sachez-le : le siège du conducteur se change, particulièrement sur les tracteurs un peu anciens. « Le siège est une pièce d’usure sur les tracteurs, estime Fabien Dumaire, à la MSA de l’Aisne. Au bout de 5 à 6000 heures de conduite, le compresseur mécanique est moins performant, le chauffeur vient talonner en butée haute ou basse. On préconise le remplacement du siège. Je pousse sur un siège pneumatique à basse fréquence ». Les prix vont de 1 400 à près de 6 000 € en fonction de la qualité de régulation de l’amortissement. Si changer son siège n’a rien d’obligatoire, il n’en reste pas moins que c’est un moyen efficace de réduire les vibrations du corps entier, sources de TMS.

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