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Noix : une stratégie de taille adaptée à la variété

La plantation en haute densité de vergers de noyers nécessite une taille sévère pour rouvrir le verger et maintenir le calibre des fruits. La Senura étudie la meilleure méthode à appliquer selon la variété.

LA TAILLE DES ARBRES EN PEUPLIER est la première étape d’une diminution par deux de la densité d’un verger de noyer.
© SENURA

« Les plantations de noyers en haute densité ont pour avantage une mise à fruit rapide et des rendements supérieurs les premières années », recontextualise Marianne Naudin, chargée d'expérimentation à la Senura (Station d’expérimentation nucicole Rhône-Alpes, Isère). Mais au bout de quelques années, les vergers se ferment. Le manque de lumière et la concurrence entre les arbres entraînent une diminution de calibre, des problèmes sanitaires accrus et au final une baisse du rendement. Pour redonner un second souffle à ces vergers, la Senura teste deux types de taille sévère, l’une au lamier et l’autre par suppression d’un arbre sur deux (cf. encadrés). Ces deux modalités sont comparées à une taille d’entretien classique consistant à nettoyer le bois mort. « Mais la réponse du noyer à la taille n'est pas la même d'une variété à une autre », précise l’ingénieure noix. La même procédure peut aboutir à des résultats différents selon qu'il s'agisse d'un Franquette ou d'un Fernor. Le premier étant plus vigoureux que le second, il reprend plus rapidement sa place. D’où le suivi des mêmes techniques de taille sur ces deux variétés. « Même s'ils n'ont pas encore été menés à leur terme, ces essais ont déjà révélé quelques résultats », avance Marianne Naudin.

De meilleurs calibres après une taille sévère

Sur Franquette, la restructuration du verger en verger basse densité, soit un passage d’un verger de 179 arbres/ha à 90 arbres/ha est encore en cours. La suppression définitive d’un arbre sur deux est prévue l’année prochaine. « La taille en peuplier des arbres supprimés à terme a débuté il y a cinq ans. Nous n'avons, pour l'instant, pas constaté de baisse des rendements par rapport à la taille classique », note l’ingénieure. En matière de calibres, ils sont plus importants sur cette modalité et celle de la taille mécanique que sur la conduite traditionnelle. Sur l'essai de taille mécanique, un premier côté du rang a été rabattu au lamier durant l'hiver 2011-2012, en 14ème feuille. Puis, l’autre côté cette année. Les rendements cumulés sur cinq ans sont en baisse de 12 % par rapport à la taille classique. « Cette variété vigoureuse et à fructification sur brindille terminale a tendance à faire du bois au détriment de la production de fruit sur ce type de taille », avance la spécialiste. L’inter-rang taillé mécaniquement s’est très vite refermé.

Un meilleur rendement sur Fernor taillé au lamier

La taille mécanique donne des résultats intéressants sur Fernor. Le premier passage de lamier a eu lieu en 2013 et le second en début d’année. Contrairement à Franquette, Fernor a une fructification sur brindille latérale. Elle se remet à fruit plus rapidement après les coupes mais celles-ci sont visibles beaucoup plus longtemps. Trois ans après la première taille, un gain de rendement s’observe sur cette modalité par rapport à la taille classique. En quatre ans, le coût de la prestation taille mécanique a été rentabilisé. En revanche, la restructuration par retrait d’un arbre sur deux dans un verger planté à 358 arbres/ ha, n’est pour le moment pas satisfaisante. Cette opération a été initiée très tôt, en 2002, alors que le verger n’était qu’en 5ème feuille. La phase finale de suppression d’un arbre sur deux a été effectuée en 2010. « Mais pour l’instant, la modalité haute densité taille classique reste la plus rentable, expose Marianne Naudin. Les temps de travaux pour restructurer n’ont pour l’instant pas été compensés par l’augmentation de la production qui s’observe depuis seulement trois ans ». Cependant à long terme, la tendance devrait s’inverser. La production continuant d’augmenter sur la partie basse densité alors qu’elle est en train de diminuer sur la partie haute densité. « C'est une solution à envisager dans le long terme, car elle peut présenter un bénéfice à partir de 15 à 20 ans », reconnaît-elle.

Isabelle Brenguier

" La réponse du noyer à la taille n’est pas la même d’une variété à une autre "

MARIANNE NAUDIN, chargée d’expérimentation à la Senura

Taille au lamier

La modalité mécanique consiste à une taille sévère avec un lamier, un inter-rang sur deux. La taille de l’autre inter-rang est réalisée cinq ans après. Ce type de taille peut surprendre. A regarder, elle est impressionnante et ne fait pas dans le détail. Les nuciculteurs venus assister à la démonstration proposée par la Senura ne sont d’ailleurs pas restés indifférents. « Cela va plus vite et c’est plus facile qu’à la perche. Mais je trouve que c’est assez agressif », note Jean-Claude Matras, nuciculteur à Saint-Romans. « C’est sûrement une bonne pratique. Il faut voir comment les nouvelles variétés réagissent », ajoute-t-il. Ces tailles sévères peuvent être difficiles à accepter par les producteurs. Pascal Blunat, producteur de noix à L’Albenc, le reconnaît : « Nous avons toujours peur de trop couper. Mais cela peut sûrement s’avérer être une solution dans certains vergers ». Le lamier pèse dix tonnes. Il peut monter jusqu’à dix mètres si la surface est plate. « C’est une solution à envisager quand un verger est refermé car il permet de faire une coupe sévère nécessaire pour l’aérer », explique Marianne Naudin, de la Senura. La taille au lamier représente un coût de 60 à 150 €/h avec des temps de travaux de 7 h/ha, sans la gestion du bois (30 à 40 h/ha). A noter, qu’il s’agit d’une estimation correspondant au travail réalisé dans des conditions d’expérimentations et non de production.

Suppression d’un arbre sur deux

L’essai de restructuration consiste à supprimer un arbre sur deux, de façon à diminuer la densité de la parcelle. « Mais cette opération ne peut se faire en une seule fois, car les arbres restant se chargeraient trop et leurs branches pourraient se casser », explique Daniel Delaigue, responsable d’exploitation de la Senura. Cela se fait donc en huit ans, en trois étapes. « Nous avons procédé à une première taille très sévère "en peuplier" d’un arbre sur deux, de manière à donner du jour. Nous reproduisons cette démarche trois ans après sur les mêmes arbres. Dans trois ans, nous les abattrons », ajoute Daniel Delaigue, installé dans une nacelle, une élagueuse en main, pour montrer la technique. « Il ne reste pas grand-chose de l’arbre. Il produira des grosses noix, mais en faible quantité », reconnaît le technicien. Le temps total passé sur le verger de Fernor par le technicien de la station s’élève en moyenne à 45 h/ha par an sur huit ans, comprenant le temps de taille et de gestion du bois.

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