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Bio
Les légumes en agriculture bio : quels marchés, et quels verrous techniques à lever ?

L’Itab et le CTIFL ont fait le point sur le marché des légumes bio et donné quelques exemples concrets. La loi AGEC posera souci à l’offre bio. La patate douce origine France a encore de la place à prendre en rayon. Le potimarron peut être conservé plus de cinq mois grâce à un trempage à l’eau chaude en post-récolte.

 

© Capture d'écran - FLD/CTIFL Itab

Le 11 mars, le CTIFL et l’Itab ont tenu un deuxième webminaire sur les légumes en agriculture biologique, afin « de mettre en évidence des résultats récents tant en production qu’en post-récolte et applicables dans un court terme afin de permettre aux producteurs, techniciens, chercheurs…  de lever certains verrous et de continuer à se développer sur ce segment ». « Associées à des données de marché, ces présentations donnent une vision d’avenir aux producteurs », soulignent Juliette Pellat du CTIFL et Mathieu Conseil de l’Itab, qui ont coprésenté ce webinaire.

Le bio tire le marché, les surfaces bondissent, surtout en légumes secs

Les surfaces de légumes bio en France ont atteint 60 000 ha en 2019, dont 35 000 ha en légumes frais et 24 000 ha en légumes secs, ce qui représente 8 % de la SAU en légumes frais et des surfaces qui ont triplé en 10 ans. « Mais le dynamisme s’observe surtout en légumes secs, dont les surfaces en bio ont été multiplié par 8 en dix ans, avec une répartition de deux tiers en lentilles, un tiers en pois chiche, souligne Xavier Vernin du CTIFL. J’ai aussi noté un très fort développement dans les pois chiches ces dernières années. »

En parallèle, côté consommation, le bio représente 6 % du marché alimentaire (11,3 Md€ de chiffre d’affaires selon l’Agence Bio sur un marché alimentaire total de 187 Md€ selon l’Insee). En fruits et légumes frais, le bio, avec 1,87 Md€, représente 9 % du marché. Les fruits et légumes frais représentent donc 11% du marché alimentaire, tandis que les fruits et légumes bio représentent 17 % du marché alimentaire bio. C’est le premier secteur sur le frais alimentaire bio, et le deuxième secteur alimentaire après l’épicerie. Le différentiel de prix est une réalité, il va de 0,40€/kg en chou-fleur à 1,10€/kg en tomate.

« Enfin, en 2020 année atypique, la hausse des achats de légumes a été tirée par un report de la RHD vers la consommation à domicile lors des deux confinements, et cette tendance est aussi vraie en bio qu’en conventionnel », conclut Xavier Vernin.

 

Loi AGEC : une offre bio majoritairement préemballée, ce qui va poser problème

L’ensemble des circuits de distribution propose désormais une offre de légumes bio, avec une présence installée dans les circuits généralistes de plus de 400 m2 (entre 90 et 95 % en proposent) et forte dans la proximité (60 %). Près d’un primeur sur deux commercialise du bio.

L’offre préemballée est très présente dans les circuits généralistes de la grande distribution (plus de 80 %). Tous circuits confondus, le vrac représente 40 % des conditionnements, la barquette 17 %, le sachet 13 %, la pièce 13 %, le filet 12 %... Cette question du vrac et du préemballé est primordiale, puisqu’elle fait l’objet d’obligations réglementaires : pas de certification du magasin si les achats en vrac sont inférieurs à 10 000 €/an alors qu’il n’y a pas de notification pour le préemballé. Et le vrac suppose des contraintes d’organisation : besoin d’isoler les produits bio en rayon pour éviter la confusion, risque de démarques et de pertes de valeur accrue en libre-service. « Il y a donc un fort impact de la loi AGEC à prévoir, avertit Arnaud Magnon du CTIFL. Le préemballé ou stické représente 60% de l’offre en magasin. Et 90% des références emballées sont inférieures à 1,5 kg donc concernées… »

En effet, la loi AGEC, votée le 10 février 2020, prévoit entre autre au 1er janvier 2022 l’interdiction de la vente de f&l frais non transformés (c’est-à-dire la Ière gamme) en conditionnement plastique inférieur à 1,5 kg. « Un décret va paraître sous peu avec la liste des fruits et légumes exemptés car considérés comme fragiles en rayon ; mais à termes tous les fruits et légumes seront concernés par l’interdiction », souligne Valérie Mérendet du CTIFL. La loi prévoit aussi, au 1er janvier 2022, la fin des étiquettes fruits et légumes (stickers) sauf s’ils sont compostables domestiquement et en matière biosourcée tout ou partie. « Donc selon les définitions officielles, l’impact va être plus fort qu’anticipé puisque des barquettes en cellulose ou carton PLA ne seraient pas autorisés, la question se poste pour certains papiers et celluloses en fonction d’un traitement par le fabricant…  Il existe des solutions pour les barquettes : en carton et cellulose non traitées, en pulpe de coton, etc. Mais côté stickers, aujourd’hui il n’existe pas sur le marché des stickers home compostable ; il y a des solutions de marquage au laser ou à l’encre alimentaire mais aucune solution pour le bio. »

La patate douce, l’étoile montante du rayon bio

La patate douce a le vent en poupe. Mais quel est son potentiel de production ? Et son potentiel de commercialisation ? « C’est une culture onéreuse et risquée, avec un coût de production entre 2 et 2,5 €/m2 en fonction des régions, là où l’on est à 0,60 à 1€ pour la carotte ou 1,60 € pour le poireau, mais un rendement très bon : 2 à 3 kg/m2 commercialisables, résume Maxime Davy. L’équilibre technico-économique est donc atteignable mais il y a des paramètres à valider localement avant de se lancer : variétés, densité et date de plantation et de récolte, besoins en eau… ainsi qu’une mécanisation à adapter. A souligner : on manque de références sur le potentiel de conservation. »

En parallèle, le marché explose. Comme l’explique Aranud Magnon, la patate douce est bien installée dans les points de vente disposant d’une offre moyenne à grande. Et la patate douce est un basique de l’offre en magasin bio. Par ailleurs, le taux de présence du bio dans l’offre globale avoisine celui de la carotte (23 %) mais reste inférieur à la nouvelle star qu’est le potimarron (38 % de l’offre en bio). Le développement variétal se met aussi en place (couleur de la chair, de la peau), avec dans les grands points de vente plusieurs références proposées (variétés, bio ou conventionnel). « Il y a donc un réel potentiel de segmentation, auquel s’ajoute l’origine. L’offre n’est pas totalement couverte par l’origine France en saison, seulement 60 %, en bio comme en conventionnel. L’écart de prix entre le bio et le conventionnel est de 4 à 5 €/kg, soit 25 %, comme pour les autres légumes. S’il existe un décalage entre l’import et le français, l’import va s’aligner sur le prix de l’origine France. On a donc une offre française qui peut donc encore prendre de la place sur le marché. »

Post-récolte : rallonger la conservation du potimarron par le trempage à l’eau chaude

Le potimarron est produit tendance avec une demande en forte hausse. Le bio représente 38 % de l’offre en potimarron. En production, il n’y a pas de contraintes techniques particulières. En revanche, la conservation s’avère difficile au-delà de trois mois, avec l’apparition de pourritures, en bio comme en conventionnel. C’est donc un enjeu économique sur lequel s’est penché le CTIFL dans le projet OPTI-POT démarré en 2018.

Un premier constat : l’importance d’anticiper la récolte pour améliorer la conservation, tout en évitant la sous-maturité. Au-delà de cette approche au champ, les chercheurs se sont intéressés au traitement post-récolte de désinfection par trempage à l’eau chaude. « Nous avons observé qu’un traitement de 2 min à 58°C ou 60°C permet d’allonger significativement la conservation de deux-trois mois au moins, résume Patricia Sanvicente du CTIFL. Mais il y a une perte d’eau du produit à vérifier. Nous allons poursuivre les essais et tester la technique de douchage plutôt que de trempage. En 2021 le projet s’intéressera aussi aux conséquences sur la qualité organoleptique avec le suivi de l’évolution des sucres. »

La technique de trempage à l’eau chaude a aussi été testée dans un autre projet pour limiter le rosissement post-récolte de l’asperge blanche.

 

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