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L’asperge a le vent en poupe

La demande de la distribution et l’intérêt du consommateur dynamisent les plantations et replantations dans tous les bassins. De plus, l’innovation technique incite de nombreux producteurs à se lancer ou se spécialiser dans cette culture.

Portée par des cours satisfaisants, un marché ouvert au niveau national et peu concurrencé aux niveaux européen et mondial, l’asperge a le vent en poupe. Le développement des plantations sur les trois dernières années se constate dans tous les bassins de production grâce au développement de la vente directe, mais surtout à la demande de volumes de la part de structures commerciales dans le Sud-ouest, le Val de Loire et le Sud-est (voir encadrés). Christophe Paillaugue, président de l’AOPn Asperges de France, se satisfait de cette dynamique. « Elle permet de ne pas laisser la place sur notre marché national à d’autres origines, notamment les Pays-Bas et l’Allemagne qui peuvent-être très concurrentiels avec des coûts de main-d’oeuvre réduits », précise-t-il.

L’impulsion commerciale des Landes

Alors que les statistiques françaises mentionnent une certaine stabilité des surfaces avec 4 500 ha d’asperge en 2015, soit 20 000 tonnes, les observateurs de la filière les estiment plutôt à 5 000 ha. « L’AOPn Asperges enregistre un développement des plantations de ses adhérents de 25 % . Il y a des opportunités à saisir, même si on sait qu’il y aura des années plus difficiles à passer », précise son président. Pour 2017, Céline Genty, responsable de l’association Asperges de France, prévoit une production des adhérents de 4 820 tonnes d’asperges pour une surface de 960 hectares, contre 3 842 tonnes commercialisées en 2016. Le développement de l’aspergeraie française se fait dans une tendance technique similaire dans tous les bassins de production. Il s’oriente vers la précocité avec des variétés plus précoces pour étaler la production par rapport aux aspergeraies déjà plantées et des moyens techniques pour étaler le calendrier de récolte, notamment l’utilisation de plusieurs paillages (voir Réussir Fruits & Légumes n°359). Dans la zone des Landes (Sud-Gironde et Landes), l’asperge est destinée essentiellement aux circuits longs. La région compte des producteurs indépendants de taille conséquente et deux groupements de producteurs, Copadax et Maïsadour, associés à Primeurs de France (ex. Prim’co) pour la commercialisation. Sous leurs impulsions, cette région a enregistré une progression de 30 % en cinq ans et devrait voir continuer sa croissance (voir pages 50-51). Elle bénéficie d’une appellation IGP asperge des Landes depuis 2005, qui regroupe 2 500 tonnes d’asperge de 60 producteurs. La diminution du prix du maïs, consommation et semence, et la crise que connaît le secteur de l’élevage du canard devraient aussi amener de nouveaux ateliers asperge. En effet, cette culture s’est montrée rémunératrice sur les dernières années et est souvent très prisée par les jeunes agriculteurs dans le cadre de leur installation. Dans le Blayais, l’asperge bénéficie d’une IGP obtenue en 2016. « Les surfaces sous cette identification ont été multipliées par trois en deux ans pour atteindre 156 ha. Nous comptons 17 producteurs indépendants et une coopérative », mentionne Soisic Breton, animatrice de l’IGP Asperges du Blayais. Proche de l’agglomération bordelaise, l’asperge du Blayais bénéficie d’une bonne image et privilégie la vente directe grâce à de nombreuses animations sur les marchés, les foires et avec une fête de l’asperge.

Val de Loire, seconde région en progression

Le Maine-et-Loire représente plus de 300 ha d’asperge, avec des producteurs indépendants dont certains approchent 100 ha et la coopérative Fleuron d’Anjou qui passera cette année la barre des 500 t d’asperges. Son développement est notamment lié à la croissance de certains producteurs et à l’arrivée de nouveaux (voir p 52). « Depuis 2011, l’atelier asperge moyen de nos adhérents est passé de trois-quatre hectares à sept-dix hectares, avec deux producteurs à plus de 20 ha », précise Baptiste Richard, technicien de la structure. Les techniques de production évoluent également et tendent à une intensification. « Nous passons de plantations en rang simple et entre rang étroit au système hollandais, avec des plantations en double rang avec huit griffes par mètre linéaire et trois mètres d’entre-rang », témoigne le technicien. L’objectif est d’augmenter la densité et de réduire les mètres linéaires pour améliorer la vitesse de ramassage, limiter l’investissement dans les bâches plastiques et, dans un second temps, permettre la replantation dans l’entre-rang. Les parcelles passent également en irrigation au goutte-à-goutte. Après un essai en 2016, 15 ha seront irrigués selon cette technique en 2017 et puis progressivement 50 % des aspergeraies de Fleuron d’Anjou. L’économie d’eau, le pilotage de l’irrigation et de la fertilisation ainsi que la réduction de la pression sanitaire sont les arguments en faveur de cette technique. « Dans le Loir-et-Cher, malgré des dernières années moroses dues à une climatologie peu favorable, la tendance est à la replantation, note Christophe Fleurance, technicien asperge de la chambre d’agriculture. Pour l’asperge blanche, des structures individuelles se spécialisent en visant le débouché de la vente directe. L’asperge verte organisée autour de la coopérative Axéréal reste toujours un atelier de diversification pour certains céréaliers et représente plus de 50 ha ».

Dans le Languedoc, l’asperge retrouve également une certaine dynamique. Alors que ses surfaces ont régressé de manière très importante, la région fait preuve d’un nouvel élan, en témoigne la journée technique organisée l’hiver dernier par la Coopérative agricole Provence-Languedoc, qui a accueilli plus de 120 producteurs. « Nous avons commencé par le renouvellement des aspergeraies et maintenant nous sommes en croissance de surfaces », témoigne Christophe Lespinasse, technicien de la structure. Jean-Yves Gal, technicien asperge dans le Gard, constate également cette relance. « Il devrait se planter 60 à 70 ha d’asperge sur le département, soit une fois et demie les surfaces habituelles », estime-t-il.

De nouvelles plantations d’asperges blanche et verte

Ces nouvelles plantations concerneront aux deux tiers l’asperge blanche et un tiers l’asperge verte. « Dans certaines zones comme la Durance et la Gard, le facteur variétal a permis d’occuper de nouvelles parcelles plus riches en argile et permis la production d’asperge verte », constate Christophe Lespinasse. Pour ce dernier type de culture, la précocité et le calibre sont recherchés avec Vitalim et Darlise. « L’asperge verte est souvent produite sous abris, certains chauffés, et sous chenille pour obtenir un haut niveau qualitatif, par des producteurs qui se spécialisent », mentionne Jean-Yves Gal. Pour l’asperge blanche, certaines parcelles s’implantent sans irrigation. Toutefois, le goutte-à-goutte est de plus en plus développé ainsi que les plantations en haute densité (page 55). La Camargue est aussi une zone où l’asperge se plante sur des parcelles parfois importantes (plus de 10 ha). Rappelons qu’avant la fusariose et l’engouement pour les vins du Languedoc, le Languedoc, qui bénéficie de conditions pédoclimatiques favorables, était la première région française de production d’asperge.

L’Alsace plante également des asperges. La dynamique de plantation enregistrée sur les trois dernières années est liée à la baisse du potentiel de production. « Depuis 2013, les conditions météorologiques, humidité et froid au moment de récolte, ont été défavorables au rendement, et 2016 a été la pire année. Les producteurs, qui commercialisent pour la plupart en direct, ont perdu 20 à 25 % de leur rendement. Ils ont donc compensé par une augmentation de leur surface », explique Philippe Sigrist, technicien chambre d’agriculture d’Alsace. Ce dernier estime les surfaces d’asperge à 500 ha sur les départements du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, dont une centaine plantée au cours de trois dernières années. « En 2017, nous devrions revenir à des surfaces plantées plus restreintes correspondant au rythme de renouvellement », précise-t-il. Les nouvelles plantations ont donc privilégié les variétés précoces comme Darlise, Vitalim et Cumulus. L’objectif a été de se sortir du tout Grolim pour étaler la production. Les producteurs alsaciens restent également très centrés, à 90 %, sur l’utilisation des bâches à ourlet noir/blanc. « L’objectif est de développer l’usage du double paillage, paillage noir/blanc + paillage thermique pour gagner quelques jours de précocité mais également en rendement final », explique Philippe Sigrist. Le développement de l’aspergeraie alsacienne peut laisser craindre des volumes importants dans le cas d’une année climatique favorable. Et 2017 se présente de manière assez positive grâce à un hiver froid qui a permis un bon repos végétatif et assaini la structure des aspergeraies. L’asperge d’Alsace trouve son débouché de manière locale avec plus de 70 % des volumes en vente directe contre seulement 10 % dans les Landes par exemple.

Des innovations produits pour favoriser la consommation

D’où une attention particulière auprès des consommateurs avec une campagne de communication importante financée par les professionnels. Sur les points de vente, le consommateur est aussi choyé avec une généralisation de l’épluchage parfois gratuit ou moyennant 1 euro/ kg (page 54).

Dans une situation technique et commerciale très favorable actuellement, l’asperge dispose également de possibilités de croissance de la consommation avec des innovations produits telles que le sachet flow pack pour améliorer la conservation en rayon, l’asperge pelée pour faciliter son usage ou la diversification de la gamme avec l’asperge verte et pourpre, et peut-être demain une valorisation des pointes. Elle peut aussi jouer une carte naturalité auprès d’un consommateur sensible à la qualité sanitaire puisqu’il s’agit d’un légume qui n’a jamais reçu d’applications de traitement pendant sa croissance. Enfin, l’augmentation des volumes et l’étalement du calendrier de production peuvent aussi créer des opportunités de débouchés en Europe, mais aussi sur le grand export, grâce à l’amélioration de techniques de conservation et de moyens logistiques.

AVIS D’EXPERT

Primeurs de France souhaite peser sur le marché de l’asperge

« L’asperge est une production atomisée sur laquelle nous souhaitons peser avec une stratégie de plantation basée sur un choix variétal restreint et l’utilisation des plastiques et des minitunnels. En effet, la marque Priméale, qui regroupe la production des adhérents de Copadax, Maïsadour et Arterris, prévoit de produire 3 500 t d’asperge en 2017. Primeurs de France poursuit son développement selon un planning établi jusqu’en 2020, pour atteindre 4 200 t, soit 1/5 de la production nationale. Nous souhaitons que 20 % des plantations utilise des moyens de production pour gagner en précocité. La croissance des tonnages doit se faire en devançant le calendrier de production pour disposer de 80 jours de commercialisation, du 15 mars et 15 juin. Même si Primeurs de France écoule 90 % de ses asperges sur le marché national, les récents rachats de la société hollandaise Van Oers et de Jean L’Hourre, expéditeur breton, nous ouvre de nouveaux horizons commerciaux pour une asperge précoce avec un haut niveau qualitatif. Nous prévoyons également une diversification avec des premières récoltes d’asperge verte et des plantations à venir, 25 ha en 2017 pour disposer de 400 t d’asperges vertes en 2020. Nous démarrerons également l’asperge pourpre en 2018. »

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