Laitue : Xanthomonas bientôt démasqué ?
Le développement de la bactériose de la laitue a conduit à mettre en oeuvre des travaux de recherche. Le projet Lactuxan qui vient de débuter a pour but de rechercher et de vérifier l’identité du bio-agresseur supposé être Xanthomonas campestris pv. vitians.
Le développement de la bactériose de la laitue a conduit à mettre en oeuvre des travaux de recherche. Le projet Lactuxan qui vient de débuter a pour but de rechercher et de vérifier l’identité du bio-agresseur supposé être Xanthomonas campestris pv. vitians.
Les symptômes de bactériose sont connus sur le territoire de Rhône-Alpes depuis de nombreuses années. Il s’agit des petites taches chlorotiques, devenant rapidement brun foncé à noires en se nécrosant, qui apparaissent surtout sur les feuilles de la première et deuxième couronne, à l’approche de la récolte.
Procéder à la détection rapide du pathogène
Historiquement localisées dans les bassins de productions isérois et savoyards, les attaques se sont rapidement propagées à l’ensemble du territoire régional. Les symptômes liés à ses bio-agresseurs, Xanthomonas campestris et Pseudomonas chicorii, se retrouvent actuellement dans tous les bassins de production français avec des importances variables sur le rendement économique des cultures en fonction des années. Sur sollicitation de la profession régionale, un programme national incluant l’Inra, le Ctifl, la Serail et les maisons semencières a été conduit de 2004 à 2007 afin de chercher si, au même titre que pour le mildiou de la laitue, il existait du matériel génétique résistant ou tolérant à ces bactéries pathogènes (voir encadré p. suivante). Depuis 2016, le projet Lactuxan se propose de répondre à la problématique bactériose en se démarquant des méthodologies habituellement utilisées pour lutter contre les maladies. Ce projet est un partenariat entre la Serail et l’UMR CNRS 5557 / Inra 1193, financé par le Feader et la région Auvergne Rhône-Alpes.
Ainsi, le travail, pour une durée de quatre ans, sera engagé sur la connaissance de la bactérie impliquée dans la maladie, permettant la mise au point d’une réponse plus ajustée. En effet, ce projet se focalisera sur la bactérie Xanthomonas campestris pv. vitians, après s’être assuré qu’elle était bien la responsable de ces attaques. La caractérisation des souches permettra de mettre au point des marqueurs spécifiques, afin de procéder à la détection rapide du pathogène responsable. Les sources environnementales d’inoculum ne sont pas connues à ce jour et n’ont jamais fait l’objet d’étude. Pour répondre à cette inconnue, qui permettra de cibler la recherche et de définir des méthodes de lutte adaptées, les sources potentielles de contamination seront recherchées : plants, sol, débris végétaux, eau, mauvaises herbes ou laitues sauvages (présentes en périphérie des exploitations et qui peuvent être des hôtes potentiels de la maladie).
Cycle de Xanthomonas campestris pv. vitians
Pour expliquer l’apparition de la maladie chez certains producteurs ou bassins de production, le climat et les variétés attaquées seront analysées, tout comme la rotation ou succession de cultures chez les producteurs. Ceci permettra de comprendre les conditions favorables au développement et à la propagation de la maladie, le climat et les variétés attaquées.
En cas de découverte de plusieurs souches bactériennes, il sera nécessaire d’adapter un test de tolérance variétal en fonction de la souche bactérienne présente sur la zone de production, et d’adapter la concentration de l’inoculum lors de la reproduction des symptômes en phytotron (température, hygrométrie, orage). Le projet Lactuxan permettra de tester une nouvelle méthode de lutte, combinant des stimulateurs de défenses naturelles avec un matériel végétal tolérant, pour augmenter le niveau de protection en tenant compte des moyens dont disposent les producteurs. Il sera également utilisé comme témoin de référence dans des tests de lutte biologique incluant des bactéries phytoprotectrices fournies par l’équipe de l’UMR CNRS 5557 / Inra 1193 Groupe " Diversité et adaptation des bactéries phytopathogènes ". L’intégration de ces méthodes de lutte biologique couplées au test variétal / souche Xanthomonas campestris permettra d’apporter une réponse adaptée aux différentes typologies de producteurs.
Alexandre Burlet
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Symptômes : de minuscules taches humides
Les symptômes de la bactérie Xanthomonas campestris pv. vitians sont caractérisés par de minuscules taches humides, angulaires, se développant sur les feuilles bien développées qui entourent la pomme. En s’accroissant, elles deviennent plus ou moins circulaires et prennent une coloration brun foncée à noire. Elles confluent et couvrent des portions importantes du limbe, entraînant la destruction totale de certaines feuilles. Une fois secs, les tissus deviennent également papyracés et se déchirent. Cette bactérie sévit plutôt sur les feuilles de la couronne et affectionne les périodes chaudes et humides. L’arrivée des pluies ou l’utilisation des irrigations par aspersion marquent le début des attaques.
Des géniteurs potentiellement résistants
L’objectif du programme national mené par l’Inra, le Ctifl, la Serail et les maisons semencières était de tester le matériel génétique disponible (accession Inra et maisons grainières) afin d’identifier des géniteurs potentiels en conditions contrôlées puis in situ. Les résultats obtenus en condition d’infestation naturelle confirment en partie le bon comportement des variétés retenues en laboratoire pour leur tolérance. L’effet de la pression de l’inoculum naturellement présent sur l’expression des symptômes semble être un facteur déterminant dans le développement de la maladie. D’autre part, les souches de bactéries présentes sur le terrain pourraient être différentes d’un site à un autre, les variétés tolérantes sélectionnées exprimant alors plus ou moins leur moindre sensibilité. Mais si le projet a permis d’identifier des géniteurs potentiellement résistants à ces bactéries, les sociétés semencières partenaires de ce projet ne les incluent pas ou pas toujours dans leurs croisements génétiques. En effet, les résistances au mildiou de la laitue Bremia lactucae et au puceron de la laitue Nasonovia ribisnigri sont beaucoup plus importantes économiquement pour elles au niveau national et international. Par ailleurs, l’expérience sur d’autres pathosystèmes a montré que la mise en place d’une stratégie de lutte basée uniquement sur la résistance ou la tolérance génétique n’était pas toujours suffisante (efficacité parfois limitée et accélération des phénomènes de contournement des résistances).