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La fraise belge à l’épreuve de la crise

Lancée dans l’automatisation de sa production de fraises et la recherche de nouvelles variétés, la Belgique se voit entraver dans cette évolution par la crise économique et l’inflation des coûts de production.

La production de fraises est un des fers de lance de la filière fruits et légumes en Belgique, et un des produits les plus exportés. En 2007, la production totale de fraises en Belgique était d'environ 41 000 tonnes. En 2019, elle était passée à près de 53 000 tonnes. À partir de 2020, elle a connu une baisse à 48 000 tonnes, et cela en raison de superficie dédiée à ce fruit en recul de 2,1% (diminution de la culture en plein champ). La performance belge se caractérise aujourd’hui par deux grands mouvements : le développement de l’automatisation de la serre et la recherche d’une production plus durable. Ce qui se complique dans une période où les coûts de production explosent.

Une serre de plus en plus automatisée

De nouvelles technologies de culture sont aujourd’hui testées pour optimiser davantage la culture spécialisée de la fraise. Elles s’imposent aussi bien dans un souci d’économie globale que de durabilité. L'utilisation optimale des écrans énergétiques et même l'utilisation d'un film plastique fixe permettant de contenir la chaleur dans la serre sans échauffement inutile est par exemple aujourd’hui relativement répandue. De même, le développement de l’éclairage led pour l'éclairage cyclique à la fin de l'hiver et au début du printemps s’est largement développé avec l’interdiction des ampoules à incandescence.

Les producteurs peuvent s’appuyer sur un tissu industriel flamand performant. Par exemple, Octinion, entreprise basée à Louvain, a annoncé en février dernier le lancement de son robot de cueillette de fraises entièrement autonome. Cette entreprise est surtout connue pour sa plateforme autonome modulaire Xenion adaptée à une utilisation en intérieur avec rails, sans rail ou en combinaison. Cette plateforme est aujourd’hui utilisée pour le traitement des fraises par UV-C. De même, Bogaerts Greenhouse Logistics, située à côté de Coöperatie Hoogstraten, fournit des solutions logistiques aux serriculteurs, du matériel roulant pour les travaux de culture dans la serre au système de manutention des produits dans le hall d'emballage.

Aller au-delà de la variété Elsanta qui a fait ses preuves

Coöperatie Hoogstraten cherchait à assurer le suivi précis de ses produits, mais l’entreprise trouvait le scannage des codes-barres manuellement fastidieux et chronophage. Elle s’est appuyée sur une combinaison de codes QR lus par la technologie de vision Vistalink et Atlas, la solution de suivi et de traçage Rain RFID d’Aucxis RFID. Désormais, les barquettes carton sont formées à la machine, mises dans des plateaux et équipées d'un code QR unique avec les données des producteurs. La palette est transportée à la machine d'étiquetage par un convoyeur à rouleaux. Afin de permettre le repérage de la palette avec les plateaux et les barquettes, Aucxis fournit une étiquette RFID (ID palette) qui groupe tous les plateaux qui se trouvent sur cette palette. « Ce projet est la première grande étape dans l'optimisation du processus de repérage. À l'avenir, les codes QR sur les plateaux seront également utilisés pour scanner les boîtes de fraises pleines. Ainsi nous disposons d'informations ciblées sur le temps de la récolte des fraises et de l'endroit où elles sont transportées », souligne Jeroen Swolfs, directeur des opérations chez Coöperatie Hoogstraten.

La production de fraises belge est dominée par la variété Elsanta qui représente environ 90 % des volumes. Darlsectect et Selva, variétés d’été, représentent chacune environ 5 % de la production nationale. Il faut dire que l’Elsanta a fait ses preuves, aussi bien sur le marché national qu’à l’exportation. Cependant, en cas de fortes chaleurs, elle produit trop de petits fruits, ce qui n’est guère apprécié par la distribution. Aujourd’hui, la filière travaille à améliorer les performances techniques de la variété. Pas de surprise alors de savoir que de  nouvelles sélections et cultivars de différents programmes de sélection sont largement testés en Belgique. Sensation, trop compliquée en production, ou Opéra, qui demande 50 % de nutriments de plus que Elsanta, ne semblent pas remplir les attentes. Dans le portfolio des variétés testées, on peut relever Sonata, une fraise conique, rouge vif, sucrée, juteuse avec un arôme prononcé. Un beau pedigree tempéré par une certaine difficulté de culture et surtout un fort besoin de chaleur. La variété pourrait se développer en 2023 si le marché de l’énergie se calme un peu.

Une filière performante bousculée par la crise

Car l’augmentation exponentielle des coûts de production cette année remet en cause l’activité des producteurs de fraises belges, et leur capacité à investir dans de nouvelles technologies. La Belgique, comme la France, subit des hausses de l’énergie et aussi des matières premières nécessaires à la bonne conduite de la culture de fraises sous serre. On peut évaluer que la filière a connu des augmentations de prix allant de 30 % pour les barquettes en carton à 50 % d’augmentation pour les plateaux en bois et les engrais, par exemple. Mais c’est le prix de l’énergie qui demeure le premier des soucis. Et la situation est similaire à ce que rencontre leurs collègues français : l'Union flamande des agriculteurs notait dernièrement que les contrats fixes de nombreux producteurs prennent souvent fin le 31 décembre 2022. Selon les médias flamands, le gouvernement a travaillé sur des mesures de soutien au secteur (1 milliard d'euros de prêts et de garanties par exemple).

Cela sera-t-il suffisant ? Cela n’est pas sûr et de toute façon, les producteurs de fraises belges doivent prendre une décision quant à leur campagne d’hiver. Cindy van Rijswick, spécialiste senior des produits frais chez Rabobank, durant l’International Strawberry Congress, l’a annoncé : "le nombre de producteurs, notamment les serristes, qui choisissent déjà de ne pas planter est en augmentation". On peut les comprendre : selon certains producteurs présents au congrès, éclairer la production en hiver pourrait revenir à proposer une fraise à 10 euros le kilo. Cette tendance certainement aura un impact direct sur l’offre du marché, qui s’oriente clairement vers la baisse.

Éclairer la production de fraises cet hiver pourrait revenir à proposer une fraise à 10 euros le kilo !

La  robotique au service du plant

Van der Avoird Trayplant est une entreprise néerlandaise leader dans la culture de matériel de multiplication de fraises et de framboises. L’entreprise produit environ 8 millions de plants, la moitié en fraises, le reste en framboises. Peter van Hulten, responsable des ventes, explique : « Notre objectif est de fonctionner de manière totalement neutre pour le climat : système d'eau 100 % fermé dans nos serres et champs, panneaux solaires, éclairage led et stockage de la chaleur résiduelle, pas d'émission d'agents phytosanitaires … » En mars 2022, la société a mis en service un système automatisé à grande échelle : 800 tables de culture mobiles glissent lentement sous des lumières led puis sous la lumière du jour grâce à une chaîne de rails sans fin. Le système est entièrement contrôlé par ordinateur qui coordonne les conditions optimales de croissance. « Dans une zone relativement restreinte, 1300 m2, nous parvenons à obtenir un rendement très élevé », se félicite Peter van Hulten. L’autre nouveauté est une serre de démonstration regroupant des innovations pour une culture des fruits toute l'année : ventilateurs sur chaque poteau connecté, gouttière mobile selon le besoin en lumière, plateforme suspendue au-dessus des plants pour irrigation et aspersion…

Enrobage comestible et fraise, une illusion ?

La protection des fruits avec un enrobage comestible offre des solutions en termes de perte de poids, de limitation de la décomposition microbienne et donc d’allongement de la durée de conservation. Elle s’est déjà développée pour de nombreux produits. Qu’en est-il pour un fruit fragile comme la fraise ? Le Centre flamand des technologies post-récolte a mené des tests mettant en œuvre des enrobages différents (chitosane, sucroester, carboxymethylcellulose…). Ceux-ci offrent des résultats similaires. En revanche, la méthode d’application de l’enrobage est cruciale : trempage, pulvérisation ou brossage n’impliquent pas les mêmes volumes de produit nécessaires, et donc pas le même niveau d’investissement à consentir.

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