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Deux organisations de producteurs légumières normandes engagées collectivement dans la HVE

En Normandie, les OP légumes des coopératives Agrial et GPLM se sont engagées collectivement dans la certification HVE il y a deux ans. Une démarche dans le prolongement des cahiers des charges déjà adoptés destinée à consolider les marchés.

L'apposition du logo sur les emballages doit permettre une communication positive reconnue par les distributeurs et consommateurs.
L'apposition du logo sur les emballages doit permettre une communication positive reconnue par les distributeurs et consommateurs.
© P. Glerant

Engager une démarche de certification HVE (Haute valeur environnementale)… voilà le chemin pris il y a deux ans par les Organisations de producteurs (OP) normandes : Agrial OP légumes (Caen) et le Groupement de producteurs de légumes de la Manche – GPLM (Créances). « La distribution poussait vers la bio. La conversion bio demande une révision profonde de l’organisation de l’exploitation. L’ensemble de la production adapte en permanence ses pratiques pour garantir des productions de qualité, respectueuses de l’environnement, mais tous ne peuvent atteindre cette certification. L’OP légumes Agrial a atteint un équilibre avec 12 % de ses volumes de production en bio », introduit Bernard Guillard, producteur de légumes plein champ, dans la baie du Mont-Saint-Michel et président d’Agrial et l'OP Jardins de Normandie.

Cependant, les producteurs sont convaincus de la nécessité de proposer collectivement un gage de qualité environnementale pour répondre à la demande grandissante des consommateurs et des GMS. Ce qui représente un point d’accès au marché de plus en plus important. « On est dans une surenchère de cahiers des charges privés où chacun s’efforce d’être le mieux disant sur la qualité. On a un peu l’impression d’être entraînés dans une course à l’échalote par les distributeurs qui en demandent toujours plus, regrette Cédrick Gallot, directeur du GPLM et de Jardins de Créances. En tant que coopérative, nous sommes les premiers responsables. Nous ne savons pas toujours dire non par peur que des marchés nous échappent. »

Accès au marché et image de marque

Les deux groupements normands veulent donc aussi éviter des cahiers des charges contraignants qui n’auraient pas l’effet d’image escompté. Cédrick Gallot se souvient : « il y a eu GlobalGAP, reconnue par les distributeurs mais inconnue du consommateur ». Malheureusement, ces certifications restent méconnues. Et Bernard Guillard de remarquer : « Nous avions l’impression que pour le consommateur, en dehors de la bio, il n’y avait que les MDD (marques de distributeurs), lesquelles s’appuyaient sur les cahiers des charges que nous appliquions, mais sans les nommer. Cela ne nous semblait pas suffisant. »

C’est dans ce contexte que les producteurs commencent à s’intéresser à la certification HVE, qui compte trois niveaux. Les deux coopératives étudient donc le référentiel. « Nous avons pris un échantillonnage de quatre exploitations pour le comparer au niveau 3 », explique Cédrick Gallot. Le constat est le même pour les deux coopératives. Ce niveau reprend les grands principes de base déjà appliqués au travers des démarches environnementales déjà engagées, avec quelques différences bien sûr. HVE est portée par le gouvernement, elle est reconnue par certaines associations de consommateurs et environnementales. « Dans ce contexte, le consommateur devrait vite l’adopter, voilà ce qui nous a motivés à engager la démarche », poursuit Bernard Guillard. Avec des perspectives prometteuses : « on sent une accélération des demandes en France, comme avec Grand frais », note Cédrick Gallot.

Une démarche vite adoptée

Une fois engagée sur cette voie, la démarche, basée sur le volontariat, fait rapidement des émules chez les producteurs des deux coopératives. Début 2022, 37 des 150 exploitations de l’OP légumes Agrial ont décroché la mention « Haute valeur environnementale ». Elle représente 60 à 70 % du volume de production de l’OP. Du côté du GPLM, 47 producteurs sur 140 sont en cours de certification à l’horizon 2023 (15 déjà certifiés). Un très bon score, d’autant que la certification HVE porte sur l’ensemble de l’exploitation, et pas seulement sur la production légumière.

« Pour les élevages, la certification sera plus délicate, car le référentiel est plus compliqué », explique Bernard Guillard. « Nous avons voulu accélérer, remarque Cédrick Gallot. Mais l’accompagnement des adhérents est chronophage et nous avons besoin de recruter. » Et le directeur de souligner : « Même si les agriculteurs sont entourés dans ce type de démarches, ils n’en peuvent parfois plus. Les audits se concentrent souvent sur les mêmes périodes. »

 

« On sent une accélération des demandes en France, comme par exemple avec Grand frais », note Cédrick Gallot, directeur du GPLM et de Jardins de Créances. © DR
« On sent une accélération des demandes en France, comme avec Grand frais » Cédrick Gallot, directeur du GPLM et de Jardins de Créances.

« Inventorier toutes nos pratiques »

 

"L’augmentation de la surface d’intérêt écologique, la généralisation de la couverture des sols en hiver, un travail encore approfondi sur la matière organique ont été amplifiés par la HVE", assure Bernard Guillard. © DR

Parmi les premiers producteurs Agrial certifiés HVE, figure Bernard Guillard. Le président de Jardins de Normandie exploite 125 ha avec un associé, dont 80 hectares dédiés à la production légumière de plein champ. 30 ha sont consacrés aux poireaux, 12 ha aux carottes, 13 ha aux céleris-raves, 4 ha aux pommes de terre, 6 ha aux betteraves rouges, complétés par quelques hectares de salade. Il revient sur les évolutions qu’il a dû mettre en place à cette occasion. « Comme nous étions déjà « Agrilogique » (une démarche propre à la coopérative Agrial, garantissant l’absence de résidus de pesticides, ndlr), cela nous a beaucoup préparés à la certification HVE », note l’agriculteur.

« Chez moi, la démarche consistait surtout à inventorier toutes nos pratiques, sans en oublier et amplifier certains points. » Parmi les évolutions à noter tout de même : l’augmentation de la surface d’intérêt écologique, la généralisation de la couverture des sols en hiver, un travail encore approfondi sur la matière organique. Sur la question des rotations de cultures, en revanche pas de changement : « depuis les années 2000, dans nos cahiers des charges, il est précisé qu’une céréale doit être cultivée sur une parcelle au moins tous les trois ans. »

 

Désherbage mécanique et filets anti-insectes

Le désherbage mécanique a nécessité des investissements importants pour augmenter le nombre de binage. © P. Glerant

Pour développer le désherbage mécanique, Bernard Guillard concède des investissements importants qu’il évalue par exemple à 230 000 € pour les cultures de poireaux : dans du matériel de guidage (caméra, GPS, coupure de tronçon), des herses-étrilles, une bineuse. Ces interventions sont parfois « très en rupture par rapport à ce qu’on peut avoir l’habitude de faire », souligne le producteur. « Nous avons été amenés à faire au moins un binage là où nous n’en pratiquions pas sur certaines cultures. Et sur d’autres à en accentuer le nombre. Par exemple, sur un poireau, nous sommes à cinq binages, là où avant nous en faisions plutôt deux. » Mais c’est surtout sur la protection des cultures que le producteur estime avoir le plus à avancer.

L’utilisation de filets anti-insectes a été développée, « même si on n’est pas au bout. Sur le poireau, on balbutie sur le sujet. Je sais que je dois encore m’améliorer mais il faut que l’écosystème autour de moi (agrofourniture, agroéquipement, …) m’apporte des solutions. » Et de citer un exemple : « si je veux pousser plus loin et arrêter certains désherbants, je dois compenser par du travail manuel. Mais c’est un emploi qui n’est pas du tout attractif et je risque de me retrouver dans une impasse. » Plus généralement, le producteur regrette également que les augmentations des charges liées à l’amortissement des investissements réalisés ou à l’utilisation d’intrants de biocontrôle ne soient pas compensées par l’économie due à la moindre utilisation des phytosanitaires.

 

REPÈRES

Les 3 niveaux de la certification HVE

Pour disposer de la mention « Haute valeur environnementale », il faut valider trois étapes :

- Niveau 1 de la certification - Validation de respect de pratiques essentielles de la réglementation environnementale. Validé par organismes de conseils habilités SCA.

- Niveau 2 de la certification - Au-delà de la réglementation, adoption de techniques à faible impact environnemental.

- Niveau 3 de la certification - Dépassement de seuils de performance environnementale avec un haut niveau de biodiversité et une très faible dépendance aux intrants. Certifié par un organisme agréé.

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