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Normandie Arômes produit du fenouil pour le pastis

Spécialisée dans les plantes aromatiques et à parfum qu’elle distille pour les valoriser en huiles essentielles, la SARL Normandie Arômes produit aussi du fenouil amer dont le produit de sa distillation entre dans la composition du pastis de Pernod-Ricard.

Un tiers de l’exploitation de Valentin Raoul est dédié aux PPAM, dont le fenouil, soit environ 50 % du chiffre d’affaires.
Un tiers de l’exploitation de Valentin Raoul est dédié aux PPAM, dont le fenouil, soit environ 50 % du chiffre d’affaires.
© Aletheia Press / L. Brémont

Le goût si caractéristique des boissons anisées provient de l’anéthol, issu notamment de l’anis étoilé (ou badiane) mais aussi du fenouil amer. Pour ce dernier, Pernod-Ricard se fournit en Provence mais aussi en Normandie, depuis 17 ans, par Normandie Arômes, à Foucrainville, dans l’Eure... avec des surfaces qui ont été multipliées par 10 en 10 ans, pour atteindre 150 hectares sur les 300 hectares exploités par Normandie Arômes. Aujourd’hui, Normandie Arômes est une SARL regroupant trois associés eurois : Valentin Raoul, gérant, Jean-Luc Placier et Benoît Lefort.

« Normandie Arômes est née sous la forme d’une coopérative réunissant 16 agriculteurs, il y a vingt-trois ans », se souvient Valentin Raoul, fils de Jean-Louis Raoul, l’un de ses fondateurs. L’objectif était alors de se diversifier dans la production d’huiles essentielles. Pour ce faire, les cultivateurs décident de s’équiper de leur propre atelier de distillation. Une façon de capter le maximum de valeur ajoutée. Menthe poivrée, chanvre, monarde, thym thymol… Une douzaine de plantes à parfum, aromatiques et médicinales (PPAM), dont une partie est également proposée sous le label agriculture biologique, constituent le catalogue actuel. Ce sont ainsi environ 35 tonnes d’huiles essentielles qui sont produites annuellement à destination de l’industrie.

Exclusivité de la production

« Nous travaillons pour 25 % avec l’agroalimentaire, 25 % la cosmétique, 25 % la parfumerie et 25 % la pharmaceutique », complète Valentin Raoul. Alors que certaines huiles essentielles peuvent être stockées de longs mois avant d’être commercialisées, selon les marchés, le fenouil amer tient une place à part. « Pernod-Ricard s’est adressé à Normandie Arômes qui possédait la capacité de production nécessaire à ses besoins, remarque l’agriculteur. Nous avons un contrat pluri-annuel avec l’entreprise qui s’engage à nous prendre toute notre production d’huile essentielle de fenouil à un prix fixé ». Des accords dont se réjouit Normandie Arômes : « C’est un industriel qui a compris que dans l’agriculture, nous travaillons sur des temps longs. » Aucune spécificité concernant la composition de l’huile essentielle livrée n’est précisée dans le contrat. « C’est une culture très bien adaptée à notre climat, avec des taux d’anéthol exceptionnels », poursuit Valentin Raoul qui note des rendements entre 200 et 250 kg d’huile essentielle à l’hectare. Au point que l’approvisionnement eurois pèse désormais plus que le fenouil provençal.

Une production qui séduit

Pernod-Ricard met à disposition un conseiller technique (Hervé Neuville), fournit les semences et les fiches de culture. Sans surprise, des variétés plus ou moins précoces sont utilisées conjointement pour sécuriser l’approvisionnement. « Nous travaillons en lien étroit avec Hervé Neuville et sommes amenés à mettre en place ensemble des essais », poursuit Valentin Raoul. Actuellement, les agriculteurs et le technicien planchent sur la possibilité de faire trois récoltes en deux ans et demi, tout en maintenant un rendement global satisfaisant. Pour cela, ils s’appuient sur une plantation en mini-mottes au printemps. La culture, mise en place pour deux ans, est semée en septembre-octobre (voir encadré). Elle est récoltée en août-septembre, quand les ombrelles sont en graines, « juste avant la maturité ».

Pour mesurer cette maturité, Normandie Arômes utilise un matériel de micro-distillation. Une contrainte qui impose son rythme au chantier de récolte : « nous ensilons le matin ce que nous pouvons distiller l’après-midi », résume Valentin Raoul. La distillation se déroule à Breuilpont, sous l’œil expérimenté de Jean-Luc Placier, qui dispose du gaz de ville. L’extraction se fait uniquement à la vapeur d’eau. « Ensuite les fûts sont étiquetés pour assurer une traçabilité qui nous permet de remonter jusqu’à la parcelle », complète le gérant. Des gages forts de qualité et une production française sur laquelle Pernod-Ricard communique désormais depuis quelques mois, après avoir longtemps préféré la discrétion à ce sujet. Un effet de la crise sanitaire qui a rendu le fenouil eurois plus attractif encore pour le fabricant de vins et spiritueux, qui voit également désormais « le made in France » comme un argument de vente.

Le miel de fenouil

 

Le miel de fenouil, rare, possède des accents de noix et de fruits secs mais pas d'anis. © Aletheia Press / L. Brémont
Sur les parcelles qu’il cultive en fenouil, Valentin Raoul accueille, à partir de fin juin, une partie des centaines de ruches appartenant aux Ruchers de Normandie, basés à Gisay-la-Coudre, dans l’Eure. Le miel de fenouil, rare, est particulièrement apprécié des consommateurs. On n’y décèle pas de saveur anisée mais il possède des accents de noix et de fruits secs. De quoi remporter une médaille d’or (2017) et deux d’argent (2013 et 2020) au Concours général agricole.

Parcours

1998 : création sous forme de coopérative, sous l’impulsion de Jean-Louis Raoul et son épouse Evelyne

2005 : contrat avec Pernod-Ricard

2015 : passage en SARL, trois associés

2021 : Valentin Raoul succède à Evelyne Raoul au poste de gérant

Une conduite de culture plutôt simple

 
Le fenouil amer présente une forte capacité d’adaptation et se cultive dans des parcelles avec des cailloux, particulièrement adaptées au thym, mais aussi dans des terres plus profondes. © Aletheia Press / L. Brémont

La culture est en place deux ans, avec une récolte annuelle. Le semis se réalise en septembre-octobre avec un semoir à blé. En général, le labour est conseillé, ce qui évitera, dans 90 % des cas, le passage d’un désherbant. Pour la production en bio, le binage peut s’avérer utile, mais impose l’utilisation d’un semoir avec espacement spécifique. Les premières pousses apparaissent fin décembre et atteignent quelques centimètres en sortie d’hiver. En juin, cette ombellifère atteint jusqu’à 2,5 mètres de hauteur pour une récolte en août-septembre. La pression maladie reste faible, « jusqu’en juin, où il est nécessaire de surveiller le développement de champignons sur les feuilles inférieures », précise l’agriculteur, ce qui peut nécessiter un fongicide. Côté apports, il faut compter deux à trois passages d’azote et un passage de potasse. « Attention à ne pas faire d’impasse sur l’azote ! ». Un désherbage à l’automne est souvent suffisant. Une rotation type s’étend sur cinq à sept ans, par exemple sur le schéma orge/blé/fenouil/blé/colza.

« Le fenouil est un très bon précédent », note Valentin Raoul qui estime « compliqué » d’inclure d’autres plantes à parfum dans la rotation. « En général, on retrouve un champ plutôt propre. On peut avoir des repousses que l’on maîtrise généralement en chimique ». Le fenouil amer présente une forte capacité d’adaptation. Il se cultive dans la vallée de l’Eure, dans des parcelles moins profondes avec des cailloux, particulièrement adaptées au thym, comme dans des terres plus profondes sur le plateau de Damville. « Sur une parcelle, cette année, en sortie d’hiver, nous avions quatre stades de levées, étalées sur un mois et demi, ce que nous n’avions jamais observé. Nous nous sommes interrogés quant à la nécessité de faire un semis au printemps et puis nous y avons renoncé. Le retard s’est rattrapé et on ne distingue plus de différence », se réjouit l’agriculteur. « Même après 17 ans, nous apprenons encore sur le fenouil ! ». L’agriculteur précise d’ailleurs échanger avec le GRCeta local sur la possibilité de gérer les repousses de fenouil avec les protéagineux. Une piste à explorer…

 

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