Des petits pois chez soi
Apprécié pour la qualité gustative, le petit pois frais récolté manuellement dispose de plusieurs variétés permettant d’échelonner sa présence sur les marchés.
Apprécié pour la qualité gustative, le petit pois frais récolté manuellement dispose de plusieurs variétés permettant d’échelonner sa présence sur les marchés.
La production de petits pois pour le marché du frais pourrait s’apparenter à une culture « précieuse ». Cultivée seulement par quelques producteurs de ceinture verte pour la vente directe et des spécialistes qui maîtrisent leur circuit de distribution, le petit pois dispose de peu de références techniques.
Des variétés à grandes gousses
Les variétés de petits pois se classent en deux types principaux. Les variétés à grains lisses : généralement plus précoces, possédant une meilleure vigueur au départ, dont les grains possèdent un taux d’amidon plus élevé donc une qualité gustative médiocre (plus farineux), à éviter au maximum pour satisfaire une clientèle très souvent attachée à la qualité gustative. Les variétés à grains ridés : en général plus tardives, d’excellente qualité gustative (plus sucrées et plus fondantes), recommandées pour les ventes sur le marché de frais qui apprécie des grains de gros calibre. Deux typologies sont alors utilisées : les variétés à petites gousses, encore appelées « garden peas » (exemple Spring) et les variétés à grandes gousses, les plus intéressantes du point de vue rendement et vitesse de cueillette (exemples : Utrillo, Dorian). Le type garden peas permet une production très précoce avec plante de vigueur moyenne à entre-nœuds courts, présentant une à trois gousses par nœud. Celles-ci sont très droites, bien tronquées, homogènes, d’une longueur de 8 à 9 cm, et une largeur de 15 mm. Elles renferment sept à huit grains. Leur qualité gustative est souvent excellente grâce à un fort taux de sucre et une évolution lente de l’indice de tendrométrie. Les variétés à grandes gousses sont souvent des plantes vigoureuses peu sensibles au stress, de bonne tenue. A chaque nœud, deux fleurs donneront deux gousses d’une longueur 14 à 16 cm environ sur une largeur de 20-21 mm, de très belle présentation en colis. Une gousse contient dix à onze grains en moyenne. Ainsi, sa qualité (longueur, rectitude, présentation) est un des principaux critères recherchés par le producteur. Elle doit toutefois s’associer à un bon rendement commercial (certaines variétés dépassent 2 kg par mètre linéaire) et permettre un fort rendement horaire à la cueillette. Une grande partie de variétés dispose de la résistance Fusariose race 1, de la résistance à l’Oïdium et de résistances aux virus des mosaïques jaunes du haricot et de celle du pois, permettant de prolonger la période de récolte.
D’importantes différences de rendements
En 2018, la Chambre d’agriculture des Alpes-Maritimes a réalisé, en partenariat avec l’Aprel, une évaluation de huit variétés de pois à graines ridées pour le marché du frais. Les trois variétés précoces Merveille de Kelvedon, Maestro et Cash ont été peu productives (environ 500 g/m2, voire moins). Utrillo, Dorian, Ambassador et Numerica ont permis un rendement moyen entre 1 400 et 1 600 g/m2. Statistiquement, seule Jumbo se détache avec un rendement dépassant 2 kg/m2. Ces variétés ont été récoltées entre cinq à sept passages. « Les trois variétés précoces Merveille de Kelvedon, Maestro et Cash sont les plus basses de l’essai car elles ont fleuri très tôt et ont ralenti leur croissance à la formation des gousses. Au contraire, Jumbo et Ambassador présentent des plantes très hautes », commente Corinne Pons, Chambre d’agriculture des Alpes-Maritimes. Six variétés ont pu être dégustées (sauf Cash et Maestro, variétés très précoces). « L’ensemble des variétés a été jugé plutôt satisfaisant, avec des notes au-dessus de la moyenne et Ambassador en tête », mentionne Corinne Pons dans une fiche technique parue récemment. A noter également que dans l’essai pour un semis du 24 janvier 2018, on constate que les graines non traitées ont un pourcentage de germination de moins de 50 %, inférieur à celui des graines traitées.
En 2017, la station expérimentale en maraîchage Bretagne sud (SEHBS) a également comparé des variétés de petits pois sous tunnel en agriculture biologique. « Nous avons testé douze variétés semées début février et pour des récoltes échelonnées de fin avril à fin mai », précise Maët Lelan, responsable de la station. Les résultats montrent d’importantes différences de rendements entre variétés : de 800 à 1 100 g/ml pour les variétés les moins productives (Cash, Karina et Précovil) et plus de 1 500 g/ml pour Altesse, Exzellenz, Jumbo et Sommerwood. « Dans cet essai, nous retenons Spring pour sa précocité, son bon rendement, son étalement de production. Les gousses sont assez courtes mais le grain est de bonne qualité gustative. La plante devient haute dans ces conditions de culture : 100 à 120 cm et nécessite un palissage », mentionne la spécialiste. Sommerwood présente également une bonne précocité, un rendement élevé avec des gousses assez longues et un grain de bonne qualité gustative. Utrillo est surtout intéressante pour sa présentation de gousses et son goût. Elle se situe dans la moyenne pour sa précocité et son rendement. « Progress 9 présente des gousses plus courtes mais est très gustative avec un bon rendement et disponible en graines bio », conclut-elle.
Un gain de main-d’œuvre à la récolte
Les semis peuvent débuter dès la mi-janvier sous abris et sous bâches avec des variétés précoces pour des récoltes de début mai. En plein champ, les premières cultures peuvent être installées en mars et jusqu’en juillet pour étaler les récoltes de juin à fin septembre. Le cycle moyen pour un semis de début avril est de 80 à 90 jours (voir encadré). Pour une production en frais, la densité de semis varie de 400 000 à 500 000 graines/ha avec deux rangs par planche avec un écartement de 20 cm entre rangs et 70 à 75 cm entre planche. On sème alors 22 à 23 graines par mètre linéaire. On peut monter à des densités plus fortes, jusqu’à un million de graines/ha avec des écartements réduits mais la difficulté de passage entre les rangs handicape la récolte. Dans la plupart des cas les doubles rangs sont laissés en culture à plat mais il est possible de les palisser en plantant des piquets entre les doubles rangs, tous les 5 à 8 mètres, puis de les relier entre eux par le grillage ou filet à maille large. « Les plantes s’accrocheront toutes seules à ce support. Cette technique, bien que représentant un coup supérieur, permet un gain de main-d’œuvre intéressant lors de la récolte, ainsi qu’une diminution du taux de déchets », explique Cécile Delamare, technicienne maraîchage à la Chambre d’agriculture de Lot-et-Garonne. Dans un sol normalement pourvu, et compte tenu de la fixation d’azote atmosphérique, la fumure conseillée par hectare est de 20 à 30 unités d’azote en fumure starter, généralement sous forme d’ammonitrate [LLM1], 50 unités d’acide phosphorique et 100 à 130 U voire 150 unités de potasse en sol léger et culture irriguée. Car le pois est une culture très exigeante en eau surtout à partir du stade 6 feuilles. En effet, si ses besoins sont de 0,5 fois l’ETP de la levée au stade 6 feuilles, ils passent à 1,2 fois l’ETP après ce stade et jusqu’à la récolte. « Si possible, évitez des arrosages trop fréquents durant la floraison, pouvant entraîner des coulures de fleurs », recommande la technicienne.
Résistant au froid mais attention
Pour lever, le pois a besoin d’une température au sol supérieure à 0°C. Cette phase passée, la plante peut résister à des températures négatives, jusqu’à - 6°C. Ces exigences déterminent, en partie, le choix de la date de semis. Son optimal de développement est compris entre 10 à 15°C avec une plage de 3 à 24°C. En revanche, de l’initiation florale (35 à 40 jours après semis) à la fin de floraison (65 à 70 jours après semis), il y a risque de destruction totale ou partielle des gousses sous l’effet de températures inférieures à -1°C. Il est à noter que le risque de perte de rendement est plus important sous l’action de petites gelées répétées (touchant tour à tour tous les nœuds floraux), qu’avec une forte gelée unique (ne touchant qu’un seul nœud).