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Fact checking
Dermatose nodulaire contagieuse bovine (DNC) : tout savoir pour démêler le vrai du faux

Depuis l’expansion de la dermatose nodulaire contagieuse bovine dans le Sud-Ouest de la France et le développement d’un mouvement de contestation contre l’abattage des lots contaminés, les médias grand public, des partis politiques et des militants en tous genres se sont emparés du sujet. De nombreuses affirmations circulent sur les réseaux sociaux. Reussir.fr trie le vrai du faux des principales d’entre elles.

vaches vues de dos dans les Pyrénées Orientales
Les Pyrénées-Orientales ont compté une vingtaine de cas de dermatose nodulaire contagieuse bovine (DNC) depuis la fin de l’été mais plus aucun signalé depuis la fin novembre, jusqu’à aujourd’hui, .
© Yann Kerveno

« La dermatose nodulaire contagieuse bovine n’est pas transmissible à l’homme »

Vrai. La DNC est une maladie liée à un capripoxvirus, de la même famille que celui provoquant la clavelée qui touche les ovins. Elle concerne principalement les bovins (Bos Taurus, nos vaches et Bos indicus, les zébus), rappelle le ministère de l’Agriculture. Il n’y a pas pour l’instant en Europe de réservoir connu pour ce virus dans la faune. Ses symptômes sont en premier lieu de la fièvre, signe de l’infection, puis l’apparition de nodules sur la peau. La maladie peut se conclure par la mort de l’animal au prix de souffrances importantes.

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« La dermatose nodulaire bovine contagieuse est une maladie nouvelle »

Faux. Elle a été découverte et documentée, pour la première fois, en Afrique Australe en 1929 et n’a cessé d’être étudiée depuis. Le virus a, lui, été découvert en 1957, le rôle des insectes dans la dissémination établi également dans les années 1950. Ce qui est nouveau, c’est son apparition en France métropolitaine en juin dernier en Savoie, mais il y a déjà eu un foyer à la Réunion en 1992. Au plus près de notre frontière, une première incursion sur le sol européen a eu lieu en 2015-2017 dans les Balkans, comme le rapportent des chercheurs.

Lire aussi : Dermatose nodulaire contagieuse bovine (DNC) : un premier cas confirmé dans l’Aude

« La dermatose nodulaire contagieuse bovine est une maladie bénigne »

Faux. L’épisode de DNC des Balkans, qui a permis de valider le protocole appliqué aujourd’hui en France (abattage des unités épidémiologiques et vaccination), offre des références tangibles. La morbidité, c’est-à-dire le taux d’animaux malades dans un troupeau, y a varié de 7 à 20 % et la mortalité, le taux d’animaux ayant succombé à la maladie de 0,5 à 2,6 %, selon une équipe internationale de chercheurs. En Albanie, pays qui a refusé l’abattage et, maladroitement, tenté de contrer la maladie avec la seule vaccination, la morbidité a atteint 42 % du troupeau en 2016 et 26,8 % en 2017. Avec respectivement, une mortalité de 12 et 4,8 %.

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« Les vaches guérissent toutes seules de la dermatose nodulaire contagieuse bovine »

Vrai. Pour les vaches qui survivent à la DNC. Cependant, elles conserveront pour une bonne partie d’entre elles des séquelles importantes qui auront un impact majeur sur l’économie du troupeau. Avortements, infertilité, chute de production laitière, mortalité des veaux, arrêts de croissances… Une étude toute récente, réalisée au Bangladesh dans 300 élevages, met en évidence des chiffres effrayants après le passage de la maladie. Près de la moitié des vaches infertiles, 13 % d’avortements pour les autres, une production laitière en baisse d’un quart. Une autre vaste et récente étude, menée en Inde, estime à plus de 2 milliards de dollars le coût de la dernière éclosion de DNC dans le pays.

Lire aussi : Dermatose nodulaire contagieuse (DNC) : l’abattage total divise sur le terrain

« Les vaches d’ici sont plus sensibles au virus »

Vrai. La principale raison c’est qu’en France les vaches n’ont jamais été confrontées à la présence du virus et ne disposent donc d’aucun anticorps leur permettant de lutter. C’est pourquoi la morbidité peut-être rapidement importante comme on l’a vu en Albanie en 2016 en l’absence de réaction sanitaire rapide (selon plusieurs sources : https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC11598853/ et https://www.woah.org/fileadmin/Home/eng/Health_standards/tahm/3.04.12_LSD.pdf)
 

« Les autres pays ne pratiquent pas l’abattage des troupeaux il n’y a qu’en France qu’on le fait »

Faux. La stratégie déployée en France est conforme aux recommandations de l’organisation mondiale de la santé animale entérinées dans la loi européenne Animal Health de 2016, qui impliquent alors de tout mettre en œuvre pour éteindre les foyers. Ce qui passe par l’abattage (dépeuplement) des unités épidémiologiques (l’animal malade plus ceux ayant été à proximité de lui donc pas forcément la totalité du troupeau) et une vaccination exceptionnelle. L’objectif étant de contraindre le virus dans un espace restreint jusqu’à ce que son réservoir se vide. L’Italie et l’Espagne (qui a aussi abattu près de 3 000 bovins) ont procédé de la même manière. Ce protocole a été testé grandeur nature, et avec succès, dans les Balkans en 2015-2017.

Lire aussi : DNC : pourquoi la France et l’Italie appliquent-elles l’abattage total des foyers confirmés ?

« Un précédent épisode de DNC à la Réunion a été réglé seulement par la vaccination »

Vrai. Il reste assez difficile de savoir ce qui s’est passé à la Réunion suite à l’éclosion d’un foyer de DNC en 1992. C’est l’importation d’une vache atteinte du continent africain qui a déclenché le foyer. Toutefois, le contexte est fort différent de celui que nous connaissons en métropole. Le troupeau y est relativement réduit (quelques milliers d’animaux, 22 000), l’île n’exporte pas de bovins et la maladie est naturellement confinée sur l’île. Au total la crise aura duré plus de neuf mois. La DNC avait touché 400 exploitations depuis son apparition fin 1991. Un reportage archivé par l’Ina circule actuellement beaucoup sur les réseaux sociaux sur le sujet.

 

« On peut détecter la maladie avec une prise de sang »

Faux. Le virus ne reste pas assez longtemps dans le sang, seulement quelques jours après la contamination, pour que les tests sur prises de sang puissent être fiables. Les tests PCR sont réalisés à partir de prélèvement sur les nodules. C’est ce qui rend la maladie difficile à détecter puisqu’il faut attendre la fin de la période d’incubation jusqu’à 28 jours, pendant lequel un animal apparemment sain peut servir de réservoir à virus.

Lire aussi : Dermatose nodulaire contagieuse bovine (DNC) : « Oui l’abattage total des troupeaux infectés est urgent et nécessaire » comment le Dr Toudou et d’autres vétérinaires argumentent

« Cela ne sert à rien d’abattre les animaux après 28 jours de vaccination »

Faux. C’est probablement la question la plus difficile à comprendre. Une fois la vaccination effectuée, il faut 21 jours pour que l’immunité soit à son optimum et 28 jours pour qu’elle soit complète. Ce qui, mathématiquement fait qu’entre zéro et 28 jours à partir du vaccin, voire un peu plus, un animal est susceptible de contracter le virus. Le vaccin n’étant pas curatif, il met le reste du troupeau en danger tant que l’immunité n’est pas acquise. Si l’on ajoute la période d’incubation, le temps de déclencher la vaccination, il peut donc se passer, au plus vite, une soixantaine de jours entre l’entrée du virus dans le troupeau et la fin de la possibilité de voir un animal tomber malade, selon le réseau GDS France.

Lire aussi : Dermatose nodulaire contagieuse bovine (DNC) : « Des cas peuvent se déclarer plus de 40 jours après vaccination »

« On pourrait abattre les animaux malades et mettre les autres en quarantaine »

Faux. Si vous avez bien lu le paragraphe précédent vous avez compris que mettre les animaux en quarantaine n’a pour effet que de faire perdurer le réservoir de virus et étendre la contamination.

Lire aussi : DNC : « Ceux qui s’opposent à l’abattage rallongent notre calvaire », témoigne Nicolas, éleveur laitier touché par la maladie en Haute-Savoie

« Avec l’hiver il n’y aura plus de vecteurs de la dermatose nodulaire contagieuse bovine »

Faux. Les stomox carpensis, les mouches d’étables aussi appelées mouche du charbon, qui sont les principaux vecteurs du virus, sont actifs dès que la température dépasse 10 degrés celsius. Ce qui dans le contexte de l’automne que nous vivons est un élément majeur à prendre en compte. Compter sur une disparition temporaire des vecteurs sans tenter de supprimer les réservoirs de virus expose à une reprise des cas dès le printemps, sauf si les animaux sont vaccinés. Les vecteurs ne sont, a priori, pas très mobiles, ils pourraient parcourir de 5 à 6 kilomètres par jour (la concentration géographique des troupeaux joue alors un rôle majeur) et le virus ne reste a priori pas très longtemps vivant dans les insectes qui le portent. Mais ils peuvent voyager dans une bétaillère ou une voiture par exemple. Les autres modes de contamination, mufle à mufle par exemple, ne sont pas exclus mais ne prédominent pas selon, les connaissances actuelles.

 

« C’est la Cour des comptes qui demande à réduire l’élevage !»

Faux. Le rapport de la Cour des comptes publié en 2023 n’a rien à voir avec la crise sanitaire liée à la DNC. Il préconisait il est vrai un pilotage par l’État de la réduction tendancielle, en naturelle, du cheptel bovin pour la France puisse tenir ses engagements environnementaux et notamment dans le cadre du Global Methane Pledge. 

Lire aussi : Rapport de la Cour des comptes : après la colère, les échanges

« En Afrique on vaccine contre la DNC »

Vrai. Dans les pays où la maladie est endémique le recours à l’abattage n’est en effet pas la norme principalement parce qu’il serait très complexe à mettre en œuvre. Contrairement à l’Europe, la structure même de l’élevage (nomadisme, absence d’identification des animaux, etc.) rend difficile ce processus. Les outils utilisés alors sont principalement la vaccination régulière des cheptels (l’immunité n’est pas permanente) le contrôle des vecteurs et des mouvements d’animaux.

Lire aussi : Dermatose nodulaire contagieuse : comment Sébastien Lecornu tente de désamorcer la crise dans le Sud-Ouest

« On abat les animaux pour protéger le commerce »

Faux. Le protocole mis en place a pour premier objet d’éradiquer le plus rapidement possible la maladie après l’apparition d’un foyer. Contenir la maladie (c’est valable pour toutes les maladies classées A par la réglementation européenne suivant les critères de l’Organisation mondiale de la santé animale) dans un espace restreint permet cependant d’éviter à l’ensemble du pays de vacciner et de perdre son statut « indemne » qui permet de commercer des animaux librement vers les pays étrangers. Parce que si la vaccination totale réduit la charge virale en circulation on ne sait plus alors dire si le virus circule encore à la marge. L’enjeu est majeur pour la France qui exporte 900 000 broutards et 300 000 veaux laitiers par an, principalement vers l’Italie et l’Espagne. La perte du statut indemne contraint à des négociations bilatérales avec les pays clients comme ce fut le cas pour l’Italie qui accepte depuis début décembre, de recevoir des animaux vaccinés.

Lire aussi : DNC : La FNB et la FNPL veulent que la France conserve son statut indemne

« La DNC ne répond pas aux critères de la classification A »

Faux. La catégorie A, définie par la réglementation européenne et qui implique que tous les moyens soient mis en œuvre en vue de l’éradication des pathologies qui y figurent, rassemble des maladies qui ont toute en commun d’avoir « un grand pouvoir de diffusion et une gravité particulière, susceptible de s’étendre au-delà des frontières nationales, dont les conséquences socio-économiques ou sanitaires sont graves et dont l’incidence sur le commerce international des animaux et des produits d’origine animale est très importante » comme le définissait l’organisation mondiale de la santé animale. L’Europe ajoute à ces critères celui d’être absente du territoire.

Lire aussi : Dermatose nodulaire contagieuse bovine dans les Pyrénées-orientales : « Je veux couper court aux fake news »

« Transporter les carcasses des animaux abattus vers l’abattoir peut contaminer d’autres élevages »

Faux. Les vecteurs (mouches et taons) ne se nourrissent que sur des animaux vivants. Les camions font l'objet d’un protocole de désinsectisation et sont bâchés lors du transport vers l’équarrissage, comme le souligne le ministère de l’Agriculture.

 

« La viande des animaux malades est consommable »

Vrai. Mais on ne peut transporter des animaux vivants potentiellement contaminés vers l’abattoir pour enrayer la propagation de la maladie. L’euthanasie pratiquée dans les exploitations rend en revanche, compte tenu de la nature des produits utilisés, la viande impropre à la consommation.

Lire aussi : DNC : Culture Viande et La coopération agricole réaffirment la nécessité d’appliquer strictement l’ensemble des mesures sanitaires actuelles de gestion

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