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À la Réunion
Une consommation de cabris festive et religieuse

L’élevage caprin réunionais reste une activité familiale essentiellement dédiée à la production de viande.

À la Réunion, département français ultra-marin situé dans l’océan indien, à plus de 9 000 km de la métropole, seuls 1 000 km² des 2 500 de l’île sont disponibles pour les activités humaines et à peine 500 pour l’agriculture ! Avec 40 % du territoire situé à plus de 1 000 mètres d’altitude, escarpé et difficile d’accès, l’essentiel des activités humaines est concentré dans « les bas », plaine côtière coincée entre montagne et océan. Si elle est plus connue pour sa culture de canne à sucre qui occupe 57 % de la SAU et constitue le principal produit d’exportation, l’île comporte aussi des activités d’élevage : bovins viande et lait, porcins, volailles mais aussi ovins et caprins.

Pas de collecte de lait ni d’habitude de manger des fromages

Avec près de 1 700 détenteurs pour un cheptel estimé à 18 000 chèvres reproductrices, l’élevage caprin est essentiellement constitué de petits producteurs et seuls 50 ont plus de 200 chèvres. L’atelier caprin reste généralement un atelier de diversification et beaucoup d’éleveurs sont doubles actifs ou retraités. « Mon fils a repris l’exploitation, avec les bovins et la canne à sucre, explique Raoul Nativiel, agriculteur à la retraite. Mais je continue à m’occuper de mes 24 chèvres, car j’aime ça. » Son système de production est assez intensif avec trois mises bas en deux ans. Les cabris sont vendus entre 25 et 30 kilos pour un prix compris entre 250 et 300 euros. Le cheptel caprin de la Réunion est en effet quasi exclusivement dédié à la production de viande. « Il n’y a pas de collecte de lait de chèvre sur l’île, explique Fabrice Balou, conseiller caprin à la chambre d’agriculture de la Réunion. Quelques producteurs s’essaient à la production laitière en transformant à la ferme et en vendant en direct mais il s’agit d’un marché de niche : il n’y a pas d’habitude de consommation de fromage sur l’île. »

L’île compte un abattoir agréé multi-espèces, la Sicabat. La viande est achetée au producteur autour de 13,5 euros par kilo et vendue au consommateur autour de 17 euros par kilo, un prix qui reste élevé pour la ménagère qui n’en achètera que pour les grandes occasions. Près de 700 tonnes de viande caprine sont consommées à la Réunion chaque année. Il s’agit d’une consommation essentiellement festive, concentrée en décembre et janvier, et ethnique, liée à la population d’origine tamoul. La production locale ne couvre qu’une faible part des besoins et plus de 600 tonnes sont donc importées chaque année, à 43 % en provenance de la métropole et à 43 % de Nouvelle-Zélande et Australie.

Des cabris à 700 voire 1 000 euros

Une coopérative ovine et caprine existe depuis 2012 et regroupe aujourd’hui 19 éleveurs caprins. Elle souhaite encourager la création d’ateliers de diversification de taille familiale (20 à 120 chèvres), afin d’apporter un complément de revenus aux agriculteurs, et développer un approvisionnement local en viande fraîche d’origine « pays ». Cependant, la plupart des éleveurs préfèrent rester indépendants, avec l’espoir de parvenir à mieux valoriser leurs animaux. En effet, en parallèle de ce marché « viande », il existe un marché pour les animaux utilisés pour les sacrifices religieux dont les prix sont déconnectés du prix de la viande et peuvent monter pour un bel animal à 700 voire 1 000 euros.

« Les critères recherchés pour les sacrifices religieux sont des animaux de couleur rouge chocolat, aux oreilles longues, aux cornes orientées vers l’extérieur, au nez busqué, longs, hauts et bien conformés", explique Anselme Vaity, qui valorise ses cabris auprès des populations musulmanes et hindoues ou auprès d’autres éleveurs comme reproducteurs. Éleveur et maraîcher, il affourage en vert ses 55 chèvres avec l’herbe récoltée sur quatre hectares de parcelles de fauche. La fauche se fait manuellement à la débroussailleuse et l’herbe récoltée est chargée dans le véhicule tout-terrain. L’éleveur achète en complément de la paille sèche de canne fauchée et broyée à la machine pour distribuer avec le fourrage vert en période pluvieuse, quand l’herbe est trop gorgée d’eau, pour éviter les problèmes de diarrhées. Il produit aussi un peu de foin, principalement destiné aux jours où il n’a pas le temps d’aller faucher pour affourager en vert : pics de travaux, week-end… Cette alimentation fourragère est complétée par un aliment concentré de production. En prévision de l’installation de sa fille, il a construit un nouveau bâtiment équipé de cornadis et d’abreuvoirs automatiques avec 120 places. La distribution de concentré quant à elle se fait toujours manuellement. Il n’y a pas de saison de reproduction, mais pour des raisons pratiques, des lots de 15 chèvres sont constitués. Les mises bas ont lieu en bâtiment et les chevreaux restent avec leur mère jusqu’au sevrage vers trois mois. Ils sont ensuite engraissés jusqu’à 10-11 mois.

Près de 700 tonnes de viande caprine consommées chaque année

La disponibilité fourragère, clé de la réussite des systèmes caprins

Dans les élevages caprins de l’île, 80 % en moyenne des charges opérationnelles sont liés à l’alimentation. « Aujourd’hui les éleveurs commencent à prendre conscience que pour faire des caprins, il faut des fourrages, signale Fabrice Balou. On les encourage à faire des bilans fourragers. L’idéal est qu’ils cultivent de la canne à sucre à côté, pour pouvoir récupérer les pailles, ou qu’ils aient des surfaces fourragères disponibles à proximité. » De manière générale, les animaux sortent peu à cause du parasitisme. De plus, la concurrence pour l’espace est assez importante. « Avant, les animaux sortaient pâturer en gardiennage mais aujourd’hui il n’y a plus la main-d’œuvre, et pas toujours les terrains pour cela. » Tout le monde n’ayant pas forcément les surfaces fourragères nécessaires, un marché se développe pour la vente de foin. « Aujourd’hui, il y a de plus en plus de prestataires à proposer du foin et la qualité s’est améliorée. Cela permet aux éleveurs de choisir et de ne pas revenir vers un prestataire dont ils ont été mécontents. »

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