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AG du Cnaol
Mieux protéger les AOP

81 % des appellations d’origine protégée laitières françaises ont déjà été confrontées à des cas d’usurpations. Le Cnaol s’est interrogé comment mieux protéger ses indications géographiques laitières en France, en Europe et dans le monde.

Sur les 45 AOP fromagères 14 sont au lait de chèvre.  © M.-A. Batut
Sur les 45 AOP fromagères 14 sont au lait de chèvre.
© M.-A. Batut

La salle de conférences du complexe touristique de Vogüe (Ardèche) au cœur du territoire de l’AOP du Picodon était pleine le 30 septembre pour l’assemblée générale du Cnaol, le conseil national des appellations d’origine laitière. La protection des indications géographiques a de quoi mobiliser les filières qui en bénéficient. En effet, 81 % des appellations d’origine protégée laitières françaises ont déjà été victimes d’usurpation. Les organisateurs de cette assemblée avaient donc concocté un colloque autour des thèmes de la protection juridique des AOP en France et en Europe et de l’internationalisation du droit des indications géographiques. Pour parler de ces thèmes complexes étaient rassemblés des interlocuteurs variés et internationaux, Jean-Luc Dairien (INAO) Massimo Vittori (Origin, organisation pour un réseau international des indications géographiques), Stefano Vaccari (ICQRF, équivalent italien de la DGCCRF) Chantal Meyer (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) et Robert Glandières (AOP Roquefort). Dans une première intervention, Jean-Luc Dairien a tenu à rappeler que" la protection des AOP se mérite ; il faut que ces dernières respectent un cahier des charges qui est le gage de la qualité et de l’authenticité des produits". Pour parler de cette protection des indications géographiques en France, Chantal Mayer a exposé l’action de la DGCCRF. Elle a tenu à rappeler aux producteurs l’importance de l’étiquetage des produits avec le logo IGP ou AOP afin de les rendre reconnaissables aux yeux des consommateurs. En réponse aux producteurs présents dans la salle qui souhaitaient savoir comment mieux protéger leurs produits, elle les a invités à contacter les antennes locales de la DGCCRF afin de notifier les cas d’usurpation. Mais prouver cette fraude n’est pas toujours évident. Si l’usurpation du nom protégé est facile à prouver, l’utilisation du nom à tort dans les produits transformés pas exemple est plus difficile à prouver. Certains acteurs des filières présents dans la salle se sentent parfois abandonnés par les pouvoirs publics. D’autant plus qu’il est difficile de répertorier tous les cas de fraude pour une appellation. Sur les marchés, dans les foires, l’utilisation frauduleuse est plus difficilement notée par les pouvoir publics. Un producteur a par exemple évoqué la vente de comté affiné au vin blanc dans les foires touristiques sans que les fraudeurs ne soient inquiétés. De plus, il se passe souvent un certain temps entre la notification d’une usurpation et l’action concrète qui consiste à retirer le produit frauduleux du marché.

Avec le Ceta, le chavignol et le chabichou seraient protégés

À l’international la protection des indications géographiques s’avère difficile. Si, dans l’Union européenne, les AOP sont protégées, il faut en passer par des accords pour garantir leur reconnaissance dans les autres pays. Les participants ont donc évoqué l’accord commercial envisagé avec le Canada (le Ceta). Dans le cadre de cet accord une liste de 145 indications géographiques européennes a été établie (sur un total d’environ 1 500 appellations reconnues par l’UE). Pour les appellations françaises au lait de chèvre, n’y figurent que le crottin de Chavignol et le chabichou du Poitou. Par contre, le banon, le chevrotin, le mâconnais, le pélardon, le picodon, le pouligny-saint-pierre, la rigotte de Condrieu, le rocamadour, le sainte-maure de Touraine, le selles-sur-cher et le valençay ne sont pas protégés au Canada. Pour rédiger cette liste, les négociateurs ont pris en compte les produits qui s’exportent déjà au Canada et qui bénéficient d’une notoriété dans ce pays, plus susceptible de les exposer à la fraude. En réponse aux producteurs qui estiment que 145 c’est trop peu, l’INAO répond que "c’est mieux que rien, c’est un début et que cette liste est amenée à évoluer". Pour l’INAO cette liste prouve en effet que le concept d’indications géographiques est susceptible de s’exporter outre-atlantique. Afin de promouvoir la protection des AOP et des IGP à l’internationale, l’INAO mène aussi des campagnes de promotion pour la création d’indications géographiques dans d’autres pays. En effet, si un pays à des indications géographiques à préserver, il est plus enclin à signer des accords bilatéraux qui permettront la reconnaissance des indications françaises et européennes sur son territoire en échange de la protection des siens sur le territoire européen.

Le gendarme italien traque les faux parmesans sur internet

Internet est aussi un territoire où il faut mener la guerre contre la fraude. Dans ce domaine l’Italie fait figure d’exemple. Stefano Vaccari a donc évoqué l’approche de son pays. En Italie, l’État préserve en effet les AOP, sa propriété intellectuelle, comme le fera une multinationale qui protège sa marque contre les contrefaçons. L’e-commerce étant un marché en expansion, l’Italie mène des actions agressives contre les fraudeurs. Quand un site internet qui vend une contrefaçon, par exemple du parmesan végétarien ou des kits pour fabriquer soi-même du parmesan, l’ICQRF " envoie un mail certifié au site internet avec une mise en demeure, le site a donc 48 heures pour retirer le produit de la vente ou changer le nom sinon il sera poursuivi". Toujours dans cette optique de protection des AOP italiennes sur internet, l’ICQRF a signé des accords avec des grands sites de ventes en ligne (Alibaba, Amazone…), afin que ces derniers s’engagent à ne pas vendre de produits usurpant les AOP Italiennes. Cette défense agressive des AOP sur internet a séduit les producteurs présents dans la salle.

Se battre pour la reconnaissance des IG à l’international

L’AOP Picodon en vidéo

À l’occasion de cette assemblée générale qui se tenait au cœur du territoire du Picodon, le président de l’AOP, Philippe Bénézech, a fait un point sur la filière. Le picodon est une AOP qui s’appuie sur deux pratiques complémentaires et aussi importante l’une que l’autre : la production en coopérative et la production fermière. Cette dernière permet de stimuler l’arrière-pays en créant de la valeur économique et en dynamisant le territoire. Le président a aussi présenté les derniers supports de communication de cette AOP qui gagne en notoriété. Fin septembre, une série de web-doc présentant la filière et ses atouts ont été publiés sur Youtube. Un livre de recettes à base de Picodon a été également publié (voir page 54).

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