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Chez Mathias Chebrou dans les Deux-Sèvres
La vie rêvée des petites chèvres poitevines

La première pépinière de chevrettes et bouquillons de race Poitevine vient d’ouvrir ses portes dans les Deux-Sèvres.

Mathias Chebrou se souvient de son démarrage dans la Poitevine à la Ferme du Vieux chêne, aux Fosses, dans le sud des Deux-Sèvres. Ce sont assurément les difficultés de départ qui ont forgé sa conviction. Il a vite compris que si l’on voulait soutenir la race, il fallait que les candidats à l’installation en production de lait puissent commencer par un cheptel garanti pure souche. « Quand je me suis lancé il y a quinze ans dans la production de fromage, je disposais d’un troupeau de 21 chèvres dont le défaut était de ne pas posséder un bon potentiel génétique. Le rendement s’en ressentait. J’ai alors mis plusieurs années avant d’obtenir un troupeau rentable ». L’éleveur, avec une mise de départ de 20 000 €, souhaitait constituer un cheptel correspondant en tout point au standard de la race. Il savait qu’en garantissant la génétique, il améliorerait sensiblement la rentabilité. Avant de tourner la page, Mathias Chebrou était à la tête d’un troupeau de 110 Poitevines qu’il a vendu.

Éviter de multiples origines du troupeau lors de la création d’une exploitation

Aujourd’hui, Mathias Chebrou vient de créer la première pépinière de chevrettes et de bouquillons de race Poitevine. Les futurs éleveurs et fromagers peuvent désormais compter sur des lots homogènes, constitués par les quelque 200 chevrettes pensionnaires de la ferme, d’une qualité génétique supérieure. L’éleveur des Deux-Sèvres connaît bien, et pour cause, le cheminement de la création d’un élevage laitier : « Lorsqu’on débute dans la Poitevine, on prend les animaux que l’on trouve. On achète dix animaux ici, vingt là, issus de cheptels sans génétique. De fait, les chèvres sont confrontées à des microbismes multiples avec les risques sanitaires que cela induit. On peut arriver à un taux de morbidité de l’ordre de 50 % ». Par conséquent, afin de limiter les déconvenues du démarrage, tout en garantissant d’emblée une rentabilité optimale, le préalable est que tous les animaux proviennent d’un même élevage. Voilà le pourquoi de la création de la pépinière de chevrettes.

Un tour de France pour trouver les meilleures Poitevines

L’animateur de l’ADDCP, Léopold Denonfoux a effectué un tour de France de prospection pour déceler de bons naisseurs de Poitevines. Dix élevages, dont les animaux sont inscrits au livre généalogique, ont ainsi été sélectionnés pour approvisionner la Ferme du Vieux chêne. Mathias Chebrou rassure : « Je sais que ces élevages sont négatifs au CAEV, qu’ils maîtrisent le parasitisme, et que les mères sont toutes au contrôle laitier pour un rendement quotidien de 2 kg de lait minimum soit de 550 kg à 900 kg de lait par an. J’ai également l’assurance qu’elles ont mis bas de façon naturelle entre fin janvier et fin février, que les jeunes femelles pèsent entre 4 et 4,5 kilos à la naissance. Car une bonne laitière se détecte dès ses premiers jours ». À son tour, fin janvier dernier, l’éleveur de la ferme du Vieux chêne, qui a réservé les chevreaux un an à l’avance, a pris la route pour aller chercher ses premières pensionnaires. Une collecte qui l’a conduit aux quatre coins de la France. 

Huiles essentielles et musique classique dans la chèvrerie

Entre les parois en bois de la chèvrerie, les cabris écoutent  du Mozart, douze heures par jour, et respirent régulièrement des huiles essentielles. « Le bois, ce n’est pas seulement une question d’esthétique. Le matériau a des vertus de régulateur de température. Ainsi, il n’y a pas de problèmes de condensation », souligne l’éleveur. Les jeunes pensionnaires sont nourris au lait à la louve et ont accès à volonté à de l’argile et des céréales aplaties afin de développer la capacité d’ingestion. On ne tolère pas non plus une litière qui ne soit pas impeccable et qui sente l’ammoniaque. Aussi, la paille et les copeaux absorbants sont-ils soigneusement et fréquemment renouvelés.

Des chevrettes de qualité pas plus chères qu’ailleurs

Les chevrettes sont allotées par gabarit. À leur arrivée, elles sont placées durant quinze à vingt jours dans des parcs individuels, le temps de l’adaptation au microbisme du bâtiment. Puis elles migrent dans un parc intermédiaire avant de gagner l’enclos des grandes où la hiérarchie s’installe entre elles. « Les chevrettes qui sont nées entre fin janvier et fin février vont ensuite pouvoir être mises à la reproduction dès la première année, en septembre-octobre, pour une mise bas dès 14 mois », confirme l’éleveur. Pour obtenir ces femelles au potentiel optimal, le point important va être la qualité de l’alimentation et de l’état sanitaire. Elles sont sevrées en deux mois et demi à trois mois avec un poids de 18 kg puis, à l’âge de quatre mois, vaccinées contre la fièvre Q avec rappel trois semaines plus tard. Elles vont alors pouvoir commencer à ingérer du solide (fourrage et céréales) et pâturer pour renforcer leur rusticité. L’alimentation est composée à 90 % de bio, à l’exception de la poudre de lait, de quoi satisfaire plus d’un élevage en conversion. Les premiers spécimens vont pouvoir partir dans les quatre premiers élevages laitiers auxquels ils sont destinés. Les acheteurs ont en commun de vouloir préserver la génétique de la Poitevine et c’est bien l’objectif de l’éleveur de la ferme du Vieux chêne. Mathias Chebrou ne réclame pas davantage que le prix d’une jeune alpine. « Chaque chevrette est commercialisée 280 € à l’âge de quatre mois et 10 € de plus par mois supplémentaire. À dix mois, en échographie pleine, elles sont vendues 350 € ». C’est le seuil minimum de rentabilité de la pépinière de Poitevines. « Il faut savoir que j’achète 50 € la chevrette de dix jours et que je dois ajouter entre 180 et 200 € d’alimentation, sans compter le suivi sanitaire. »

Solenne Vrignaud, vétérinaire attitrée de la pépinière de poitevines © VetPôle
Avis d'expert : Solenne Vrignaud, vétérinaire attitrée de la pépinière de poitevines

"Des chevreaux sains pour l’avenir"

« Les choix homogènes des animaux sont à la base même de la réussite et l’état sanitaire du troupeau de provenance est déterminant. Nous avons par exemple besoin de connaître la qualité du colostrum par rapport à l’immunité de la mère, de vérifier la situation du troupeau pour ce qui est de la prévention contre la fièvre Q. Nous devons être certains du statut d’origine de chacun des lots, connaître leur taux de mortalité. À 10-15 jours, les chevreaux doivent peser plus de 5 kg, avoir un nombril sec, ne pas présenter de déformation de la mâchoire. Quant aux jeunes boucs, leurs testicules doivent être symétriques. »

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