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Elevage caprin en Limousin
La chèvre au pays vert

Pays herbager à la culture bovine dominante, le Limousin possède une filière de 160 élevages caprins laitiers et fromagers. Réalités régionales d´une filière en cours de construction.


La chèvre n´est pas une des grandes productions de la région limousine, même si elle n´est pas une inconnue car autrefois la plupart des fermes possédaient une ou deux chèvres. Pour autant les choses bougent en Limousin car, depuis quelques années, une petite filière caprine s´y structure. Développement de la collecte de lait de chèvre, installation de jeunes éleveurs, association de fromagers fermiers autour d´un fromage régional « la Feuille du Limousin », encadrement technique avec une structure régionale originale l´Ardepal : autant d´évolutions, parfois récentes, marquant l´émergence d´une nouvelle réalité économique. Coincée entre les deux grandes régions caprines voisines qui sont le Poitou-Charente à l´Ouest et le Centre au Nord, la filière caprine limousine tente ainsi de forger son identité et de s´organiser de façon autonome.
Un vrai chapon qui sera abattu vers le 20 décembre a, au moins, 150 jours. ©P. Le Douarin


Une grande région d´élevage par vocation
Constituée de la Corrèze, de la Creuse et de la Haute-Vienne, la région limousine est avant tout un territoire d´élevage avec une grande variété de sols, de paysages, de climats et de reliefs.
C´est une région très herbagère dont 86 % du territoire agricole est occupé par les prairies (61 % de surface toujours en herbe). La spécialité régionale est la production de bovins viande. C´est ainsi que 89 % des exploitations professionnelles détiennent des bovins, principalement de race limousine incontestable « reine des prés », le cheptel moyen étant de 38 vaches.
Outre la production de veaux sous la mère, ou veaux de lait, traditionnelle en Corrèze, la grande spécialisation régionale est la production de jeunes bovins maigres destinés principalement à la finition en ateliers d´engraissement en Italie.
Après un fort recul, l´élevage ovin se concentre aujourd´hui dans trois zones principales (Marche Ouest, Haut-Limousin central et montagne limousine) tandis que la production de lait de vache décline. Prairies et forêts dominent les paysages, justifiant ainsi la dénomination de « pays vert » généralement accolée à la région limousine.


Les nouvelles réalités caprines en Limousin
L´implantation de l´élevage caprin spécialisé en Limousin date surtout du début des années 80 avec l´installation de néo-ruraux. Petits troupeaux laitiers, fabrication de fromages fermiers, vente directe à la ferme, sur les marchés et les commerces locaux, ces nouveaux venus étaient considérés comme une curiosité dans un milieu où la culture paysanne dominante était celle de la vache allaitante.
Approximativement à la même période se sont créés des troupeaux livrant du lait, de taille plus importante que celle des fromagers, et situés dans les zones limitrophes des circuits de collecte existants dans les régions voisines. Ce fut notamment le cas en Haute-Vienne et dans la Creuse où la collecte de lait de chèvre se développa à la demande de certaines entreprises du Centre et du Poitou-Charente.

Aujourd´hui une nouvelle carte régionale caprine se dessine, constituée d´environ 160 élevages caprins spécialisés (95 laitiers et 65 fromagers) avec 2 principaux pôles de collecte laitière : la Coopérative Berry Sud-Nord Limousin dont les 25 livreurs limousins (sur 45 au total) sont localisés dans le nord de la Creuse et de la Haute-Vienne et la Coopérative Agricole Laitière des Combrailles dont le centre de collecte est situé à Auzances (au sud de Montluçon) et qui collecte le lait de 45 producteurs situés à l´est du département de la Creuse.
Au total ces deux entreprises, plus les autres collecteurs de lait de chèvre représentent 8,2 millions de litres de lait de chèvre pour l´ensemble des 3 départements. Il est à noter qu´aucune entreprise de transformation n´est présente sur la région, tout le lait collecté est donc livré à des fromageries situées hors Limousin.


Systèmes de production : vers le sec
Autrefois hétérogènes les systèmes de production caprine tendent à évoluer avec l´agrandissement de la taille des troupeaux et la recherche d´une simplification du travail. « Les éleveurs laitiers ont commencé par faire de l´ensilage, comme partout, avec des problèmes d´acidose et de taux inversés, explique Sylvie Denis de la Chambre d´agriculture de Corrèze. Ils s´orientent désormais vers des rations sèches, avec parfois l´utilisation d´enrubannage de graminées notamment dans le nord de la région. Les rations sèches sont constituées de foin, de paille, de luzerne déshydratée et de céréales, avec un complémentaire azoté et un complémentaire chèvre laitière. Mais le vrai problème de ces rations sèches est leur coût car les aliments achetés sont plus chers en Limousin que dans la plupart des autres régions caprines.
Si l´affouragement en vert et le pâturage sont peu pratiqués par les laitiers, par contre bon nombre de fromagers fermiers ont adopté le pâturage de type tournant.

En hiver les rations sont surtout à base de foin de prairie naturelle, de qualité assez moyenne, ce qui nécessite un apport de concentré et de déshydraté, souvent supérieur à 1 kg par chèvre et par jour, pour maintenir un bon niveau de lactation.
En ce qui concerne le désaisonnement, celui-ci est souvent pratiqué par les laitiers, mais avec une tendance à revenir à des mises bas classiques en janvier-février. Quant aux fromagers, ceux qui vendent leurs fromages par des intermédiaires, sont souvent obligés de dessaisonner pour approvisionner leurs marchés. Par contre, les vendeurs sur la région préfèrent interrompre leurs livraisons en pratiquant une période de tarissement. En général, ils produisent jusqu´à Noël pour bénéficier des ventes de fin d´année, puis tarissent leurs chèvres pour repartir en lactation avec des mises-bas en février. »
Outre les syndicats caprins de chacun des 3 départements, la région limousine présente l´originalité d´avoir créé une structure spécifique, l´Ardepal, afin d´encadrer les petites productions animales.

Une organisation régionale originale
L´Association Régionale de Développement des Elevages des Petits Animaux en Limousin organisée dans le cadre de la Chambre régionale d´agriculture(1) est constituée de 7 sections : caprins laitiers et fromagers, mohair (4 éleveurs de chèvres Angora), lapins, palmipèdes, volailles, apiculture et gibiers.
La présidence de l´Ardepal est tournante, actuellement c´est la présidente de la section caprine Geneviève Barrat qui est également présidente de l´Ardepal. Parmi les actions développées par l´Ardepal dans le secteur caprin, grâce à un financement du Conseil Régional et à des cotisations des éleveurs, figure un appui technique spécialisé par un technicien régional. Avec trois visites par an, en coordination avec le Contrôle laitier et les services production des laiteries, cet appui technique est encadré par un Comité de pilotage régional. Depuis cette année, se met également en place un réseau d´une dizaine d´élevages en suivi BTE-GTE afin de disposer de références régionales. Un appui technique fromager régional avec sessions de formation a été mis en place en particulier pour les adhérents de « la Feuille du Limousin ».

Afin d´accompagner les projets d´installation et d´association en chèvres laitières ainsi que l´embauche de salariés dans les élevages existants (surcharge de travail), une réflexion est en cours avec l´objectif de pérenniser les exploitations caprines. Une enquête auprès de l´ensemble des éleveurs doit permettre d´établir un état des lieux des besoins et les perspectives d´avenir. Cette enquête est mise en place avec le concours du Conseil Régional dans le cadre d´une action en faveur des projets innovants et de diversification en agriculture. Le Conseil Régional devrait finaliser d´ici fin 2004 une action en faveur de l´embauche d´un second d´exploitation, avec la mise en place d´une aide financière de 50 % pendant deux ans. C´est donc dans ce cadre que pourra être financé l´embauche de salariés dans les exploitations caprines intéressées.

Dans le même ordre d´idée, et compte tenu du vieillissement de la population des fromagers fermiers, il est également souhaité une action destinée à favoriser leur renouvellement. « Toutes ces démarches intéressantes et originales qui sont actuellement en cours de maturation devraient se concrétiser assez rapidement. De même, pour la feuille du Limousin l´objectif est de développer la vente hors région compte tenu de la relative saturation du marché local. Même si le Limousin est une petite région sur le plan caprin, il existe une réelle volonté régionale d´organisation pour accompagner son développement », explique Yves Gaonach, animateur régional de l´Ardepal.

(Pour en savoir plus : voir dossier de Réussir La Chèvre de Septembre-Octobre 2004 : « Le dynamisme caprin s´affirme en limousin ». Nº264, 14 pages.)

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