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Il y a de la place pour s’installer en élevage caprin

La filière caprine a besoin de transmettre et d’installer les exploitations. Les témoignages rafraîchissants des jeunes et moins jeunes donnent de l’espoir pour l’avenir de l’élevage de chèvres.

Plus de 200 personnes, jeunes ou moins jeunes, ont échangé sur l’installation caprine le 14 décembre dernier au lycée agricole de Melle dans les Deux-Sèvres. « En Nouvelle-Aquitaine, nous avons des laiteries, des fabricants d’aliment, des savoir-faire… Il ne nous manque que des jeunes pour produire du lait demain », alertait Julien Chartier, président des JA des Deux-Sèvres. Plus positif, le nouveau président du Brilac, Bernard Lassus-Dessus de Savencia, a rappelé les multiples atouts de la filière caprine, bien organisé et avec une bonne image et un savoir-faire. Maryline Le pape de l’Anicap le confirme : « La filière se porte plutôt bien et les perspectives sont bonnes. Le fromage de chèvre augmente son taux de pénétration et les ventes en libre-service sont toujours bien orientées. »

Des opportunités pour reprendre des élevages

Si la pyramide des âges vieillissants des éleveurs caprins peut inquiéter, c’est aussi une opportunité pour reprendre des exploitations avec l’aide et le savoir-faire des anciens en place. Les laiteries présentes ont confirmé ce besoin de lait. « Il y a une demande forte en lait de chèvre français pour le marché français comme pour le marché export », explique Étienne Devaud de Lactalis en précisant que le géant laitier recherche 20 à 30 millions de litres supplémentaires sur les prochaines années. « Nous cherchons 20 millions de litres supplémentaires dans les cinq ans à venir avec des éleveurs jeunes, motivés, entreprenants, compétents et engagés », annonce aussi Patrick Charpentier de Terra Lacta qui propose un plan caprin avec des bonus de prix conséquent les premières années. « Nous n’avons pas de modèle d’installation, avec une salle de traite en roto ou avec un quai avant, avec de l’ensilage, de l’enrubannage ou du pâturage, peu importe, il faut être motivé et compétent car c’est dur de faire du lait de qualité toute l’année. » Les coopératives Agrial (Eurial) et la coopérative laitière de la Sèvre sont aussi à la recherche de nouveaux projets et de jeunes prêts à reprendre des fermes caprines.

L’envie d’entreprendre au contact des animaux

Même si l’échantillon est réduit, un sondage en ligne réalisé auprès de 105 élèves des lycées agricoles de Melle et de Bressuire a montré que 70 % des jeunes trouvent l’élevage caprin plutôt attirant et que 44 % d’entre eux envisagent de s’installer en élevage caprin. « Les projets se répartissent à peu près équitablement entre livreurs, fromagers et éleveurs mixtes », analyse Amélie Tassin, formatrice au CFPPA de Melle. « Les jeunes sont demandeurs d’informations car 75 % d’entre eux pensent qu’une formation spécifique est nécessaire pour s’installer en caprin et 90 % pensent qu’ils auront besoin d’accompagnement technique ».

Car de l’envie, les jeunes en ont à l’image de Marie Perche et Julia Virion en certificat de spécialisation (CS) caprin à Melle qui ont développé un projet commun pendant leurs études. « J’étais partie pour être technico-commercial, explique Julia, mais la partie commerciale ne m’allait pas trop et je ne voulais pas passer la journée dans la voiture. » En discutant avec Marie, elles imaginent une installation à deux et lorgnent maintenant vers une reprise d’un atelier en Vendée avec le parrainage d’un cédant.

Laurine Bosseti, en CS caprin 4 à Melle, rêve, elle, de s’installer dans le Massif central avec des chèvres de race Massif central. « J’ai quitté le milieu médical pour cet animal attachant qu’est la chèvre. J’apprécie de suivre la production d’un produit noble depuis le lait jusqu’à la vente de fromage au consommateur. Je suis une touche à tout et c’est stimulant d’être autant éleveuse que vendeuse. » Dans le sondage organisé dans les lycées agricoles des Deux-Sèvres, 5 % d’entre eux ont le projet de devenir salarié en élevage caprin. C’est le cas de Franck Meurick qui va faire un CS caprin l’an prochain et qui veut d’abord travailler comme salarié avec les animaux avant de s’installer plus tard, pourquoi pas, comme éleveur de chèvres.

Un équilibre vie professionnelle et privée à trouver

C’est ce qui est arrivé à Anthony qui s’est associé à Patrice Ayrault en 2016 après avoir été salarié pendant quatre ans dans l’élevage de 380 chèvres à Le Beugnon, dans les Deux-Sèvres. « C’est une relation particulière puisque hier j’étais chef et maintenant, on est associé, décrit Patrice Ayrault. Pour que ça marche entre associés, on s’est imposé des barrières de respect et on passe du temps à échanger pour réfléchir avant d’agir. À 56 ans et proche de la retraite, j’ai envie qu’il réussisse financièrement mais attention à ce que ça ne se fasse pas au détriment de la vie de famille. Des 6 heures-22 heures sans vacances, mon épouse l’a supporté mais je ne suis pas sûr que la jeune génération l’accepte autant… »

François-Xavier Bernard s’est lui installé en 2006 sur l’exploitation familiale de Moutiers-Sous-Chantemerle, dans les Deux-Sèvres. « Au début, je voulais m’installer avec un autre associé mais, à 22 ans, je n’avais pas la même maturité et la même capacité à faire des compromis qu’aujourd’hui. » Maintenant seul avec un salarié, il élève 450 chèvres à 1 170 kilos sur 60 hectares. « Aujourd’hui, l’élevage caprin est redevenu rémunérateur et un couple peut vivre avec 450 chèvres à condition de ne pas compter son temps. » Adhérent au contrôle laitier et à Capgenes, il aime décider seul « mais quand il y a un choix stratégique important à faire, c’est plus dur. On partage avec d’autres éleveurs, on visite des élevages, on prend le temps avant de choisir ».

Laure Dhenin, éleveuse à Sainte-Soline dans les Deux-Sèvres

« J’aime le relationnel avec les animaux »

« J’ai un parcours un peu atypique en étant d’abord handballeuse de haut niveau puis animatrice dans différentes structures. Je ne voulais pas être agricultrice au départ mais je suis revenue à la ferme parce que mon père avait des ennuis de santé et qu’il fallait aider mes parents. Je me suis formée à l’agriculture et je me suis rendu compte que ce n’était pas plus contraignant que d’être salariée. Mes parents m’ont aidé à reprendre la ferme en 2013 et j’ai rénové et amélioré le bâtiment. Le contrôle laitier m’a soutenu et guidé de même que d’autres partenaires comme le groupe caprin de la chambre d’agriculture sur la santé. À 1 200 litres par chèvre en moyenne, mon troupeau de 155 chèvres me permet de bien gagner ma vie, en rapport avec le temps passé et l’investissement. Ce que j’apprécie le plus, c’est le relationnel avec les animaux. Je connais toutes mes chèvres, on leur renvoie des choses et ils nous le renvoient. Je n’ai pas pris de vacances ni de week-end depuis le début mais ça ne m’empêche pas de passer du temps avec mes amis et d’avoir une vie à côté. Cette année, j’ai quand même embauché une aide de 25 heures par semaine et je vais adhérer au service de remplacement pour les mises bas. Ma mère a été dégoûtée des chèvres. Moi, je ne veux pas être fatiguée avant l’âge et c’est pourquoi je prends maintenant des aides physiques. »

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