Assemblée générale de la Fnec
Des voyants au vert pour la production caprine
L’assemblée générale du syndicat caprin a été l’occasion de revenir sur les chantiers de l’année 2015, comme la contractualisation et les problématiques fermières.
« Je considère que la filière va bien, a déclaré Jacky Salingardes, président de la Fnec en introduction de l’assemblée générale du syndicat. Certes, dans un contexte où l’élevage de manière générale va mal. Mais le pessimisme ambiant ne doit pas polluer cette filière. » C’est donc dans un climat relativement serein, et avec l’envie de regarder l’avenir avec confiance, que se sont retrouvés les représentants des éleveurs caprins le 6 avril à Paris. « Les installations de demain, ce sont les éleveurs d’aujourd’hui qui les font, insistait Samuel Hérault, éleveur dans les Deux-Sèvres et président de la section caprine de la FNSEA 79. N’ayons pas honte de dire que ça va. Sinon demain nous n’aurons plus de lait et les entreprises iront le chercher ailleurs. » Une inquiétude alimentée par des constats sur le terrain. « Aujourd’hui, tous les voyants sont au vert, et malgré tout, les installations ne repartent pas », a interpellé Sylvain Boiron, éleveur dans le Loir-et-Cher et responsable du groupe caprin de Jeunes Agriculteurs.
Une vigilance de toute la filière pour assurer l’adéquation offre et demande
La collecte s’est légèrement améliorée en 2015 (458 millions de litres contre 456 en 2014) et les perspectives pour 2016 sont encourageantes. « En cumul, nous avons enregistré une hausse de la collecte de 6,7 % depuis le début de l’année, a noté Marilyne Le Pape, directrice de l’Anicap. Même s’il est encore un peu tôt pour faire des pronostics, on s’attend à une hausse globale de 4 à 6 % sur l’année. » Une demande forte des consommateurs a par ailleurs conduit les industriels à recourir aux importations de façon importante en 2015 (+51 % par rapport à 2014). « Nous devons apprendre à gérer les importations », a toutefois relevé Jacky Salingardes, mettant en garde les entreprises quant au maintien de l’équilibre entre les importations et les volumes français en progression. « La vigilance de toute la filière est nécessaire pour assurer l’adéquation offre demande et éviter de retomber en situation de crise », a insisté Julien Barré conseiller productions animales du Ministre de l’agriculture. C’est le sens du travail réalisé par la Fnec avec l’interprofession sur la contractualisation en 2015. Le décret définissant les OP en lait de chèvre a été publié en février, mais cette nouvelle organisation suscite encore des questions. « La Fnec encourage et appuie la création des OP, en n’écartant aucune structure syndicale, explique Franck Moreau, vice-président de la Fnec. Mais nous souhaitons qu’elles gardent un lien avec le syndicalisme majoritaire. » Un souhait partagé par la FNSEA avec l’expérience du lait de vaches. « Dès qu’il y a le feu, on vient nous trouver, observe Daniel Prieur, secrétaire général adjoint de la grande maison. Nous préférons être associés dès le départ que devoir jouer les pompiers de service. » La signature des accords interprofessionnels rendant obligatoire la signature des contrats et la diffusion d’indicateurs de conjoncture est en cours.
Plus de prix et moins de normes
Avec 99 000 tonnes, les fabrications industrielles de fromages étaient également en hausse en 2015, sans compter les 20 à 22 000 tonnes de fromages fermiers. Des produits fermiers dont les spécificités ont également été rappelées. Sur le règlement Inco, qui prévoit l’obligation d’étiquetage nutritionnel sur tous les produits alimentaires pré-emballés à partir du 13 décembre 2016, la Fnec a réexprimé dans un courrier au ministre de l’Économie l’impossibilité de réaliser cet affichage pour un produit dont la composition est amenée à varier d’une fabrication sur l’autre. « Les produis fermiers créent de la valeur ajoutée et il est normal qu’ils changent selon la saisonnalité, a observé Daniel Prieur. Finalement en caprin comme dans toutes les productions, ce qu’il faut c’est plus de prix et moins de normes. » Enfin, dans son discours de clôture, Jacky Salingardes a assuré que malgré les nombreuses discussions actuelles, il y aurait toujours une commission fermière au sein de la Fnec, la production fermière caprine étant partie intégrante de ses missions.
N’ayons pas honte de dire que ça va bien
Un contexte de sortie de crise partagé en Europe
L’amphithéâtre de la Maison du lait a pris, le temps d’une matinée, une teinte européenne puisque deux représentants des pays voisins producteurs de lait de chèvre étaient venus présenter la conjoncture dans leur pays. Cora Heerschop, éleveuse néerlandaise, est installée en Belgique avec son mari sur une exploitation de 2000 chèvres et 250 vaches. « 260 millions de litres de lait de chèvre sont produits au Benelux, a-t-elle rappelé à la tribune, alors qu’il n’en n’était produit que 120 en 2015. » La filière est donc jeune et a connu une forte croissance en dix ans. « On compte aux Pays-Bas 500 exploitations dont 165 très spécialisées avec des cheptels de 800 à 2000 chèvres ». Leur lait est collecté et transformé à 85 % en fromages, principalement destinés à l’export, par une vingtaine de jeunes entreprises. Le reste du lait est envoyé en France, mais cette tendance tend à diminuer. Si le prix néerlandais était historiquement inférieur au prix français, la tendance s’est inversée avant 2015.
L’Espagne présente une situation plus contrastée, entre des élevages pastoraux et d’autres très intensifs, mais toujours très dépendants de l’aliment extérieur qui grève lourdement les coûts de production. Le nombre d’élevages a baissé d’un quart entre 2007 et 2013 à la suite d’une crise importante, mais reprend depuis 2014, et on compte aujourd’hui 9 500 élevages professionnels (plus de 150 chèvres). « Sur la seule province d’Andalousie, la production de lait a augmenté de 24 % entre 2014 et 2015, a expliqué Francisco Ruiz de l’université de Séville, en Andalousie. Le prix en hausse a incité les éleveurs à garder plus de chèvres et la crise économique a vu naître une tendance au retour à la terre. » Le prix qui était à son niveau minimum en 2010 (inférieur à 50 euros les 100 litres) n’a cessé d’augmenter depuis pour atteindre 75 euros en 2014. Une grosse part du lait de chèvre sert à fabriquer des fromages mixtes, car il n’y a pas de tradition de consommation de fromage de chèvre pur. L’interprofession espagnole travaille actuellement à l’élaboration d’un indice pour fixer le prix du lait, qui pourrait être indexé sur le prix du marché, la consommation fromagère, le coût alimentaire, les exportations vers la France et les importations de fromages…