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Des fromages bleus et crémeux en Bourgogne

La chèvrerie de la Truffière favorise le Geotrichum pour apporter de l’onctuosité au fromage qui bleuit ensuite au hâloir. Pour s’adapter à la demande saisonnière, il faut aussi pouvoir reporter l’affinage.

Marie-Emilie Robin et Sylvain Chopin ont le sens du client. À la chèvrerie de la Trufière à Chissey-lès-Mâcon en Saône-et-Loire, la boutique est constamment achalandée de fromage frais, à croûtes blanches et bleues. Depuis qu’ils ont arrêté de vendre leurs fromages à un affineur, ces éleveurs de 135 chèvres ont dû apprendre à reporter les fromages et les affiner. Avec l’aide de collègues fromagers fermiers, et au contact des techniciens fromagers, ils ont fait évoluer leurs pratiques pour obtenir des fromages à la fois crémeux et bleus.

Pour cela, ils cherchent à développer le Geotrichum avant de laisser le pénicillium s’installer. Pour laisser le temps au Geotrichum de prendre sa place, le salage intervient tardivement, un jour après le démoulage pour une face et deux jours après pour l’autre face. Les fromages sont aussi laissés deux jours en ressuyage dans la salle de fabrication à 20 °C. « Ce sont des pratiques peu communes en Bourgogne où les fromagers ont plutôt tendance à sécher tout de suite après le démoulage et le salage pour éviter le crémeux et favoriser le bleu » observe Guillemette Allut du Centre fromager de Bourgogne. Au Gaec, le but est d’avoir une gamme de fromages qui « piaulent », c’est-à-dire avec une peau plissée et vermiculée. « En plus d’apporter du crémeux, le Geotrichum va concurrencer le poil de chat, explique Guillemette Allut. Le risque vient alors du Pseudomonas qui pourrait se développer et apporter du fluo et de l’amertume. »

Un ajustement permanent autour d’une technologie

Après le ressuyage, les lactiques sont rentrés dans le séchoir rotatif pour deux à trois jours. La consigne du séchoir tourne autour de 15 °C et 75 % d’humidité. Le séchoir installé par Safriclim permet d’homogénéiser le séchage. Quand le groupe froid et le ventilateur fonctionnent, la pile sur roulettes tourne et toutes les faces du fromage sont présentées face au flux d’air. « C’est surtout l’hygrométrie qui pilote le séchoir, commente Jean-Luc Hervé-Brecheux, le gérant de Safriclim. Quand l’hygrométrie minimum est atteinte, l’appareil coupe le froid. Il faut aussi que le séchoir ait des temps de repos pour permettre à l’eau interne du fromage de migrer vers la croûte ».

L’arrêt du séchage et le passage au hâloir se jugent au toucher quand le fromage garde du moelleux mais pas trop. Au hâloir, la température de consigne est à 10 °C et l’hygrométrie est maintenue élevée, autour de 98 %. Là, le bleu peut prendre le temps de s’installer puisque les fromages peuvent rester jusqu’à trois mois dans cette pièce. « Quand ils sortent, les fromages sont encore tendres et moelleux et ça fait plaisir de les vendre, sourit Marie-Emilie. Si le bleu tarde à s’installer, on diminue un peu le temps de ressuyage pour les amener plus vite au séchoir. C’est un peu comme cela que nous travaillons l’affinage en fromagerie fermière. On goûte, on teste, on ajuste et on essaie de comprendre en permanence. Les clients aussi nous font ressentir ce qu’ils aiment. »

Report des fromages en caisses en chambre froide

Une des difficultés est aussi de gérer les stocks en s’adaptant à la demande fluctuante de la clientèle. « Les fromages s’empilent en mars-avril-mai et nous les écoulons aux beaux jours » explique Marie-Emilie. Au pic de lactation, il faut transformer plus de 400 litres par jour or la consommation des 6 000 clients annuels s’étale sur l’année avec toutefois une forte prédominance en juillet-août. Pour assurer ce report et voulant éviter la congélation de caillé, les fromagers ont trouvé la solution : reporter les fromages en caisse en chambre froide après leur passage au séchoir. Les caisses ont été percées pour limiter le développement des levures mais avec des trous pas trop gros pour éviter que les fromages ne se dessèchent trop vite.

Une aération mécanique pour assainir les murs

Tout le matériel de climatisation est entretenu régulièrement. Le frigoriste passe une fois par an pour entretenir les échangeurs et s’assurer qu’il n’y a aucune fuite de fluide frigorigène. Les fromagers profitent aussi de l’arrêt de fabrication de décembre à janvier pour bien nettoyer les échangeurs. « Le nettoyage est nécessaire car nous enlevons pas mal de poussières qui sentent le champignon » observe Sylvain.

L’an dernier, ils ont installé une ventilation mécanique contrôlée (VMC) surtout au-dessus de la machine à laver mais aussi dans la salle de fabrication. La VMC fonctionne en permanence mais elle est mise en grande vitesse quand le lave-vaisselle est en route. « La VMC a permis de déshumidifier l’air et d’assainir les murs » apprécie Sylvain. Un extracteur d’air est aussi placé dans le hâloir. Il ne fonctionne qu’un quart d’heure par heure la nuit quand personne n’est là pour ouvrir régulièrement la porte.

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