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Mercosur : vers une ratification inéluctable de l’accord ou existe-t-il des marges de manœuvre pour les opposants ?

La fédération nationale bovine mais aussi cinq interprofessions agricoles françaises alertent les parlementaires et le président de la République pour empêcher la ratification de l’accord UE-Mercosur. Le point sur les voies possibles pour y parvenir d’ici le 20 décembre.

Ursula von der Leyen avec Emmanuel Macron et le chancelier allemand Friedrich Merz, lors d’un conseil européen le 23 octobre dernier.
Ursula von der Leyen avec Emmanuel Macron et le chancelier allemand Friedrich Merz, lors d’un conseil européen le 23 octobre dernier.
© EC - Audiovisual Service

[Avec Agra Presse]

Accord UE-Mercosur : « les jeux ne sont pas faits » veut croire la FNB

« Les semaines à venir seront cruciales. Elles décideront soit de la ratification de l’accord (EU-Mercosur, ndlr), soit de son rejet. C’est aujourd’hui qu’il faut agir pour transmettre notre modèle d’élevage aux éleveurs de demain. Les éleveurs comptent sur vous » écrit Patrick Benezit, président de la fédération nationale bovine (FNB) dans un courrier adressé ce 18 novembre aux Parlementaires français. La fédération estime que les jeux ne sont pas faits et que les parlementaires français et européens disposent encore de leviers puissants : comme la saisine de la CJUE par le Parlement européen ou par le Parlement français avec le vote de résolutions en ce sens les 27 novembre prochain à l’Assemblée nationale et le 16 décembre au Sénat.

Relire : UE/Mercosur : manifestation d’éleveurs de la FNB devant l’ambassade du Brésil

Cinq interprofessions agricoles demandent à Macron de bloquer l'accord

Dans une lettre ouverte à Emmanuel Macron, ce 19 novembre, les présidents de cinq interprofessions agricoles (Interbev, Anvol, AIBS, Bioéthanol et Intercéréales) demandent pour leur part solennellement au président de la république de « mobiliser une coalition d’Etats membres pour former une minorité de blocage au Conseil de l’Union européenne et de refuser toute signature ou application provisoire de l’accord ». Et d’affirmer que les garanties brandies par la Commission européenne pour faire plier la France « sont illusoires ».

Lire aussi : Accord UE-Mercosur : « la Commission a répondu à côté de la plaque à la France et aux agriculteurs »

Mais quelle probabilité ces pistes ont-elles d’aboutir ?

Quelles démarches de la part des parlementaires contre l’accord UE-Mercosur ?

Dans sa lettre, la FNB fait allusion à deux démarches de groupes parlementaires contre l’accord UE-Mercosur. 

Le groupe La France insoumise à l’Assemblée nationale prévoit de soumettre au vote des députés, lors de sa niche parlementaire du 27 novembre, une résolution demandant au gouvernement de s’opposer à l’adoption de l’accord en constituant une minorité de blocage et de saisir la CJUE pour vérifier la légalité des accords.

Le 16 décembre, ce sont des sénateurs du groupe Les Républicains qui proposeront au vote du Sénat le même type de résolution

La portée de ces résolutions, même si elles étaient adoptées, devraient toutefois être limitées, les résolutions n’étant pas contraignantes pour l’exécutif.

Lire aussi : Accord UE-Mercosur : un front commun politique et syndical contre l’accord à l’Assemblée nationale

Le Parlement européen va-t-il saisir la CJUE ?

Au niveau européen, la possibilité du Parlement européen de pouvoir saisir la CJUE au sujet de la légalité des accords UE-Mercosur s’est amenuisée le 19 novembre.

La conférence des présidents, organe politique du Parlement européen, a finalement décidé, le 19 novembre, de ne pas inscrire à l’ordre du jour de la plénière de novembre (du 24 au 27), le projet de résolution sollicitant l’avis de la Cour de justice de l’UE au sujet de la compatibilité de l’accord commercial UE/Mercosur avec les traités européens, ayant récolté l’adhésion de 145 signataires. Plus tôt dans la journée, les services du Parlement européen avaient déclaré irrecevable cette demande de vote au motif que le Conseil de l’UE n’avait pas encore sollicité formellement l'approbation de Strasbourg sur le sujet. Le texte pourrait revenir sur la table des eurodéputés au début de l’année 2026, en cas de signature en décembre, selon nos confrères d’Agrafil.

Relire : L’accord Mercosur illégal ? Un projet de résolution pour saisir la CJUE signé par 145 eurodéputés

La France peut-elle réunir une minorité de blocage ?

Quid de la possibilité pour la France de réunir une minorité de blocage au conseil européen. A l'occasion de son audition devant la commission des affaires économiques du Sénat le 19 novembre, la ministre de l'Agriculture Annie Genevard a fait un point sur le nombre d'Etats-membres susceptibles de soutenir une minorité de blocage contre la signature de l'accord UE-Mercosur. Pour l'heure, la France compte sur le soutien de la Pologne, la Hongrie, l'Autriche, « possiblement » la Roumanie, la Belgique, « possiblement l'Irlande », et « très probablement pas » l'Italie « qui était clé », a listé Annie Genevard. Et la ministre de l'Agriculture de déplorer « défection cruelle des Pays-Bas cette semaine ».

Relire : « Ne laissez pas l’accord UE-Mercosur être signé ! » : 50 agriculteurs français et allemands interpellent leurs ministres de l’agriculture

Intervention de la ministre Annie Genevard sur le Mercosur à 46 minutes

La ministre a par ailleurs reconnu que la France négocie, en parallèle d'une minorité de blocage, le contenu même de l'accord : « dans la mesure où il est possible et peut-être même probable qu'une majorité de pays valide (l'accord avec) le Mercosur, que faire ? Il faut en limiter les effets négatifs ». 

Il est probable qu'une majorité de pays valide l'accord avec le Mercosur

Et de rappeler les trois domaines négociés par la France : « perturbation de marché », « mesures miroirs », « contrôles ». Et de conclure : « Le Président a dit que faute d'avoir assurance sur ces trois domaines, il ne pourrait y avoir d'aval. A date, la décision n'est pas prise, car elle n'est pas encore complètement éclairée », a-t-elle déclaré devant les sénateurs.

Les clauses miroirs pourraient ne pas se retrouver dans l’accord UE-Mercosur. Le règlement Omnibus sur la sécurité alimentaire qui sera présenté par la Commission européenne le 16 décembre devrait contenir des mesures de réciprocité sur les pesticides.

Relire : Mercosur : « L’accord tel que négocié par l’Union européenne n’est pas acceptable par la France »

Et pendant ce temps-là l’accord UE-Mercosur avance 

Le 19 novembre, le conseil de l'Europe a validé la proposition de règlement mettant en œuvre la clause de sauvegarde bilatérale renforcée pour l’agriculture dans l’accord commercial UE-Mercosur. Dans une volonté d’avancer rapidement, les Vingt-sept n’ont pas apporté d’amendements à la proposition initiale de la Commission européenne. Publiée le 8 octobre, cette proposition est la réponse de Bruxelles répondre aux préoccupations exprimées par le secteur agricole et certains États membres et doit permettre de faciliter la validation de l’accord. 

Le Conseil européen assure que « cette décision est sans préjudice des discussions en cours au sein du Conseil sur la signature et la conclusion de l’accord de partenariat UE-Mercosur et de l’accord commercial provisoire ».

Relire : Accord UE-Mercosur : Bruxelles précise sa proposition de sauvegarde pour les produits agricoles

Pour rappel l’objectif de la Commission européenne est de parvenir à une signature formelle des textes encadrant l’accord UE-Mercosur le 20 décembre au Brésil en marge d’un sommet des pays du Mercosur dont Luiz Inácio Lula da Silva, le chef de l’État brésilien, assure la présidence tournante jusqu’à fin décembre. Pour ce faire, le Conseil de l’UE devra donner son feu vert à l’occasion d’une réunion la veille, le 19 décembre.

Relire : Accord Mercosur : Emmanuel Macron se dit « plutôt positif », les syndicats agricoles s’indignent

Relire : UE-Mercosur : huit agriculteurs français sur dix jugent l’accord mauvais voire très mauvais

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