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Érosion éolienne des sols : un risque sous-estimé à ne pas négliger

L’érosion éolienne affecte des sols limoneux et/ou sableux situés dans certaines régions ventées. Entraînant une perte de fertilité sur le long terme, les solutions sont dans le type de travail du sol, l’implantation de couverts et l’apport de matière organique.

<em class="placeholder">Tracteur entouré d&#039;un nuage de poussières dans une parcelle de sol nu.  </em>
Le vent soulève les particules fines de certains type de sol si elles ne sont pas protégées par un couvert ou retenues par une bonne structure.
© Pixabay

Phénomène affectant des sols meubles, constitués de particules fines, l’érosion éolienne se produit à partir d’un certain seuil de vitesse du vent à la surface du sol. Ce seuil est d’autant plus bas que le sol est nu et la parcelle de grande taille. Ainsi, il est possible par des pratiques appropriées de limiter les effets négatifs du vent.

Un type d'érosion observé dans certains territoires du Nord et du Sud-Ouest de la France 

Sylvain Dupont, directeur de recherche à l’Inrae (Institut national de la recherche agronomique et de l’environnement), indique qu’il n’y a pas en France, de périmètres ni de périodes de vent bien définis lorsque l’on parle d’érosion éolienne, contrairement aux régions du monde semi-arides. « Néanmoins, certaines régions françaises sont davantage concernées que d’autres, de façon ponctuelle, sur des situations de sol nu. » C’est le cas de certains territoires du Sud-Ouest, comme les Landes, ou du Nord (Pas-de-Calais, Somme…) où les éoliennes à perte de vue sont des marqueurs indéniables de la présence de vents forts. « L’érosion éolienne est une forme d’érosion que l’on sous-estime beaucoup. C’est un phénomène qui se produit dès que l’on voit un nuage de poussière derrière un déchaumeur, par exemple », explique Théo Sergheraert, agronome et PDG de la société de conseil Greensol, basée dans le Pas-de-Calais.

« Si l’érosion éolienne n’est pas une problématique en France aujourd’hui, elle pourrait le devenir », estime Sylvain Dupont. Avec le changement climatique, les périodes de sécheresse seront plus longues, avec pour conséquence un assèchement de la végétation, donc davantage de sols à nu et un risque d’érosion éolienne potentiellement plus important.

Des pratiques pour freiner le vent à la surface du sol

Pour réduire le risque d’érosion éolienne, il faut réduire la vitesse du vent près du sol. Un des leviers possibles est d’augmenter la rugosité de la surface du sol, qui va dépendre de la texture et de la taille des agrégats. « On va rechercher un sol qui se tient en surface, avec des particules fines qui restent au sol », explique Théo Sergheraert. Il préconise ainsi aux producteurs de cultures industrielles du nord de la France de limiter le travail du sol mécanique au printemps pour éviter que les sols ne se dessèchent au moment des semis. Cela suppose l’implantation dès le mois d’août de couverts d’interculture qui resteront en place pendant six à sept mois. Le choix des espèces et des variétés est primordial si l’on veut détruire le plus tard possible les couverts, courant janvier/février, afin de laisser des résidus en surface sans impacter l’implantation des cultures et éviter une faim d’azote, avance l’agronome. Les sols étant bien structurés par l’action des racines, on limitera le travail du sol entre 5 et 10 cm, maxi 15 cm de profondeur. » Christel Bouet, chargée de recherche à l’Institut d’écologie et des sciences de l’environnement (IRD-iESS), précise qu’il faut préférer les déchaumeurs à dents aux déchaumeurs à disques qui vont émietter le sol et désagréger les mottes de terre.

L’apport de matière organique rend le sol plus résistant

Autre atout pour avoir un sol résilient face à l’érosion éolienne : miser sur la matière organique. Les techniques culturales simplifiées vont permettre de la maintenir dans les premiers horizons du sol. « La matière organique est un liant pour le sol qui se désagrégera moins et sera ainsi plus résistant en cas d’érosion, qu’elle soit d’origine éolienne ou hydrique », indique Eva Deschamps, ingénieur régional Arvalis dans la région toulousaine. Elle n’oppose toutefois pas les techniques entre elles sur ce sujet. « Si on laboure, car le salissement de la parcelle l’impose, on va répartir la matière organique plus en profondeur et elle mettra un peu plus de temps à remonter. » En cas de labour, Sylvain Dupont, conseille de réaliser des sillons perpendiculaires aux vents dominants pour limiter l’érosion.

Faire des couverts d’interculture ou avoir une couverture végétale permanente va être source de matière organique, tout comme les apports de composts, de fumiers, ou l’enfouissement des pailles. Théo Sergheraert préconise lui aussi des apports réguliers d’amendement organique pour lutter contre l’érosion éolienne, en les raisonnant à l’échelle de la rotation. Enfin, à l’échelle du paysage, la plantation de haies d’arbres ou de buissons perpendiculaires au vent permettra de limiter la vitesse du vent et dans certains cas de réduire la taille des parcelles. Haies, couverture végétale et bonne structure de sol avec de la matière organique dans les premiers centimètres, constituent les trois barrières à l’érosion éolienne.

Le processus d’érosion éolienne

L’érosion éolienne se produit par l’action du vent sur des sols meubles de texture plutôt limoneuse ou sableuse, constituée de particules fines de 80 à 100 microns de diamètre. Le phénomène a lieu lorsque le vent atteint un certain seuil de vitesse au-dessus de la surface du sol, seuil qui va dépendre de la rugosité de celle-ci. « Un sol de sable nu (type plage) aura un seuil d’érosion très bas ; même un vent avec une vitesse faible mettra le sol en mouvement. A contrario, un sol argileux, végétalisé, avec des cailloux, aura un seuil d’érosion élevé. Il faudra un vent fort pour le mettre en mouvement », explique Christel Bouet de l’IRD-iESS. En sol nu, le seuil dépend de la granulométrie, sur un sol végétalisé le seuil est plus difficile à déterminer, précise Sylvain Dupont​​​​​​ de l’Inrae.

​Au-dessus de ce seuil de vitesse, les grosses particules sont mises en mouvement, elles vont rouler en surface, et les particules plus fines (argiles, limons, humus) vont être soulevées puis vont retomber assez vite. ​​​​​​Quand elles vont impacter la surface du sol, elles vont casser des agrégats du sol et émettre des poussières dans l’atmosphère. Sylvain Dupont ajoute que ce sont les particules fines qui font la fertilité d’un sol. « L’érosion éolienne se traduit par des pertes de fertilité avec des sols qui deviennent plus sableux et qui retiennent moins bien l’eau. »

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