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Les filières avicoles font face au tsunami du Covid-19

Depuis l’entrée en vigueur du confinement, les chaînes d’approvisionnement avicoles s’adaptent au bouleversement des débouchés et aux effets dominos des restrictions sanitaires.

Le 19 mars dans un supermarché de Bretagne, les linéaires étaient à nouveau bien remplis © P. Le Douarin
Le 19 mars dans un supermarché de Bretagne, les linéaires étaient à nouveau bien remplis
© P. Le Douarin

Avec le retour du « fait maison » imposé par la fermeture des lieux de restauration et le confinement, les Français redécouvrent que maintenir des flux alimentaires est aussi important que protéger leur santé. Le durcissement des mesures vis-à-vis du Sars-Cov 2 a d’abord suscité la peur de manquer. La semaine d’avant confinement, les ventes en GMS ont bondi de 38 % selon le cabinet Nielsen. Parmi ces produits figuraient les œufs et la volaille du quotidien. « La semaine du 16 mars, les magasins ont augmenté leurs commandes d’œufs d’environ 60 % », estime Maxime Chaumet, secrétaire général de l’interprofession de l’œuf (CNPO). Même son de cloche de Dylan Chevalier, porte-parole du groupe volailler LDC, qui évoque + 50 % d’achats de volailles. Même si cela s’est avéré très compliqué à organiser, les entreprises ont réussi à basculer les volumes de la RHF vers les GMS. « Chez LDC, c’est grâce à la solidarité entre les usines et à la polyvalence du groupe », souligne son porte-parole. Néanmoins, trois sites ont été arrêtés : Farmor (220 salariés), Celtys (120 salariés) et Chapon Bressan (20 salariés). « En dépit de l’arrêt des débouchés en restauration, il n’est pas resté de stock de poulet et dinde frais », se félicite Anne Richard, directrice de l’interprofession de la volaille (Anvol). Cet effort collectif a été souligné par les ministres Didier Guillaume et Bruno Lemaire qui ont rendu hommage aux agriculteurs et aux salariés de l’agroalimentaire. Après ce pic, les volumes commandés par les GMS semblent retomber aux alentours de +15 à + 20 %, correspondant aux repas supplémentaires désormais pris à domicile.

Fonctionner en mode "dégradé"

En ce qui concerne son fonctionnement, le secteur agricole et agroalimentaire fait face à deux risques majeurs : le maintien d’effectifs suffisants et la sécurisation de la chaîne d’approvisionnement. « Globalement, l’érosion des effectifs a été contenue à 10-15 % la première semaine de confinement », rapporte Anne Richard (Anvol), malgré l’arrêt des écoles, le message « restez chez vous » ambigu pour les activités essentielles et les informations alarmistes poussant des salariés au retrait. « Il nous a fallu beaucoup communiquer avec le personnel », souligne Estelle Le Helloco, accouveuse. À l’inquiétude des salariés s’est ajoutée la réorganisation des entreprises pour appliquer les consignes sanitaires. Elle est plus difficile quand les postes de travail sont proches, notamment pour les interventions en élevage.

Quant à la chaîne logistique (poussins, aliments, gaz, équarrissage, emballages…), elle a bien tenu jusqu’à présent (1) moyennant une période d’adaptation. Des difficultés d’approvisionnement en gaz industriel ou en emballages sont rapportées. Dans les entreprises d’intervention, il a fallu jongler avec les contraintes administratives et s’expliquer lors des contrôles. Conscientes des risques, les autorités ont pris des mesures pour faciliter le maintien de la force de travail (prime de 1 000 €, 60 heures par semaine, cumul possible travail saisonnier-chômage partiel…). La priorité est bien au maintien des « forces vives » d’une industrie agroalimentaire employant beaucoup de main-d’œuvre. À la crainte du manque de masques viendra bientôt s’ajouter celle de travailler dans des équipes ou des entreprises ayant des cas de Covid-19.

Se préparer à l’après Covid-19

À court terme, il est aussi à craindre que les mises en place en élevage se réduiront en volailles haut de gamme et pour le canard à foie gras pour lequel une forte réduction est dans l’air après un fort recul des achats en 2019. Après deux semaines de confinement, les perspectives à plus long terme sont encore imprévisibles. Combien de temps va durer l’épidémie ? La consommation avicole va-t-elle globalement diminuer ? Les Français achèteront-ils plus de produits français ? Les importations vont-elles se maintenir ou bien les pays exportateurs européens vont-ils privilégier leur marché intérieur ? La fin de l’histoire de la crise du Sars-Cov 2 n’est pas encore écrite.

(1) Article rédigé le 27 mars.

Le spécialisé RHD et le haut de gamme souffrent

Tous les produits avicoles n’ont pas connu le même succès que les œufs et volailles du quotidien. En effet, les consommateurs n’ont pas de raison particulière de se ruer sur des produits plus haut de gamme ou festifs, comme la pintade, la caille, le pigeon, le canard ou le foie gras. Et comme la RHF est pour ceux-ci un débouché important, les metteurs en marché ont dû stocker, donner ou détruire. Selon Marie Pierre Pé, déléguée générale de l’interprofession du foie gras, 40 % des ventes se sont arrêtées net. Il en est de même pour des produits très spécialisés comme les ovoproduits frais, les panés et autres nuggets destinés à la restauration collective ou commerciale. Des industriels polyvalents ont pu réorienter la matière première, mais pas les spécialisés. « En ovoproduit, certaines entreprises spécialisées ont perdu 80 % de leur chiffre d’affaires », rapporte Maxime Chaumet. Les ovoproduits déjà fabriqués et à DLC courte ont été donnés ou détruits. Quant aux œufs blancs, de début et de fin de ponte, ils ont été en partie basculés vers l’industrie des pâtes qui bénéficie d’une demande soutenue.

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