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Vers une levure de synthèse

La recherche fondamentale va franchir un nouveau pas avec la fabrication imminente de levures aux chromosomes fabriqués par synthèse. Une innovation qui pourrait ouvrir la porte à de nombreuses applications, comme la fabrication de levures aromatisantes. Et poser tout autant de questions d’éthique !

« À la fin de l’année 2018, la première levure fonctionnelle avec un génome de synthèse deviendra sans doute une réalité. Ce sera la première levure complète sans parent, à l’ADN fabriqué », annonçait Sakkie Pretorius lors d’un symposium sur la microbiologie des vins à Bordeaux en juin dernier (MicroWine, organisé par Chr. Hansen). Le chercheur de l’université Macquarie en Australie, participe à un programme international sur le génome de la levure qui pourrait ouvrir la voie à de multiples applications dans une vingtaine d’années, notamment en médecine, en agriculture, mais aussi en œnologie.

D’un point de vue scientifique, le génome d’une levure se compose de 16 chromosomes, porteurs de pas moins de 6 000 gènes. « Six chromosomes sont déjà synthétisés, dix restent à faire mais sont bien avancés », indique Sakkie Pretorius. Pour le chercheur, le fait de pouvoir fabriquer chimiquement l’ADN des gènes va permettre de mieux comprendre le rôle de chacun d’entre eux, ainsi que les interactions entre gènes. « On pourra alors jouer sur un ou plusieurs gènes pour commander ou diminuer la synthèse de tel ou tel arôme ou de tel ou tel composé », illustre-t-il.

Du chardonnay aux arômes de framboise

Et le chercheur n’a pas attendu la levure entièrement synthétique pour passer à la démonstration. Il a récemment fabriqué une levure œnologique « semi-synthétique » en ajoutant un 17e chromosome de synthèse aux 16 chromosomes « naturels » d’une Saccharomyces cerevisiae classique (souche AWRI 1631). Sur ce 17e chromosome, quatre gènes fabriqués chimiquement commandent toute la chaîne de production d’une molécule à l’arôme de framboise (4- (4hydroxyphenyl) butane-2-one), à partir d’un acide aminé présent dans le moût (la phénylalanine).

Cette « levure framboise » a été testée en laboratoire sur un moût de chardonnay. Résultat : elle s’est avérée parfaitement fonctionnelle, a terminé la fermentation du moût sans laisser de sucre résiduel et a développé les arômes de framboise attendus (deux fois le seuil de détection). « Le premier but de ce projet de recherche n’était pas de produire une levure framboise à l’échelle commerciale, précise Sakkie Pretorius, mais de parfaire nos compétences pour faire avancer la compréhension fondamentale des levures. » Pour lui, il ne fait aucun doute, qu’à terme, le fait de pouvoir synthétiser des levures permettra d’améliorer la qualité des vins tout en diminuant les coûts de production et les intrants.

Il y a de quoi donner le vertige aux consommateurs et vignerons de plus en plus attachés au naturel. Certes, on peut comprendre tout le potentiel de ces levures pour « aromatiser » les moûts en fonction de la tendance du marché. Mais on pressent aussi tous les dangers et les interrogations. Pas de doute que les débats d’éthique seront vifs.

Autres recherches en cours en microbiologie

Lors du symposium MicroWine, d’autres thèmes de recherche ont été abordés, notamment en matière de biocontrôle. Une souche bactérienne est ainsi testée en Afrique du Sud comme alternative aux traitements cupriques à la vigne. Les résultats en laboratoire sont prometteurs, la bactérie s’avérerait aussi efficace que le cuivre pour réduire les populations de champignon. Une université portugaise travaille, quant à elle, sur des champignons capables de lutter contre l’esca.

L’œnologie n’est pas en reste. Des danois étudient des cocktails bactériophages : il s’agit de virus qui s’attaquent à des souches de bactéries lactiques spécifiques. L’idée serait de les utiliser en vinification ou lors de la mise en bouteille, pour bloquer les fermentations malolactiques ou les déviations bactériennes, en alternative au SO2.

La biodiversité des micro-organismes est également très étudiée. Une université danoise participe à l’élaboration d’une base de données des micro-organismes des sols viticoles mondiaux. Elle a montré que les sols conduits en biodynamie présentent une plus grande diversité microbiologique que les autres et que la biodiversité varie selon les pays : elle serait plus importante sur les sols allemands et danois que sur d’autres.

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