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Six conseils pour mieux appréhender le marché américain

Une étude commanditée par FranceAgriMer et le Cniv met en avant les points faibles des vins français sur le marché américain. Focus.

© Commission européenne

Les États-Unis représentent le premier pays consommateur de vin du monde, avec près de 4 milliards de bouteilles ouvertes annuellement. Et qui plus est, il s’agit d’un marché en croissance de 1 à 2 %/an en volume. Malheureusement, les vins français sont loin d’y être suffisamment compétitifs, comme l’étude commanditée par FranceAgriMer et le comité national des interprofessions des vins (Cniv) le montre. En plus du fait de disposer d’un packaging et de documentations en anglais, voici quelques clés pour être efficace sur cette destination.

1 Bien cibler l’État

Les États-Unis sont, comme leur nom l’indique, une union de pays aux fonctionnements parfois très distincts. Il est donc difficile de s’attaquer d’un seul coup à l’ensemble du marché américain ; à chaque État s’applique une stratégie. Mais sur les cinquante, trois s’avèrent prioritaires puisqu’ils représentent à eux seuls 32 % de la consommation nationale du vin.

L’État qui semble à l’heure actuelle le plus stratégique est celui de New York. Même si sa consommation per capita est moindre que celle de la Californie — environ 2,4 millions d’hectolitres de consommés par an (Mhl/an) — les opportunités y paraissent supérieures. Et ce, pour diverses raisons. Tout d’abord, le vin y est à la mode et n’est que peu concurrencé par la bière, contrairement à de nombreuses autres zones américaines. Par ailleurs, New York n’est pas un État producteur. Enfin, le nombre de points de vente écoulant du vin ne cesse d’augmenter, que ce soit des librairies, des cinémas ou encore… des salons de beauté ! Il faut dire que dans cet État, on ne trouve pas de vin en grande surface (GD). Autre atout : la consommation On-trade, c’est-à-dire en café-hôtel-restaurant (CHR), est importante et le budget consacré à la dive bouteille y est conséquent : 50 % des clients déboursent plus de 90 $ pour une bouteille ! Et les consommateurs suivent les conseils des sommeliers, qu’il est donc primordial de séduire.

La seconde cible américaine n’est autre que la Californie, qui écoule 5,4 Mhl/an de vin. Mais la majorité de ce volume (80 %) est produite localement, ce qui ne laisse que 1,08 Mhl pour les vins étrangers. Malgré cela, il s’agit d’un marché plutôt simple à aborder, puisqu’il s’agit d’un État où le système des trois tiers (the Three Tiers System) — qui implique de disposer à la fois d’un importateur et d’un grossiste-distributeur — n’est pas obligatoire. Ce qui simplifie les démarches. Autre atout, les consommateurs ont davantage de connaissances œnologiques. Ils sont friands de vins « plus légers en alcool, avec moins d’extractions et de fûts neufs, de bio, de nature, de biodynamiques, et de nouveaux cépages », analysent les cabinets missionnés pour l’étude. Pour être identifié par les consommateurs, il est donc important de miser sur le cépage. Les pinot gris, chardonnay et sauvignon blanc sont particulièrement prisés en blanc ; les cabernet et pinot pour les rouges.

La Floride semble arriver en troisième position en termes d’intérêt, malgré un marché de l’ordre de 2,4 Mhl/an de vin de consommé. En effet, les vins français y sont déjà très bien positionnés : ils occuperaient le tiers du marché, à égalité avec les vins américains. Par ailleurs, la consommation de cet état « semble être fortement influencée par la fréquentation touristique, qui représente près de 113 millions de personnes », note FranceAgriMer. Il est donc difficile de définir un profil de produit type. Enfin, la dive bouteille y est concurrencée par de nombreux alcools.

2 Déployer davantage d’effervescents

Même s’ils ne représentent encore que 5 % des ventes en volume, les effervescents sont en plein boom aux États-Unis. Le marché américain en écoule environ 2 Mhl/an, les importations représentant à peu près la moitié de l’offre (1,13 Mhl en 2016). La majeure partie des effervescents est achetée en GD (0,8 Mhl) et en liquor stores (0,7 Mhl).

Ce créneau connaît une forte progression, avec + 61 % en volume entre 2011 et 2016, et + 75 % en valeur sur la même période. Malheureusement, cette croissance profite majoritairement aux vins italiens, Prosecco en tête, qui ont progressé de 113 % en cinq ans (0,62 Mhl en 2016), contre 37 % seulement pour les vins français (0,29 Mhl). En cause : un manque d’offre, en dehors des champagnes. « Les effervescents français sont majoritairement positionnés dans le segment Ultra Premium, au-dessus de 15 $/col (plus de 30 % des volumes), avec beaucoup de champagnes qui atteignent jusqu’à 20 $, analyse Julie Barat, de FranceAgriMer. Mais il y a une vraie demande pour les crémants dans le segment Premium (entre 8 et 15 $). » Sur le Off-trade, la France détient 30 à 35 % du marché Ultra Premium, derrière l’Italie, et seulement 5 % du Premium, après l’Italie, les États-Unis et l’Espagne. Quant au segment des Popular (moins de 8 $), la France n’y est pratiquement pas représentée avec moins de 2 % des volumes commercialisés.

À noter que le créneau des effervescents rosés pourrait bien exploser : « l’un des opérateurs leaders lance cette année un effervescent rosé en provenance de France », expose FranceAgriMer. Un segment à surveiller donc, même s’il ne représente actuellement que 5 % des volumes effervescents totaux.

3 Poursuivre le développement du rosé sec

Bien que la saisonnalité des consommations soit plus marquée outre-Atlantique, avec des achats de rouge en hiver, de blanc et de rosé en été, le marché du rosé est le second plus dynamique aux États-Unis. Et c’est aussi celui où la France est la mieux positionnée. Pour autant, afin d’éviter d’être à nouveau distancé par l’Italie, une grande vigilance s’impose.

Sur ce marché, les rosés foncés avec un taux de sucre résiduel important (les blush) sont majoritaires (0,8 à 1 Mhl/an sur le Off-trade), quoiqu’en perte de vitesse. La France y est très mal implantée puisqu’elle détient moins d’1 % de part de marché. À l’inverse, sur le segment des rosés secs (qui équivaut à 0,4-0,5 Mhl/an dans le Off-trade), les vins tricolores sont très bien implantés. Ils occupent 80 % du marché des vins de plus de 15 $, 60 % du créneau 11 à 15 $ ; 50 % du 8 à 11 $ et 35 % du 4 à 8 $.

4 On-trade : inviter les sommeliers dans les vignes

Le On-trade, ou CHR, correspond à environ 20 % des volumes commercialisés outre-Atlantique et connaît une légère montée en gamme, avec une « augmentation plus sensible de la valeur par rapport au volume », soutient FranceAgriMer.

Malheureusement, nous manquons là aussi des occasions. Les sommeliers se plaignent régulièrement qu’ils n’ont que rarement l’occasion de visiter, et même de déguster, des domaines français, ce qui les handicape à l’heure d’intégrer des bouteilles tricolores dans leurs cartes et encore plus, de les recommander. À l’inverse, les Italiens et les Argentins font visiter leurs vignobles et déguster leurs produits. L’absence d’actions des Français auprès des sommeliers est d’autant plus dommageable que les clients se reposent beaucoup sur leurs conseils à l’heure de commander leur vin. « Il faudrait donc réfléchir à travailler avec les grossistes spécialisés, pour développer des conseils aux sommeliers », suggère Julie Barat.

5 Off-trade : développer le cœur de gamme

Le cœur du marché Off-trade, nommé Sweet Spot, est constitué des vins compris entre 8 et 15 $. Ils représentent 37 % des vins rouges, et correspondent au créneau offrant la meilleure marge pour tous les opérateurs. Or c’est également le segment où l’Hexagone est le plus distancé. « Nous sommes en perte de vitesse sur tous les segments, mais celui-là est le plus inquiétant, confirme Julie Barat. Nous reculons par rapport aux vins italiens, mais aussi américains. »
En rouge, les vins français détiennent 7 % du segment 11 à 15 $ et 2 % du 8 à 11 $, loin derrière les USA, l’Italie, l’Argentine, voire l’Australie et l’Espagne sur le segment 8 à 11 $. Les red blends, du style Apothic, connaissent notamment un beau succès. Les vins français sont un peu plus performants sur les segments premium, mais y sont toujours distancés par les Italiens et Américains.

En blanc, le positionnement de la France est extrêmement faible, quel que soit le segment de prix, puisqu’il ne dépasse pas les 7 % de part de marché (segment des 15 à 20 $), loin derrière les vins américains, italiens, chiliens, portugais, néo-zélandais. Les blancs de type sauvignon blanc de Nouvelle-Zélande sont particulièrement prisés.

6 Miser sur internet

Les consultants à l’origine de l’étude notent une montée en puissance des ventes de vin sur internet. Certains opérateurs, à l’instar d’Amazon — qui a notamment racheté le réseau de magasins Whole Food axé sur les vins — profitent d’un certain vide juridique pour passer outre les grossistes et remettre en cause le système des trois tiers. Il s’agit certainement d’une opportunité à saisir, tant pour les producteurs français, que pour les sites français.

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