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[VIDEO] Le désherbage sans glyphosate : quelles alternatives ?

Lors du Sitevi, la table ronde sur le désherbage du futur organisée par Réussir Vigne et Réussir Fruits & Légumes a fait salle comble. Elle réunissait différents spécialistes des solutions alternatives aux phytos. Tour d’horizon des pistes étudiées.

 

« Nous cherchons des insectes spécifiques qui vont s’attacher à une seule plante »

René Sforza, chercheur entomologiste à l’EBCL (1)

« Nous travaillons sur les insectes phytophages qui peuvent contrôler des plantes nuisibles. Cette technique est surtout utilisée en Amérique du Nord. Ces plantes exotiques viennent souvent d’Asie ou d’Amérique du Sud. Mais elles ne viennent pas avec leur cortège d’auxiliaires. Il faut trouver des insectes spécifiques qui vont s’attacher à une seule plante. Ainsi des charançons, des coléoptères ou encore des papillons ont été lâchés. Sur l’ensemble des programmes mondiaux, dans 99 % des cas, ces introductions n’ont causé aucun problème. Au pire ça ne marche pas. Nous vérifions que ces insectes ne réduisent pas la biodiversité en se nourrissant d’autres plantes.

En Angleterre, un ravageur spécifique trouvé au Japon est utilisé comme un agent de lutte bio contre la renouée du Japon. En Italie, une chrysomèle, l’Ophraella communa est en train de s’installer et de réduire la présence de l’ambroisie. Mais au total en Europe, seuls trois agents de lutte biologique ont été lâchés contre des plantes invasives des milieux sauvages et aucun en France. »

(1) European Biological Control Laboratory.

« Il faut construire des programmes de désherbage en combinant plusieurs solutions »

Nicolas Fillot, responsable marchés vigne, arboriculture et maraîchage chez Belchim

« Nous développons une solution de biocontrôle, le beloukha, à base d’acide pélargonique, issu d’huile de tournesol ou de colza d’origine européenne. C’est une substance moins souple que des produits conventionnels. On a besoin d’avoir certaines conditions pour que ça marche. Il faut que les adventices soient jeunes car il n’atteint pas les parties ligneuses. Il détruit la cuticule des adventices, et provoque ensuite une déshydratation naturelle. La température doit être de plus de 15 °C. L’effet est immédiat mais il n’y a pas de persistance d’action car c’est un produit de contact et il est rapidement dégradé. Il fait partie d’une boîte à outils. Il s’utilise en combinaison avec d’autres pratiques comme le travail du sol, le désherbage mécanique ou la mise en place de couverts. C’est une solution qui permet des économies de main-d’œuvre car il s’agit d’une intervention par pulvérisation, plus rapide qu’un travail mécanique. Il peut aider à gérer le couvert en place. »

« La technique d’implantation d’un couvert sur le rang est une voie d’avenir mais complexe »

Muriel Millan, coordinatrice du projet Placohb, au CTIFL (1)

« Le projet interinstituts PlacoHB a pour objectif d’étudier les choix de couverts sur le rang, les espèces les plus pertinentes selon les productions pour concurrencer les adventices, l’entretien des couverts et les services rendus : biodiversité, réservoir à insectes auxiliaires, vie du sol, régulation de la température… Les espèces testées sont présentées sur le site du projet (2). Nous n’avons pas encore trouvé les couverts qui sont non concurrentiels pour les plantes cultivées mais c’est une voie d’avenir. Couvrir le sol avec du végétal est intéressant pour l’apport de micro-organismes et la structure du sol. Certaines espèces, comme l’achillée millefeuille, sont aussi intéressantes pour les auxiliaires. La problématique de l’enherbement dépend beaucoup des sols. Sur les sols pauvres et les premières années d’implantation des jeunes arbres, l’eau est un facteur limitant. Les couverts sur le rang fonctionnent sur des arbres adultes, et lorsque de l’irrigation est apportée en confort. La question est aussi de savoir comment on maintient les couverts. Bien souvent les espèces implantées disparaissent au profit d’un couvert spontané mais qui peut parfois avoir son intérêt. La technique d’implantation d’un couvert sur le rang est complexe avec de grandes variabilités interannuelles. »

(1) Centre technique interprofessionnel des fruits et légumes.
(2) wiki.itab-lab.fr/PlacoHB/?PagePrincipale

« Le facteur limitant pour le désherbage mécanique, c’est la main-d’œuvre »
Christophe Gaviglio, ingénieur mécanisation du vignoble à l’IFV Sud-Ouest

"Ça fait plus de quinze ans que les matériels de désherbage mécanique sur le rang ont progressé, notamment sur la régulation de la profondeur et du centrage grâce à des capteurs. La dernière innovation ce sont les disques émotteurs. Ils combinent la vitesse, la simplicité et la gestion des déplacements de terre. Il faut anticiper le développement de l’herbe sous le cavaillon et éviter les situations où l’herbe est trop haute.

Le désherbage thermique est une solution à l’étude mais c’est beaucoup d’énergie en jeu pour une efficacité qui ne tient pas dans le temps. Il peut y avoir des levées de dormance de certaines graines, ce qui peut entraîner beaucoup de passages. Le désherbage à l’eau froide à forte pression s’apparente à une action mécanique, mais il pose un problème de rationalité entre la mise en œuvre et le coût. Le désherbage électrique est une piste prometteuse. Les solutions de désherbage mécanique entraînent des investissements en matériel mais c’est surtout le temps de travail qui est un frein. Là où on faisait deux interventions chimiques à 5 km/ha il faut le remplacer par 5 interventions mécaniques à 2 km/ha. Il faut aussi du personnel formé pour avoir des réglages précis. Seulement 8 à 12 % des viticulteurs désherbent mécaniquement sur le rang aujourd’hui. »

« Les solutions émergentes sont de trouver des micro-organismes extrêmement spécifiques d’un type de mauvaise herbe »

Antoine Meyer, président de l’IBMA France (1)

« Le rôle du biocontrôle est de gérer une dynamique de population d’agresseurs pour que la culture se développe. On n’a pas envie de se retrouver face à un sol nu. Il y a des solutions émergentes qui sont de trouver des micro-organismes extrêmement spécifiques d’un type de mauvaise herbe. Demain il y aura des capteurs pour identifier ces mauvaises herbes, ce qui permettra d’utiliser le produit le plus adapté.

Certains micro-organismes sont déjà autorisés dans d’autres pays mais pas chez nous. On a une chance en France, c’est que la définition du biocontrôle existe. Mais le biocontrôle n’est pas défini au niveau européen. Tous les centres de recherche sur le biocontrôle travaillent sur les six premiers pays agricoles du monde donc pas pour des produits adaptés au système agricole français qui est désormais le 7e. Dans deux à cinq ans, il y aura plus de choses sur le marché. Pour une accélération, il faudrait un doublement du CICE consacré à la recherche sur le biocontrôle. Le déploiement du biocontrôle passe par la combinaison de technologies. »

(1) International Biocontrol Manufacturers Association.

voir plus loin

Réussir Fruits & Légumes vient de publier Le Nouvel age du désherbage, un passionnant hors-série diffusé avec son numéro 399 (prix : 11,15 €) qui explore les pistes comme la gestion du stock grainier du sol, la robotisation, les couverts, la lutte biologique par les extraits de végétaux, les insectes, les champignons ou bactéries… Pour se le procurer contacter Rania Bouteumera au 05 53 77 83 70 ou r.bouteumera@reussirfl.com.

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