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Salade : comment tendre vers le zéro résidu

Une meilleure connaissance des solutions alternatives et des substances chimiques permet de diminuer globalement les résidus mais ne permet pas d’atteindre le niveau zéro résidu en salade.

L’intérêt de la distribution et du consommateur pour les produits labellisés zéro résidu de pesticides a conduit la Sica Centrex à réaliser des essais en culture de salade afin d’obtenir des analyses de résidus inférieures à la limite de quantification demandées par ce label.

Présence dominante des fongicides

« Sur salade, les travaux ont débuté par une étude des pratiques producteurs couplée à des analyses de résidus afin de déterminer les itinéraires les moins impactants », explique Aude Lusetti, de la Sica Centrex. Ainsi sur la période 2016-2018, les échantillons prélevés chez sept producteurs de laitues sous abris et scaroles de plein champ ont permis de classer les produits en « systématiquement retrouvés », « à résidus variables », « ne laissant pas ou peu de résidus ». L’analyse des résultats a montré que 80 % des résidus trouvés étaient en dessous de 5 % de la LMR dans une fourchette de 2 à 10 résidus différents, majoritairement des fongicides. « Les matières actives disparues ces dernières années étaient souvent les fongicides les moins traçants et peu de solutions fongicides existent désormais, ce qui explique la présence dominante des fongicides », commente la spécialiste lors d’une réunion de présentation des résultats en janvier 2023. Les travaux se sont donc prolongés sur l’évaluation de l’impact des méthodes alternatives contre mildiou, botrytis, Sclerotinia pour réduire l’utilisation des solutions chimiques les plus impactantes.

Des leviers alternatifs étudiés

Pour le mildiou, l’huile essentielle d’orange (limocide 3L/ha, DAR 1 jour) a montré des effets en fin de programme sur mildiou déjà déclaré. « L’efficacité a été de 15 % sur un essai où 100 % des salades étaient attaquées et 41 % de feuillage atteint sur le témoin », précise Aude Lusetti. Laminarine (Vacciplant, 2L/ha, DAR 1 jour) et cerevisane (Romeo, 0,75 kg/ha, DAR 1 jour) ont également présenté une « efficacité mildiou » comparable au phosphanate de potassium (LBG 01F34), en début de culture en période à faible risque mildiou, sur un essai à faible pression. Le chlorhydrate de chitosan, développé par Green Impulse (Kitae®, 0,8L/ha), éliciteur de défenses naturelles, essayé avec un programme de référence à demi-dose (Previcur-LBG-Ortiva-Revus) a permis d’obtenir le même niveau d’efficacité que le programme pleine dose, alors que le programme de référence demi-dose solo ne l’a pas permis. « En revanche, laminarine et cerevisane, stimulateurs de défenses naturelles, n’ont pas eu d’effet sur mildiou déjà déclaré. Et l’hydrogénocarbonate de potassium (Armicarb et Vitisan) n’a pas présenté d’efficacité mildiou dans le cadre de nos essais », relève l’expérimentatrice.

L’évaluation des leviers alternatifs de lutte contre Sclerotinia et Rhizoctonia a montré que l’utilisation de champignons antagonistes du sol comme Coniothyrium mimitans (Contans 5 kg/ha) ou Trichoderma atroviride (Trisoil, 2,5 à 5 kg/ha), appliqués à la plantation avant le dernier gros arrosage, avait un intérêt dans la lutte contre ces maladies. Le Trisoil a montré une efficacité comparable au Signum en condition de faible attaque de Sclerotinia (78 % d’efficacité). Sur Rhizoctonia, son efficacité a été évaluée entre 35 et 72 % dans le cas de forte attaque (entre 71 et 81 % pour Signum). « Dans des conditions de fortes attaques d’un complexe Fusarium, Rhizoctonia et Sclerotinia, Trisoil a permis de conserver 78 % du rendement, contre 70 % avec Signum et 62 % avec Contans », mentionne Aude Lusetti, lors de la présentation. À noter également que la réduction du travail du sol et l’apport de matière organique ont montré des tendances à limiter les attaques de Rhizoctonia et Sclerotinia. « Ces observations sont à consolider et ouvrent d’autres possibilités d’alternatives », assure-t-elle.

Des facteurs pour réduire le recours aux produits

La Sica Centrex a également réalisé un essai sur des programmes alternatifs pour lutter contre les champignons (fusariose, Sclerotinia, Rhizoctonia, botrytis) en associant différentes méthodes (engrais verts (sorgho) + solarisation + réduction du travail du sol) qui a montré la possibilité de réduire les risques de ces maladies. « Un essai 'faibles résidus' utilisant uniquement des produits de biocontrôle (AmyloX, Prestop et Trisoil) a permis d’observer peu de dégâts à la récolte sur une saison à faible pression », mentionne également Aude Lusetti. De même, l’application de l’antimildiou Previcur Energy sur plants avant plantation (DRE 48 h), associée à la non utilisation d’un produit à base de propamocarbe en culture, évitent les risques de résidus à la récolte. En revanche, la mise en œuvre d’un outil d’aide à la décision contre le mildiou n’a pas permis d’obtenir des résultats satisfaisants, le modèle utilisé n’étant pas au point. Il en est de même de l’arrêt des traitements mildiou 30 jours avant récolte, testé en janvier, qui donne des résultats insuffisants sur le niveau final de résidus et sur la qualité des produits.

 

Dans la lutte contre les maladies cryptogamiques, la génétique et la gestion du climat, de l’irrigation et de la fertilisation restent des facteurs importants pour réduire le recours aux produits phytosanitaires. L’utilisation de variétés ayant des résistances contre le mildiou et la fusariose permettent de diminuer fortement les risques, sans pour autant le réduire à zéro. L’aération maximale des abris est aussi un facteur important pour limiter les risques. Contre les chenilles phytophages, il a été possible de remplacer la chlorantaniliprole (Altacor), molécule traçante, par l’utilisation de Bacillus thuringiensis (Delfin) et de deltaméthrine (Decis Protech, dernière application au moins 14 jours avant récolte), couplé à une surveillance des parcelles pour repérer les premiers stades larvaires. Contre les pucerons, l’utilisation de variétés résistante Nr0, associée à la surveillance régulière des parcelles et à l’utilisation des produits les moins traçants (deltaméthrine), permet de réduire les résidus en récolte. Le programme de traitement deltaméthrine - spirotetramat a été efficace dans la lutte contre les pucerons, mais les applications moins de 30 jours avant récolte ont laissé des résidus de spirotetramat.

Confronté aux circuits de commercialisation

« Les travaux menés ont montré qu’une meilleure connaissance des produits alternatifs et des substances chimiques permet de diminuer globalement les résidus mais n’a pas permis d’atteindre le niveau zéro en salade », résume Aude Lusetti. Mais l’obtention de salades labellisées zéro résidu est toutefois difficile à atteindre en raison de la suppression de nombreux produits entre 2018 et 2021 qui étaient peu traçants. « De plus, les antimildiou désormais disponibles tracent, quelles que soient les conditions d’utilisation », commente-t-elle. Les difficultés de résultats sont également confrontées aux exigences des circuits de commercialisation, notamment les transformateurs de 4e gamme qui ont une tolérance zéro vis-à-vis des ravageurs (pucerons, chenilles) mais également des auxiliaires (larves de syrphes, de cécidomyies, de chrysopes). Les solutions alternatives étudiées présentent des résultats aléatoires en fonction des conditions climatiques et d’application. De plus, l’augmentation des coûts de production des salades et celle du risque sont relativement faible au regard de la valeur ajoutée du produit.

 

Points d’amélioration

1- L’analyse des résidus d’insecticides obtenus dans les échantillons de 2021 a montré que l’Altacor (chlorantraniliprole), utilisé contre les chenilles, représentait 80 % des résidus insecticides retrouvés. Des solutions moins traçantes sont disponibles actuellement comme Bacillus thuringiensis, la deltamethrine ou l’emamectine, qui dans le cadre de ce projet se sont révélées peu traçantes en application plus de 15 jours avant la récolte.

2 - Le Previcur Energy et/ou l’Infinito (antimildiou), appliqués en cours de culture, ont laissé des résidus systématiques de propamocarbe. Positionnés à la plantation sans recours ultérieur à cette matière active, ils ne laissaient que peu de traces.

Pas ou peu de résidus

mancozèbe (Dauphin) : mildiou (utilisé en début de culture) > 30 jours

cymoxanil (Dauphin) : mildiou > 30 jours

deltamethrine (Decis) : noctuelles, pucerons > 18 jours

emamectine (Affirm) : noctuelles > 10 jours

lambda cyhalothrine (Karate) : pucerons/noctuelles > 33 jours

pyrimicarbe (Karate) : pucerons/noctuelles > 30 jours

spinosad (Success 4) : pucerons, noctuelles > 33 jours

spirotetramat (Movento) : pucerons > 14 jours

(source : résultats d’analyse des résidus 2018)

À noter : le mancozèbe associé au cymoxanil (Dauphin), ainsi que la lambda cyhalothrine, ne sont plus homologués sur laitue. De plus, les conditions d’application du pirimicarbe rendent difficile sont utilisation en culture (ZNT > 100 mètres)

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